source : https://www.dedefensa.org/article/perspectives-de-totalitarisme
• Description de la crise totale où nous sommes engagés, et dont la logique semble conduire au totalitarisme. • Mais comment installer le totalitarisme quand on est aussi incompétents ? • Contribution : dde.org et Alastair Crooke.
Dans un long texte où l’on trouve cités le Daily Telegraph dans un commentaire apocalyptique, Lewis Carroll, Jean-Jacques Rousseau, H.G. Wells, Bertrand Russell, W.B. Yeats, Alain Besançon, l’excellent chroniqueur et formidable analyste Alastair Crooke dresse un tableau tragique de la situation de notre-civilisation. Le thème principal en est l’hypothèse irrésistible de la montée d’un totalitarisme qui semble la seule “issue de secours” des élites mondiales de la globalisation, élites-Système plongées dans les effets de leurs erreurs sans nombre comme produit catastrophique de leur détachement de la vérité-du-monde (la vérité-de-situation d’une tragédie-bouffe à l’échelle cosmique) ; mais “issue de secours” dont on devrait vite convenir qu’il faut la voir comme une voie sans issue, en forme d’impasse et de cul-de-sac à la fois pour bien verrouiller l’inefficacité, l’incapacité et la monstrueuse incompétence des susdites “élites-Système”.
Effectivement, dans ces situations de crise totale, l’évolution vers le totalitarisme semble la seule perspective. Le cas s’est déjà produit dans l’histoire, mais sous une forme radicalement différente de celle qui menace aujourd’hui. Jusqu’alors, les totalitarismes naissaient de l’attaque, brutale (“coup”, révolution), ou d’une accession d’apparence légale mais de partis authentiquement révolutionnaires et affichant leur volonté totalitariste, – cela faisant justement leur succès. Dans tous les cas, le totalitarisme venait d’en-dehors du système en place, même si avec diverses complicités internes bien sûr ; l’on peut même dire que cette origine d’“en-dehors” constituait un des fondements de son affirmation totalitaire, et paradoxalement une des conditions du succès de sa mise en place.
Aujourd’hui, ce que nous décrit Crooke selon une analyse qui rencontre de plus en plus d’adeptes, et cela concernant les pays du bloc-BAO, c’est un régime qui se définit comme libéral, progressiste, démocratique, etc., dérivant nécessairement à grande vitesse en raison de la pression d’événements extrêmement rapides, et donc vers un autoritarisme habillé de quelques douceurs & friandises, – “autoritarisme-soft”, “autoritarisme-light”, etc.
C’est à ce point, à notre sens, qu’apparaît une énigme : comment un régime qui se prétend démocratique et libéral, et qui est obligé de produire certaines conditions justifiant cette prétention, notamment du point de vue de la liberté de l’expression, et encore plus dans une époque où la communication est d’une puissance si prodigieuse et d’un accès si universel par un nombre considérable de moyens, – comment se régime peut-il devenir totalitaire, – même “soft”, même “light” ? On répondra aussitôt : le mensonge, bien entendu... Mais nous vivons d’ores et déjà en régime maximal de mensonges, depuis si longtemps, certainement avec une intensité qui peut difficilement être dépassée, depuis 9/11, l’Irak, les guerres diverses, l’Ukraine-2014, le Covid, l’Ukraine-2022, etc., – et nous en sommes toujours dans une disposition où l’on annonce le totalitarisme pour demain, comme solution désespérée, où la crise ne cesse de s’aggraver, absolument hors de contrôle d’un personnel-Système d’une extraordinaire incompétence, dont aucun, absolument aucun régime totalitaire ne voudrait jamais !...
Enfin, nous sommes, dans ces domaines essentiels de la communication, de la perception autorisée, de la manipulation des psychologies, en situation de totalitarisme, et pourtant la crise ne cesse de croître, les menaces de désordre de s’amonceler et de s’aggraver, etc. C’est d’ailleurs une des approches paradoxales les plus remarquables : ce sont bien les menaces de désordre eux-mêmes issus d’une situation absolument totalitaire dans sa substance même, qui justifient, qui appellent les prévisions d’une évolution totalitaire ! Comment faire plus totalitaire quelque chose qui est d’ores et déjà totalitaire si complètement mais qui l’est si mal du point de vue de la technique politique ?! Comment un système aussi dépravé, aussi inefficace, aussi aveugle, aussi corrompu psychologiquement que vénalement pourrait-il parvenir à une telle efficacité de contrainte et de contrôle que ce que demande le totalitarisme ?
Il faut répéter les mots que cite Alastair Crooke, qui décrivent la situation présente, car ces mots viennent d’un des établissements-fanion du Système, un outil fondamental de ce qui devrait devenir le régime totalitaire “souhaité”... Comment les gens et les groupes ainsi décrits par un connaisseur qui est des leurs, peuvent-ils espérer remporter cette folle transformation en un totalitarisme dont l’une des spécifications premières doit être l’efficacité de l’exécution selon une perception totalement réaliste de la situation ?
« C'est l'été avant la tempête. Ne vous y trompez pas, avec les prix de l'énergie qui vont atteindre des sommets sans précédent, nous nous approchons de l'un des plus grands séismes géopolitiques depuis des décennies. Les convulsions qui s'ensuivront seront probablement d'un ordre de grandeur bien supérieur à celles qui ont suivi le krach financier de 2008, qui a déclenché des protestations dont le point culminant a été le mouvement Occupy et le printemps arabe....
» Le carnage est déjà arrivé dans le monde en développement, avec des coupures de courant de Cuba à l'Afrique du Sud. Le Sri Lanka n'est qu'un exemple parmi une cascade de pays à faible revenu où les dirigeants risquent d'être chassés du pouvoir dans un feu d'artifice ignominieux de sécheresses pétrolières et de défauts de remboursement de prêts.
» Mais l'Occident ne va pas échapper à cet Armageddon. En fait, à bien des égards, il semble même en être l'épicentre - et la Grande-Bretagne serait son Ground Zero. En Europe et en Amérique, un système d'élite technocratique construit sur la mythologie et la complaisance s'effondre. Sa fable fondatrice - qui prophétisait l'enrôlement glorieux des États-nations dans le gouvernement mondial et les chaînes d'approvisionnement - s'est métastasée en une parabole des périls de la mondialisation.
"» Cette fois, les élites ne peuvent pas se soustraire à la responsabilité des conséquences de leurs erreurs fatales... Pour dire les choses simplement, le roi est nu : l'Establishment n'a tout simplement pas de message pour les électeurs face aux difficultés. La seule vision de l'avenir qu'il peut évoquer est celle du Net-Zero, – un programme dystopique qui porte à de nouveaux sommets la politique sacrificielle de l'austérité et la financiarisation de l'économie mondiale. Mais il s'agit d'un programme parfaitement logique pour une élite qui n'est plus en phase avec le monde réel. »
Lisez donc ce portrait formidable, presque comme une fresque surhumaine, que trace Alastair Crooke de notre situation présente, au bord de l’abîme, dégringolant dans l’abîme, disparaissant dans ce trou noir sans fond que nous avons nous-mêmes creusé, et que même nous continuons à creuser au long de la chute comme si nous voulions que cette chute soit encore plus profonde, plus éperdue, plus enfouie, creusant au fond comme l’on fait pour une chute sans fond... Nous sommes tellement mauvais, tellement nuls, tellement transparents par absence de substance, qu’il nous paraît extrêmement difficile que nous puissions jamais arriver, dans cet océan chaotique de désordre, à parvenir à imposer l’ordre immonde, – mais ordre tout de même, – du totalitarisme...
Lisez le texte d’Alastair Crooke (“Conflicts Forum’s Weekly Comment”) en date du 5 août 2022
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