"Il n'existe rien de constant si ce n'est le changement" BOUDDHA; Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères, sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots." MARTIN LUTHER-KING; "Veux-tu apprendre à bien vivre, apprends auparavant à bien mourir." CONFUCIUS ; « Nous savons qu’ils mentent, ils savent aussi qu’ils mentent, ils savent que nous savons qu’ils mentent, nous savons aussi qu’ils savent que nous savons, et pourtant ils continuent à mentir ». SOLJENITSYNE
vendredi 22 décembre 2023
Y a-t-il un pilote dans l’avion France ?
Y a-t-il un pilote qui conduit la politique énergétique de la France ? On peut se le demander lorsque l’on sait que le prix de vente aux consommateurs de l’électricité nucléaire française, pourtant l’une des moins chères du monde, est indexé sur le prix européen du gaz, qui est l’un des plus chers du monde !
Y a-t-il un pilote qui conduit la politique économique de la France ? On peut se le demander lorsque l’on entend le ministre Bruno Le Maire, confondant endettement et déficit, se féliciter du désendettement au motif que le déficit n’est plus creusé à la dynamite, mais à la pelleteuse.
Y a-t-il un pilote qui conduit la politique sécuritaire de la France ? On peut se le demander lorsque Darmanin explique benoîtement qu’il est impossible de faire des lois pour accélérer la reconduite aux frontières des personnes sous OQTF (Obligation de quitter le territoire français), alors que les rares OQTF réellement obligés de quitter le territoire national sont maintenus en France grâce à l’activisme d’association « droit-de-l’hommistes » financées en partie par l’État.
Y a-t-il un pilote qui conduit la politique extérieure de la France ? On peut se le demander lorsque l’on voit le squatteur de l’Élysée se ranger tour à tour du côté des Palestiniens puis de celui des Israéliens pour au final de ridiculiser en prêchant dans le désert pour la paix et en votant contre une résolution de cessez-le-feu présentée à l’ONU par les Russes.
Dans tous les domaines, la même question se pose.
La réponse est, oui, il y a un pilote dans l’avion. Mais, pour le plus grand malheur de la France, ce pilote est américain et sa mission est de crasher l'avion France pour le détruire.
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vendredi 11 novembre 2022
Les nombreuses « guerres » imbriquées – Un guide sommaire à travers le brouillard
source : https://lesakerfrancophone.fr/les-nombreuses-guerres-imbriquees-un-guide-sommaire-a-travers-le-brouillard
Nous avons maintenant un ensemble embarrassant de « guerres » dont, paradoxalement, l’Ukraine est peut-être celle de moindre importance stratégique.
Par Alastair Crooke – Le 24 octobre 2022 – Source Strategic Culture
Nous avons maintenant un ensemble embarrassant de « guerres » dont, paradoxalement, l’Ukraine est peut-être celle de moindre importance stratégique – bien qu’elle conserve un contenu symbolique significatif. Un « drapeau » autour duquel les histoires sont racontées et le soutien rallié.
Oui, il n’y a pas moins de cinq « guerres » en cours, qui se chevauchent et sont liées entre elles – et elles doivent être clairement différenciées pour être bien comprises.
Ces dernières semaines ont été marquées par plusieurs changements d’époque : le sommet de Samarkand, la décision de l’OPEP+ de réduire la production pétrolière des pays membres de deux millions de barils par jour à partir du mois prochain, et la déclaration explicite du président Erdogan selon laquelle « la Russie et la Turquie sont ensemble et travaillent ensemble » .
Les alliés de base des États-Unis, l’Arabie saoudite, la Turquie, les Émirats arabes unis, l’Inde, l’Afrique du Sud, l’Égypte et des groupements tels que l’OPEP+ font un grand pas vers l’autonomie et vers la coalescence de nations non occidentales en un bloc cohérent, qui agit selon ses propres intérêts et fait de la politique « à sa façon » .
Cela nous rapproche du monde multipolaire que la Russie et la Chine préparent depuis plusieurs années – un processus qui signifie « la guerre » du découplage géostratégique de l’« ordre » mondial occidental.
Cette guerre est menée, d’une part, en présentant la Russie et la Chine comme trop méfiantes l’une envers l’autre pour être des partenaires. D’autre part, on présente la Russie comme étant si faible, si dysfonctionnelle et erratique (prête à utiliser des armes nucléaires tactiques), que le binaire « avec nous » ou « contre nous » oblige les États à se ranger du côté de l’Occident. Dans ce cas, l’Ukraine est présentée comme le brillant « Camelot » autour duquel se rassembler, pour combattre les « ténèbres » .
Cela nous mène directement à la « guerre » financière mondiale qui dure depuis longtemps, une guerre à deux niveaux.
Au premier niveau, la Fed américaine joue un « jeu mondial » . Elle augmente les taux d’intérêt pour de nombreuses raisons. Mais ici, il s’agit de protéger le « privilège du dollar » , qui consiste à pouvoir échanger l’argent qu’elle imprime à partir de rien contre de la main-d’œuvre et des marchandises réelles dans le monde entier. Ce privilège de « monnaie de réserve » est à la base du niveau de vie élevé des États-Unis (bien plus élevé qu’il ne le serait autrement). C’est un avantage énorme, et la Fed va protéger cet avantage.
Pour ce faire, le plus grand nombre possible d’États doivent être dans la « filière » du dollar et faire des échanges en dollars. Et placer leur épargne dans les bons du Trésor américain. La Fed fait maintenant tout ce qu’elle peut pour faire s’effondrer la part de marché de l’euro et ainsi faire passer les euros et les euro-dollars dans le circuit du dollar. Les États-Unis menaceront l’Arabie saoudite, les États du Golfe et la Turquie pour les empêcher de quitter ce circuit.
Il s’agit là de la « guerre » contre la Russie et la Chine, qui détournent une grande partie de la planète du système du dollar pour la faire entrer dans une sphère non dollarisée. Le non-respect de l’appartenance au système du dollar est sanctionné par divers outils, depuis les sanctions, le gel des avoirs et les droits de douane jusqu’au changement de régime.
Si la Fed ne protège pas le « privilège du dollar » , elle court le risque de voir tout le monde sortir du circuit. Le bloc Eurasie s’efforce de sortir du circuit du dollar, de créer une résilience économique et de commercer en dehors du circuit. Ce que la Fed essaie de faire, c’est d’arrêter cela.
La deuxième dimension de la guerre financière américaine est la longue lutte menée par les États-Unis (Yellen et Blinken, plutôt que la Fed) pour conserver le contrôle des marchés de l’énergie, et la capacité des États-Unis à fixer le prix des carburants. Les BRICS (avec la volonté des Saoudiens de les rejoindre) ont l’intention de développer un « panier » de devises et de matières premières destiné à servir de mécanisme commercial alternatif au dollar pour le commerce international.
Le groupe eurasien ne prévoit pas seulement de commercer en monnaies nationales, et non en dollars, mais il veut lier cette monnaie d’échange à des produits de base (pétrole, gaz, nourriture, matières premières) qui ont une valeur intrinsèque – qui deviennent ainsi des « monnaies » à part entière. Plus que cela, le groupe cherche à éloigner le contrôle des marchés de l’énergie des États-Unis, et à le relocaliser en Eurasie. Washington a toutefois l’intention de reprendre le contrôle (par le biais du contrôle des prix).
Et c’est là que réside un problème fondamental pour Washington : le secteur des matières premières – avec sa valeur tangible inhérente – devient, en soi, une « monnaie » très recherchée. Une monnaie qui, à cause d’une inflation galopante, surpasse la monnaie fiduciaire dévaluée. Comme le souligne Karin Kneissl, ancienne ministre autrichienne des affaires étrangères, « en 2022 seulement, la banque centrale étasunienne a imprimé plus de papier-monnaie que dans toute son histoire. L’énergie, en revanche, ne peut être imprimée » .
Cette « guerre de l’énergie » prend la forme d’une perturbation ou d’une destruction du transport – et du flux – des produits des producteurs d’énergie eurasiens vers les clients. L’UE vient de goûter à cette « guerre » particulière avec la destruction des pipelines Nordstream.
Nous en arrivons maintenant aux grandes « guerres » : tout d’abord, la guerre pour forcer la Fed à pivoter – à pivoter vers les taux d’intérêt zéro et l’assouplissement quantitatif.
La révolution sociale aux États-Unis, qui a vu une élite métropolitaine radicalisée considérer la diversité, le climat et la justice raciale comme des idéaux utopiques, a trouvé sa « cible » facile dans une UE déjà à la recherche d’un « système de valeurs » pour combler son propre « déficit démocratique » .
La bourgeoisie européenne a donc sauté avec alacrité dans le « train » libéral américain. S’appuyant sur les politiques identitaires de ces derniers, ainsi que sur le « messianisme » du Club de Rome en matière de désindustrialisation, la fusion semblait offrir un ensemble impérial idéal de « valeurs » pour combler les lacunes de l’UE.
Seulement … seulement, les Républicains pro-guerre américains, ainsi que les néo-conservateurs Démocrates pro-guerre, avaient déjà grimpé dans « ce train » . Les forces culturelles-idéologiques mobilisées convenaient parfaitement à leur projet interventionniste : « Notre premier objectif est d’empêcher la réémergence d’un nouveau rival » (doctrine Wolfowitz) – la Russie d’abord, la Chine ensuite.
En quoi cela a-t-il à voir avec la guerre contre la Fed ? Cela a beaucoup à voir. Ces courants s’engagent à imprimer et à dépenser GROS, sinon ils verront leurs projets s’effondrer. Le Reset nécessite l’impression. Le Green nécessite l’impression. Le soutien au « Camelot » ukrainien nécessite l’impression. Le complexe militaro-industriel en a également besoin.
Les libéraux américains woke et les écolos européens woke ont besoin que le robinet de l’argent soit complètement ouvert. Ils ont besoin d’imprimer de l’argent à outrance. Ils doivent donc faire chanter la Fed pour qu’elle n’augmente pas les taux, mais qu’elle revienne à l’ère du taux zéro, afin que l’argent reste à coût zéro et circule librement (et au diable l’inflation).
La CNUCED, qui supplie toutes les banques centrales d’arrêter de relever les taux pour éviter une récession, est l’un des fronts de cette guerre ; la poursuite de la guerre en Ukraine, avec l’énorme déficit financier qui en découle, est un autre moyen de forcer la Fed à « pivoter » . Et forcer la Banque d’Angleterre à « pivoter » vers le QE en est encore un autre.
Pourtant, jusqu’à présent, Jerome Powell résiste.
Il y a aussi l’autre « guerre » (en grande partie invisible) qui reflète la conviction de certains courants conservateurs américains que l’après-2008 a été un désastre, mettant le système économique américain en danger.
Oui, ceux qui soutiennent Powell sont certainement préoccupés par l’inflation (et comprennent aussi que les hausses de taux d’intérêt ont été faite en retard par rapport à l’inflation galopante), mais ils sont encore plus préoccupés par le « risque sociétal » , c’est-à-dire le glissement vers la guerre civile en Amérique.
La Fed pourrait continuer à relever les taux pendant un certain temps – même au prix d’un certain effondrement des marchés, des fonds spéculatifs et des petites entreprises. Powell a le soutien de certaines grandes banques new-yorkaises qui voient avec beaucoup de clarté ce qui les attend avec le modèle libéral et woke : la fin de leur activité bancaire lorsque les renflouements deviendront numériques et seront versés directement sur les comptes bancaires des demandeurs (comme l’a proposé le gouverneur Lael Brainard).
Powell ne dit pas grand-chose (il est probable qu’il se tienne à l’écart de la politique américaine partisane durant cette période délicate).
Cependant, la Fed pourrait tenter de mettre en œuvre une démolition contrôlée de la bulle économique américaine, dans le but précis de ramener l’Amérique sur des rails financiers plus traditionnels. Pour briser la « culture des actifs à effet de levier » … Vous commencez à résoudre l’énorme fossé d’inégalité sociétale que la Fed a contribué à créer, par le biais de l’assouplissement quantitatif facilitant les bulles d’actifs géantes … Vous commencez à rajeunir l’économie américaine en mettant fin aux distorsions. Vous dissipez l’envie de guerre civile parce que le problème n’est plus seulement entre les « nantis » et les « démunis » .
Cette vision est peut-être un peu utopique, mais elle permet de briser la « bulle du tout » , de briser la culture de l’effet de levier et de mettre fin à la confrontation extrême entre les bénéficiaires de la bulle et la baisse des salaires réels aux États-Unis pendant 18 mois consécutifs.
Mais … mais cela n’est possible que si rien de systémique ne se brise.
Quelles sont les implications géostratégiques ? De toute évidence, beaucoup de choses dépendent du résultat de l’élection américaine de mi-mandat. Il semble d’ores et déjà (en fonction des résultats précis des candidats du GOP) que le financement de la guerre en Ukraine sera réduit. L’ampleur de cette réduction dépendra de la marge de succès obtenue par les « populistes » du GOP.
Il n’est pas plausible que l’UE, confrontée à sa propre crise dévastatrice, continue à financer Kiev comme avant.
Mais l’importance de la lutte pour replacer les États-Unis dans le paradigme économique des années 1980 suggère que l’Occident va frôler une rupture systémique au cours des prochaines semaines.
Les euro-élites sont trop lourdement investies dans leur voie actuelle pour changer de narratif dans un avenir proche. Ils continueront donc à blâmer et à dénigrer la Russie – ils n’ont guère le choix s’ils veulent éviter la colère populaire. Et il y a trop peu de signes indiquant qu’ils ont mentalement assimilé le désastre que leurs erreurs ont provoqué.
Et en ce qui concerne Bruxelles, le mécanisme de rotation des dirigeants de l’UE est largement absent. L’Union n’a jamais été équipée d’une marche arrière – un besoin que l’on pensait inimaginable à l’époque.
La question reste donc : « quelle sera la situation en Europe en janvier-février ? ».
Alastair Crooke
Traduit par Zineb, relu par Wayan, pour le Saker Francophone
lundi 31 octobre 2022
WANG WEN EN DIALOGUE AVEC DUGIN : SI LA RUSSIE CHERCHE À RÉSOUDRE LES PROBLÈMES, ELLE DEVRAIT PRENDRE LA CHINE COMME EXEMPLE À ÉTUDIER
source : https://www.geopolitika.ru/en/article/wang-wen-dialogue-dugin-if-russia-seeks-solve-issues-it-should-take-china-example-be-studied
Wang Wen : Tout d'abord, permettez-moi de vous rendre hommage au nom de nombreux Chinois et de vous exprimer mes condoléances pour le décès malheureux de votre fille bien-aimée Darya. Ces derniers mois, de nombreux attentats terroristes ont eu lieu en Russie. Comment voyez-vous le développement intérieur de la Russie en situation de conflit aujourd'hui ?
Dugin : Je voudrais vous remercier, tout d'abord pour votre soutien moral et j'apprécie profondément la douleur du peuple chinois suite à la mort de ma fille Darya Dugina. Dugina est un symbole de la lutte de notre âme russe contre un système mondial hégémonique injuste et une victime du terrorisme occidental. Nous savons déjà que cette opération est venue de Kyiv, de Zelensky lui-même et du chef des forces spéciales militaires ukrainiennes. Zelensky est responsable de la mort de ma fille et de l'attentat. Bien que les services secrets américains et britanniques aient refusé d'expliquer et de condamner l'attaque terroriste, nous sommes presque certains qu'ils me ciblaient, moi et ma fille, car nous ne faisons qu'un.
C'était le début d'une guerre de terreur contre la Russie, la première fois que des terroristes occidentaux attaquaient des citoyens russes sur le sol russe. Je tiens à souligner une fois de plus que Dugina et moi n'avons occupé aucun poste officiel et n'avons pas participé à l'opération militaire spéciale (SMO) dans l'est de l'Ukraine. C'est sans précédent que des intellectuels aient été assassinés pour ce qu'ils disaient et pensaient, et ce genre de terreur contre les intellectuels est assez troublant. Et ce n'est rien d'autre que la guerre.
Cela révèle un tout nouveau chapitre dans l'histoire de la guerre : lorsque les idées comptent vraiment, vous êtes assassiné pour vos idées. Cet exemple démontre tragiquement l'importance de la pensée, étant un pari avec sa vie. Pourtant, si vous êtes un guerrier, vous devez être prêt à mourir au combat ; si vous prenez des décisions politiques, vous devez être prêt à payer pour vos décisions.
Pendant longtemps, la philosophie théologique s'est intéressée à la vie humaine. La Russie se trouve dans un état critique, je voudrais l'appeler « une révolution idéologique profonde en Russie », et le conflit russo-ukrainien marque le début d'un changement complet. Dans les années 1990, la Russie a accepté l'hégémonie occidentale, les systèmes occidentaux, les valeurs occidentales et la démocratie politique occidentale, a suivi l'exemple de l'Occident et a considéré l'Occident comme la seule bouée de sauvetage. C'est la différence entre la Russie et la Chine : la Chine accepte les règles et profite pleinement des règles internationales pour l'emporter, alors que nous, en Russie, dans les années 1990, avons trahi notre souveraineté nationale. Après l'arrivée au pouvoir de Poutine, il a commencé à se battre pour l'indépendance de la Russie. Mais au cours des 22 dernières années, il a été enchaîné par les règles établies par l'Occident.
Poutine a tenté de concilier la contradiction entre l'essor du pays et l'intégration dans la mondialisation, mais cela s'est avéré impossible. Cette inconciliabilité a culminé après le début du SMO. Poutine ne pouvait que réagir par une action violente directe, mais la société russe n'y était pas préparée, car combattre l'Occident est un chemin trop long et trop étroit. La Russie est maintenant en guerre contre l'Occident, contre les États-Unis. Nous essayons d'ajuster nos idées sociétales et de nous réévaluer, de nous adapter à la situation actuelle dans laquelle nous nous trouvons, qui est un processus très intense et dramatique.
Wang Wen : Je suis d'accord avec votre analyse et votre prédiction astucieuses. Je me souviens qu'en 2008, vous avez écrit sur l'inévitabilité du conflit entre la Russie et l'Occident. Cependant, lorsque les universitaires chinois reconnaissent qu'un conflit sino-américain peut devenir inévitable, ils font généralement de leur mieux pour proposer d'éviter la guerre avec les États-Unis. Par exemple, lorsque le professeur Graham Tillett Allison de l'Université de Harvard a proposé le « piège de Thucydide » entre la Chine et les États-Unis, les universitaires chinois le réfutaient et essayaient de changer cette « prophétie réalisable ».
Ce que je veux savoir, c'est pourquoi les élites russes ne conseillent-elles pas au président Poutine de faire de son mieux pour éviter un conflit, ou de faire quelque chose qui pourrait être mieux qu'une action militaire ad hoc ? En Russie, un sage philosophe politique comme vous doit avoir une meilleure solution, non ?
Dugin : Cela a à voir avec l'équilibre de conscience entre les individus et les groupes. Ce n'est pas le président Poutine qui a volontairement voulu lancer cette opération militaire spéciale, mais toute la société a exigé cette opération spéciale. La société russe est très particulière et a besoin d'un dirigeant de type "père" (comme un tsar) qui doit également fournir des garanties de sécurité à l'ensemble de la société. Poutine a essayé de concilier ce lien. Accepter l'Occident et assurer l'indépendance de la Russie sont un ensemble de contradictions. Poutine espère concilier cette contradiction et maintenir un certain équilibre, mais cet équilibre est très fragile.
Poutine a toujours essayé de procéder de manière pacifique, sans recourir à des moyens militaires, pour éviter une escalade du conflit avec l'Occident. Depuis que la Crimée est « revenue à la Russie », nous avons remarqué très tôt que la Russie peut facilement libérer l'est de l'Ukraine, mais le président Poutine a toujours refusé de le faire. Il a cru un temps aux assurances données par l'Occident, mais l'Occident a trompé la Russie. Poutine veut éviter la guerre, mais la guerre est de plus en plus inévitable. Il est dommage que nous n'ayons pas été parfaitement préparés à cette opération militaire spéciale sur le plan politique, économique, culturel et militaire. En fait, nous aurions dû être mieux préparés.
Wang Wen : Oui. Mais je suis très inquiet, si la Russie se découple complètement de l'Occident à l'avenir, la Russie pourra-t-elle continuer à se développer rapidement à court terme ? Nous croyons tous que l'Occident s'affaiblit, mais pour l'instant, l'hégémonie occidentale a encore une influence significative dans des domaines tels que la haute technologie et le commerce économique.
Le maintien de la coopération avec l'Occident apparaît comme un « choix rationnel et pragmatique ». La Russie sera-t-elle réduite à n'être plus qu'un « grand Iran », si elle est complètement coupée de l'Occident ? J'ai voyagé plusieurs fois en Iran. L'Iran présente un énorme potentiel et de riches ressources. Dans les années 1970, l'économie iranienne a connu une croissance rapide. Cependant, après avoir été sanctionné par l'Occident pendant 40 ans, le développement de l'Iran a été fortement affecté. La Russie va-t-elle répéter les erreurs de l'Iran ?
Dougin: J'aimerais connaître la définition de "occidental". L'Occident n'est pas seulement synonyme de développement économique et technologique, l'Occident représente une sorte de conscience, incluant l'hégémonie, le racisme et l'ontologie, qui peut être étendue au colonialisme et à l'unipolarité. C'est l'essence de l'Occident. La Russie a "déclaré la guerre" à l'Occident et a été contrainte de rompre sa coopération avec l'Occident. Nous espérons qu'en vainquant l'hégémonie occidentale, "l'Occident" deviendra une province du monde, et non le centre du monde. Pour y parvenir, nous devons non seulement nous élever et nous « désoccidentaliser », mais aussi marginaliser l'Occident. La Russie seule ne peut pas atteindre cet objectif. Nous espérons travailler avec d'autres pays non occidentaux dans le monde pour résister à l'hégémonie occidentale. Si nous nous unissons, nous pourrons peut-être les vaincre.
Wang Wen : Selon votre logique, le monde se divise progressivement en deux pôles, et une nouvelle « guerre froide » commence. Vous avez souligné dans votre article que le monde est au bord d'une troisième guerre mondiale.
La Chine ne veut pas entrer dans une nouvelle guerre froide ; La Chine préfère se développer dans un environnement mondialisé. Bien que la Chine soit en concurrence avec les États-Unis, elle s'efforce toujours de trouver un nouvel équilibre parmi les contradictions féroces. Je crois que l'Inde, le Brésil et d'autres pays BRICS ne veulent peut-être pas vraiment déclencher une "nouvelle guerre froide" avec l'Occident, et ils sont tous prudents et se prémunissent contre une éventuelle "troisième guerre mondiale".
Dugin : Maintenant, la situation n'est pas déterminée unilatéralement par la Russie. Au SMO, nous avons « franchi le Rubicon » pour affronter l'Occident. La Russie et l'Occident peuvent se comprendre, mais les deux ne peuvent pas coexister, comme le détermine la structure géopolitique. D'un point de vue géopolitique, les autres pays n'ont que deux options : soit être contrôlés par un État puissance maritime, soit lutter pour devenir un État puissance terrestre, c'est-à-dire en soutenant la Russie pour pousser le monde vers la multipolarisation et devenir une région d'un certain cœur.
L'indépendance de la Chine repose sur l'équilibre. De ce point de vue, si la Russie ne peut pas contrôler et équilibrer l'hégémonie américaine, alors la Chine sera victime d'un conflit militaire offensif avec les puissances maritimes, même si vous ne voulez que souveraineté et prospérité. Aujourd'hui, l'Inde, le Brésil, l'Afrique du Sud et le monde islamique, tout aussi indépendants, font tous des choix, mais le résultat de leur choix dépend de la force à l'autre bout de l'échelle.
Si la stratégie gagnant-gagnant de la mondialisation représentée par la Chine doit être parfaitement réalisée, il doit y avoir une condition invisible, c'est-à-dire la résistance de la Russie, puissance terrestre, à la puissance maritime. Si la Russie perd l'opération militaire spéciale et perd son cœur, alors l'Inde et la Chine seront confrontées à la même situation que la Russie est actuellement et deviendront les prochaines victimes directes de la guerre froide et même du conflit militaire.
L'Occident peut utiliser le détroit de Taiwan et les militants musulmans comme points d'entrée pour attaquer la Chine. L'Occident est une force radicale agressive. D'autres pays peuvent éviter un conflit frontal uniquement parce que la Russie existe toujours et parce que la Russie se bat. Les autres nations n'ont que deux options : soit survivre dans l'ombre du monde occidental, soit se battre comme la Russie. Cette analyse géopolitique est très importante.
Bien que les résultats de l'analyse ne soient pas entièrement conformes à l'interprétation officielle chinoise, je pense que les stratèges du Parti communiste chinois, en tant que véritables maîtres de la stratégie internationale, peuvent pleinement comprendre les conclusions de l'analyse ci-dessus et éviter que la Chine ne tombe dans la situation de la Russie. .
Je reconnais intensément les grandes réalisations de la Chine. Que ce soit pour la Russie, ou pour l'Inde, l'Iran et les pays arabes, la Chine est le principal espoir. Il y a un différend frontalier entre la Chine et l'Inde, mais je voudrais rappeler à l'Inde que si l'Inde et l'Occident se battent contre la Chine ensemble, alors une fois que la Chine et la Russie perdront, l'Occident se retournera pour affronter l'Inde et détruire l'Inde - en fait, Soros se prépare déjà à le faire.
Bref, nous ne voulons pas affronter l'Occident, nous affrontons "l'Occident" qui prétend gouverner le monde mais qui n'a pas joué un bon modèle. Ce que nous devrions rechercher devrait être la multipolarité plutôt que l'unipolarité. L'Occident veut démembrer la Russie, nous sommes numéro un sur leur liste, vous êtes les suivants. Bien sûr, c'est mon analyse, et je ne veux pas l'imposer aux autres.
Wang Wen : Tout d'abord, nous avons confiance en la Russie. La Russie ne sera pas vaincue par l'Occident. Bien que l'OTAN soutienne pleinement l'Ukraine, la Russie dispose d'un énorme avantage en termes de profondeur stratégique et de potentiel de ressources.
Bien sûr, je suis également d'accord avec vous que si la Russie est vaincue par l'Occident, la Chine sera la prochaine cible de l'Occident. À cet égard, la Chine est préparée psychologiquement. La réponse de la Chine est basée sur plus de 2 000 ans de sagesse traditionnelle et sur un engagement à trouver des solutions modérées et diverses. Au cours des dernières années, la Chine a obtenu de bons résultats sur de nombreux "champs de bataille" tels que les guerres commerciales, les guerres technologiques, les guerres d'opinion publique, les guerres médiatiques et la question du détroit de Taiwan.
Ce dont je veux discuter avec vous, c'est comment traiter avec l'Occident d'une manière plus intelligente. Si la troisième guerre mondiale ou une guerre nucléaire d'une certaine ampleur se produisait vraiment comme vous le prédisez, cela signifierait la destruction de toute l'humanité. À votre avis, est-il possible d'employer une boîte à outils diversifiée de mesures pour résoudre le problème ?
Dugin : La solution du fait accompli est le SMO. Nous n'avons pas utilisé d'autres approches plus diversifiées et nous ne pouvions pas faire autrement. L'opération militaire spéciale actuelle est très nécessaire, et bien que la situation de guerre actuelle soit mauvaise, elle vaut mieux qu'une situation pire (comme être détruite).
Je suis sûr que le Parti communiste chinois a adopté un bon modèle de prise de décision, en prenant des décisions avec prudence et prudence, en intégrant les intérêts nationaux à la mondialisation et en maintenant une politique indépendante et conservatrice. Tout en garantissant la démocratie et la libéralisation sociale et économique, la Chine maintient également le contrôle absolu du gouvernement central sur le pays, garantissant que l'Occident ne peut pas détruire le Parti communiste chinois au moyen de méthodes culturelles et d'Internet, et sauver le pays du chaos et même de la destruction.
La situation en Russie est tout le contraire. L'Occident détruit le contrôle absolu du gouvernement russe, essayant de pousser le gouvernement contre le peuple. Sous Eltsine, le peuple a été victime de cet assaut occidental.
Poutine essaie de prévenir et d'inverser cette situation et de permettre à la Russie de se sauver par la réforme et la reconstruction. À un moment donné, il a tenté de changer pacifiquement l'héritage du gouvernement Eltsine (1931 - 2007), mais il a échoué en raison de l'obstruction de certaines élites politiques. Ces élites politiques sont des traîtres au pays. C'est la différence entre la Chine et la Russie. L'élite politique chinoise est l'épine dorsale du pays, mais nous n'avons que le poison de l'ère soviétique. Après l'effondrement de l'Union soviétique, ces élites politiques sont entrées dans le gouvernement russe et n'ont pas permis au pays de transformer et de développer la Russie par des moyens pacifiques. C'est exactement mon interprétation des différences politiques entre la Chine et la Russie.
Nous n'avons pas la possibilité de changer ou de réorganiser pacifiquement la Russie, et de parvenir à la réconciliation avec l'Ukraine et l'Occident par des moyens pacifiques. Poutine est notre espoir. Il est du côté du peuple et du côté de l'histoire. Le SMO était sa façon de résister, mais pas de la meilleure façon. Nous plaçons désormais tous nos espoirs sur le pétrole et le gaz et attendons que l'Occident s'effondre ou fasse des compromis sur les questions énergétiques. Ils essaient de sortir de la crise de la pénurie d'énergie, ce qui nous oblige également à résoudre le problème à partir d'autres dimensions. A cet effet, il convient de prendre la Chine comme exemple à étudier.
Wang Wen : Merci de votre intérêt pour la Chine. En tant que chercheurs d'un groupe de réflexion, nous réfléchissons également chaque jour à la situation de la Chine et travaillons à résoudre les problèmes intérieurs. À mon avis, les dilemmes internationaux ne peuvent être mieux traités que sur la base de la résolution des problèmes nationaux. Je crois que vous avez également remarqué que le rapport du 20e Congrès national du Parti communiste chinois présente clairement la stratégie de développement national à long terme de la Chine pour 2035 et 2050. Vous êtes déjà allé en Chine. En tant que philosophe politique, d'après votre compréhension de la Chine, comment voyez-vous l'avenir de la Chine ? Les objectifs actuels de la Chine peuvent-ils être atteints comme prévu ?
Dugin : Tout d'abord, j'aime beaucoup la Chine et j'apprécie la gouvernance de la Chine par le Parti communiste chinois sous la direction du secrétaire général Xi Jinping. Le président Xi est un dirigeant exceptionnel de classe mondiale. Votre pays est entré dans l'histoire. Je pense que les objectifs de la Chine sont pragmatiques. Le 20e Congrès national du Parti communiste chinois que vous avez organisé est un exemple réussi de coordination des questions nationales et internationales. L'Assemblée générale dirige le pays en élaborant des plans. En fait, ni la société occidentale ni la Russie ne comprennent assez bien la structure politique et sociale de la Chine.
À mon avis, la Chine est composée du peuple, du gouvernement et d'autres éléments culturels tels que le socialisme à la chinoise, la culture confucéenne, etc. Ces éléments culturels jouent un rôle dans la gouvernance gouvernementale. Si le gouvernement ne parvient pas à assurer la sécurité culturelle, la société se désintégrera. Les analyses occidentales et russes de la Chine ignorent presque la partie spéciale de la culture, qui est en fait une ressource importante pour le peuple chinois.
Deuxièmement, la Chine est très exigeante quant à la hiérarchisation des choses. La Chine n'intensifiera pas les conflits, mais modérera et résoudra les conflits grâce à l'expérience de la construction de la civilisation. Cette culture n'est pas entièrement issue du confucianisme, mais aussi du taoïsme. La culture politique occidentale, y compris la Russie, est trop radicale, trop obsédée par le noir et blanc absolu, le bien et le mal. Pour nous, le mal est le mal, et nous ne céderons jamais au mal.
Wang Wen : Oui, la théorie du Yin et du Yang dans la culture chinoise provient d'une autre école de philosophie. Nous espérons pouvoir transformer entre le négatif et le positif, le bien et le mal, le bien et le mal. Aux yeux des Chinois, les bonnes choses ne sont pas entièrement bonnes et les mauvaises choses ne sont pas entièrement mauvaises. Il y a une relation d'attachement et de transformation entre les deux. C'est compliqué.
Dugin : Oui, la Chine ne promeut pas une politique étrangère de conflit culturel. Dans une autre culture différente de la Chine, il existe des frontières claires entre le bien et le mal, le bien et le mal, la lumière et l'obscurité, et la culture russe contient ce gène. Du point de vue de la Russie, le monde est soit unipolaire (il y a un pays avec la puissance mondiale la plus forte, comme les États-Unis), soit multipolaire (l'Occident, la Russie et la Chine essaient tous de parvenir à une situation gagnant-gagnant dans ce monde). Une structure mondiale multipolaire est également quelque chose que la Chine doit rechercher. La Chine observe le monde avec sa propre perspective et ses propres pensées, et d'autres pays observent également la Chine avec leur propre pensée et vision du monde. Cela va dans les deux sens.
Certaines de ces pensées et perspectives sont anormales ou même pathologiques. La pensée et la vision du monde chinoises sont saines, mais la pensée et la vision du monde occidentales ne sont pas si saines. Nous devrions essayer de comprendre ces façons pathologiques de penser, et non de les expliquer avec notre pensée intrinsèque.
Wang Wen : Discutons de l'avenir de la Russie et de la Chine. Les tensions dans les relations de la Russie avec l'Occident devraient continuer à pousser les relations sino-russes à se réchauffer. Cette fois, j'ai visité plus de 20 villes de Russie, parlé avec de nombreux responsables locaux et discuté de la manière de renforcer les relations entre les deux pays à différents niveaux, tels que le niveau local, le niveau civil, le niveau d'élite, etc. La Chine et la Russie ont des relations différentes. perceptions les uns des autres à tous les niveaux. Du point de vue de haut niveau, la conscience stratégique de la confiance et de la coopération entre la Chine et la Russie est suffisante et ferme ; cependant, aux niveaux non gouvernemental et des élites, les gens ont des opinions très diverses sur la coopération sino-russe, et certaines idées ne sont pas propices à la coopération bilatérale. Que penses-tu de cela?
Dugin : Tout d'abord, je pense que les relations sino-russes se sont en fait considérablement améliorées aux deux niveaux. Nos deux pays ont certainement de nombreux problèmes à surmonter, comme les différences culturelles entre les deux parties. Nous devrions consacrer plus de temps à comprendre les attributs respectifs de la Chine et de la Russie, à comprendre le code de la civilisation de l'autre, à ouvrir davantage de « dialogue à deux voies » et à approfondir la coopération bilatérale.
La compréhension mutuelle entre les dirigeants des deux pays a été "parfaite", et la coopération entre le président Xi et le président Poutine est la pierre angulaire de la Chine et de la Russie, créant l'avenir des relations bilatérales. Mais nous devons également accorder plus d'attention à l'institutionnalisation des relations entre les deux pays, proposer des plans pour renforcer la coopération et la compréhension mutuelle aux niveaux supérieur, intermédiaire et local, et réajuster le système de coopération aux niveaux intermédiaire et local.
À mon avis, l'avenir de l'humanité dépend de la coopération approfondie entre la Chine et la Russie. Plus que jamais, nous avons besoin de nous connaître efficacement. Nous sommes déjà deux pôles dans un monde multipolaire. Les peuples des deux pays doivent continuer à se battre pour le développement de la Russie et de la Chine, afin que les relations entre les deux pays soient plus harmonieuses.
Wang Wen : Une plate-forme importante pour la coopération sino-russe est la connexion entre l'initiative "la Ceinture et la Route" et l'Union économique européenne. Aux yeux de beaucoup, la théorie du Grand Eurasianisme que vous défendez depuis de nombreuses années a contribué à promouvoir la coopération sino-russe, en particulier l'intégration économique eurasienne. Mais les choses semblent changer. Ces dernières années, avez-vous acquis de nouvelles connaissances dans l'étude de l'intégration eurasienne ? Que pensez-vous de l'intégration eurasienne et de l'initiative "la Ceinture et la Route" ?
Dugin : Le contenu de la théorie du Grand Eurasianisme couvre le contenu de l'Union économique eurasienne et de l'initiative "la Ceinture et la Route". La Chine et la Russie ont la capacité d'intégrer harmonieusement deux initiatives majeures pour favoriser le développement de l'Eurasie et ainsi mener à bien la construction du monde. À l'avenir, l'Eurasie devrait inclure l'Europe, l'Inde et bien d'autres pays. Nous devrions élargir nos horizons pour inclure tous les pays de tout le continent eurasien. En termes de mise en œuvre spécifique, nous devrions avoir une compréhension plus profonde de la signification de "la Ceinture et la Route" et des différents rôles que l'"Union économique eurasienne" de la Russie devrait jouer et adapter et accepter ces rôles.
Nous devrions présenter la véritable théorie de l'intégration eurasienne aux élites chinoises, et non la version mal interprétée. En Russie, certains voient l'eurasianisme comme du néo-colonialisme, tandis qu'en Chine, d'autres le voient comme la version russe de l'impérialisme. Nous devrions trouver différentes façons de nous comprendre. La théorie de la Grande Eurasie comprend non seulement la coopération économique entre la Russie et la Chine, mais aussi la coopération approfondie entre l'Inde, l'Asie du Sud-Est et l'Asie de l'Ouest. Nous devons réfléchir et généraliser ce concept, renforcer les échanges culturels, comprendre son identité, son objectif et sa motivation.
Afin d'atteindre les objectifs ci-dessus, nous devons avoir une compréhension plus profonde de la culture de l'autre et vraiment comprendre la cohérence interne du pragmatisme, du matérialisme, du réalisme et d'autres logiques, ce qui nous oblige à avoir un dialogue au niveau de la linguistique interlingue. Sinon, il nous est difficile d'avoir des opinions similaires sur une chose.
Wang Wen : Dans la stratégie étrangère de la Russie ces dernières années, on peut voir l'ombre de la théorie du « Grand Eurasianisme ». Par conséquent, il y a eu des rumeurs ces dernières années selon lesquelles vous feriez partie du personnel du président Poutine, ou même du "cerveau de Poutine" ; certaines personnes disent que vous étiez le pont entre le président Poutine et le président Trump à cette époque. Comment répondez-vous à cela ?
Dugin : Je suis très favorable à Poutine, notre esprit est similaire, mais je n'ai pas d'autre relation avec lui.
Je devrais connaître le peuple russe et l'histoire russe mieux que quiconque ici. C'est peut-être un peu humiliant de dire cela, mais j'ai un profond amour pour le peuple russe et l'histoire russe. Je comprends la logique derrière cela mieux que quiconque, ainsi que la stratégie étrangère nationale actuelle que les gens peuvent accepter et soutenir.
Wang Wen : Avez-vous des conseils à donner aux jeunes, en particulier à leurs homologues chinois ?
Dugin : Pour comprendre le monde, il faut d'abord devenir un chinois plus authentique. Si vous ne vous comprenez pas, vous ne pouvez pas comprendre les autres. Si vous n'êtes pas confiant et n'avez pas votre propre identité, il est impossible de comprendre l'identité des autres pays et l'avenir de la multipolarité. Pour comprendre le monde, vous devez d'abord vous comprendre.
(Zhang Huimin张慧敏 de l'Université de Moscou et Feng Shide冯士德 de l'Académie russe des sciences ont participé au dialogue et ont fait un examen préliminaire du contenu du dialogue)
Editeur responsable : Liu Xiaoyun 刘啸云
Traducteur anglais : Liviu Florea