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samedi 5 juillet 2025

Une guerre des deux poids, deux mesures

 Source : https://www.dedefensa.org/article/une-guerre-des-deux-poids-deux-mesures

De nombreux journalistes tentent de couvrir en direct la guerre entre Israël et l’Iran. Les commentateurs ne manquent pas non plus pour donner leur avis sur l’attaque israélienne contre l’Iran et sur la réponse de ce dernier, certains allant même jusqu’à prédire l’issue du conflit. Pour ma part, je préfère prendre du recul et laisser les événements se dérouler. En attendant, voici quelques similitudes et différences à prendre en considération, au cas où vous décideriez de choisir votre camp dans ce conflit en vous basant sur des données concrètes plutôt que sur la propagande ou vos caprices.

L’Iran et Israël sont les deux dernières théocraties de la planète. L’Iran est une république islamique présidée par un ayatollah et, à ce titre, est un retour à une époque révolue depuis plusieurs siècles. Israël est un État ethno-religieux qui se définit comme un « État juif », la judéité étant à la fois une ethnicité et une religion. En tant que tel, il s’agit d’un retour à une époque remontant à plusieurs millénaires, où les dieux tribaux, comme le dieu juif Jéhovah, faisaient fureur.

Cela fait de la guerre israélo-iranienne une sorte de combat de dinosaures : deux reliques anachroniques s’affrontant, non pas avec des crocs et des griffes (ou des lances et des épées), mais avec des drones et des roquettes high-tech (nous sommes après tout au XXIe siècle). La grande majorité de la population mondiale, qui croit en la laïcité, la liberté de religion (même pour les juifs) et la séparation de l’Église et de l’État, devrait être pardonnée si elle décide de rester en retrait et de laisser ces deux fossiles politiques s’entre-détruire.

Mais là s’arrêtent les similitudes. Les différences, en revanche, sont assez frappantes. L’Iran ne possède pas d’armes nucléaires. Il est signataire du TNP (Traité de non-prolifération). Il autorise l’AIEA à inspecter ses installations nucléaires. Il rend compte des mouvements d’uranium enrichi. Et pour tout cela, il est soumis à une pression internationale constante, à des sanctions et déclaré comme une menace uniquement en raison de sa capacité purement théorique à fabriquer des armes nucléaires. Pendant ce temps, les ingénieurs nucléaires iraniens travaillent sous le poids d’une « fatwa »(déclaration religieuse ayant force de loi) qui rend les armes nucléaires « haram », c’est-à-dire interdites.

Passons maintenant à Israël : ce pays possède un arsenal nucléaire estimé entre 80 et 200 ogives. Celles-ci ont plusieurs décennies et pourraient ne plus être efficaces en raison des effets de la désintégration radioactive. Israël n’a pas signé le TNP, n’autorise pas les inspecteurs internationaux et garde son programme nucléaire totalement secret. Mais au lieu de subir une pression internationale constante et des sanctions, il bénéficie du soutien et de l’aide militaire de l’Occident. De plus, les dirigeants occidentaux le qualifient avec ironie de « bastion de la démocratie » et prétendent qu’il est la victime.

Ne soyons pas ridicules et ne nous mettons pas dans tous nos états à la moindre mention des « armes nucléaires ». Ces armes sont extrêmement utiles pour maintenir la paix, à condition qu’elles restent sous un contrôle strict et (c’est là la condition essentielle) qu’elles ne soient jamais, au grand jamais, utilisées. Posséder des armes nucléaires est une chose, et tout à fait acceptable dans des conditions raisonnables ; utiliser des armes nucléaires est strictement interdit et vous rend automatiquement coupable de crime de guerre et passible de destruction, au moyen d’armes nucléaires si nécessaire. Les États-Unis ont commis une grave erreur en larguant des bombes nucléaires sur Hiroshima et Nagasaki, ce qui a valu à Harry Truman une place au premier rang dans un tout nouveau cercle de l’enfer (si tout se passe bien, il y restera seul pour l’éternité).

En matière de maintien de la paix, les armes nucléaires sont les plus efficaces. Il suffit de se procurer quelques bombes atomiques pour que tout le monde ait peur de vous toucher. La pire position dans laquelle on puisse se trouver est d’avoir un programme nucléaire et de se laisser convaincre de ne pas développer d’arme atomique. Mouammar Kadhafi a choisi d’abandonner son programme nucléaire et a fini par être tué et sa Libye détruite. Kim Jong-il n’a pas commis cette erreur, il a développé et testé quelques bombes nucléaires, son fils Kim Jong-un a construit des fusées capables de les envoyer en Californie, et maintenant il peut se permettre de renvoyer les lettres d’amour parfumées à la rose de Donald Trump sans les ouvrir et sans subir aucune conséquence.

L’Iran a fait la chose la plus stupide qui soit, à savoir avoir un programme nucléaire avec des centrifugeuses d’enrichissement d’uranium qui ont failli atteindre des concentrations d’U235 suffisamment élevées pour fabriquer une bombe, mais en se montrant timide et en refusant de se retirer du Traité de non-prolifération nucléaire et de fabriquer quelques bombes atomiques. La raison en est la « fatwa » mentionnée plus haut. Cela peut sembler très moral aux fidèles d’un ayatollah, mais cela semble très suspect du point de vue de toute personne réellement impliquée dans la politique nucléaire. C’est un comportement doublement suspect dans un pays dont les dirigeants continuent de répéter le mantra « Mort à Israël », Israël qui, soit dit en passant, possède bel et bien des armes nucléaires.

Le 19 Juin 2025, Club Orlov, – traduction du ‘Sakerfrancophone


Note du Saker Francophone

Depuis quelques temps, des gens indélicats retraduisent “mal” en anglais nos propres traductions sans l’autorisation de l’auteur qui vit de ses publications. Dmitry Orlov nous faisait l’amitié depuis toutes ses années de nous laisser publier les traductions françaises de ses articles, même ceux payant pour les anglophones. Dans ces nouvelles conditions, en accord avec l’auteur, on vous propose la 1ere partie de l’article ici. Vous pouvez lire la suite en français derrière ce lien en vous abonnant au site Boosty de Dmitry Orlov.

vendredi 21 février 2025

VERTIGES... Le tsunami de la dette fédérale US menace

Source :  https://www.dedefensa.org/article/le-tsunami-de-la-dette-federale-us-menace

La nouvelle administration Trump agit aussi rapidement que possible pour réduire les dépenses publiques et augmenter les recettes publiques :

• De nombreux nouveaux droits de douane sont introduits pour réduire le déficit commercial tout en augmentant les recettes publiques.

• Des efforts sont déployés pour que les membres de l’OTAN paient plus cher les armes fabriquées aux États-Unis.

• Les ministères fédéraux sont soumis à des audits (l’USAID a déjà été démantelée ; d’autres ministères font la queue devant l’abattoir) à la recherche de corruption, de blanchiment d’argent et de gaspillage.

• Des milliers d’employés fédéraux ont reçu une généreuse prime pour démissionner volontairement, tandis que plusieurs autres ont déjà été licenciés.

• Les États-Unis ne soutiendront plus l’ancienne Ukraine, n’introduiront pas de troupes sur l’ancien territoire ukrainien, ne respecteront pas leurs engagements de défense mutuelle en vertu du chapitre 5 de la charte de l’OTAN et feront de leur mieux pour mettre fin à leur guerre par procuration contre la Russie. On parle encore de « contenir la Chine », mais cela ne devrait pas aller bien au-delà de quelques nouveaux droits de douane que la Chine peut ignorer (les échanges commerciaux avec les États-Unis ne représentent désormais que 5 % du total des échanges de la Chine).

Comme pour la plupart des choses américaines, la raison de ces mesures désespérées est d’ordre financier : le gouvernement fédéral américain est à court d’argent. Le problème n’est pas tant la dette à long terme que la dette à court terme, qui doit être refinancée immédiatement, ainsi que la tendance générale à la stagnation des recettes et à l’explosion du déficit budgétaire. Depuis le début de l’exercice (d’octobre à janvier), les recettes se sont élevées à 1 596 milliards de dollars, soit un montant nominalement supérieur aux 1 584 milliards de l’année dernière, mais qui, corrigé de l’inflation, représente en réalité une baisse.

Pendant ce temps, les dépenses augmentent à pas de géant, s’élevant à 2 435 milliards de dollars depuis le début de l’exercice contre 2 116 milliards de dollars il y a un an. Au cours des 12 derniers mois, les recettes se sont élevées à 4 929 milliards de dollars tandis que les dépenses ont atteint 7 064 milliards de dollars, soit un déficit budgétaire de 43 %. Le moment où le gouvernement américain dépensera deux fois plus qu’il ne gagne et empruntera le reste est proche ! Pendant ce temps, au cours des 12 derniers mois, il a dépensé 23,6 % du total en paiements d’intérêts. Le moment où un quart de toutes les dépenses sera consacré aux paiements d’intérêts sera bientôt atteint !

L’augmentation incessante de la dette fédérale américaine, qui a dépassé les 36 220 milliards de dollars, peut être comparée de manière allégorique à l’élévation du niveau de la mer le long de la côte est des États-Unis, causée, selon certains, par un ralentissement du Gulf Stream : les côtes sont inondées, les ondes de tempête deviennent plus violentes et, par endroits, l’érosion des plages sape les fondations des majestueuses demeures qui parsèment la côte. À ce rythme, le niveau de la mer peut continuer à monter pendant une ou deux générations, causant des milliards de dollars de dommages aux propriétés de personnes qui avaient fait des folies pour s’offrir une maison de vacances avec vue sur la mer. C’est, métaphoriquement, l’effet de la dette à long terme.

La dette à court terme est assez différente et une métaphore plus appropriée est celle du tsunami. Considérons : la part à court terme de la dette fédérale américaine a augmenté pour atteindre plus de 9 470 milliards de dollars, tandis que les paiements d’intérêts sur la dette fédérale ont atteint 1 160 milliards de dollars par an et ont dépassé le montant dépensé pour la défense nationale. Autrement dit, le montant de la dette à refinancer (en émettant de nouveaux titres de créance) au cours des 12 prochains mois s’élève à 9 476 milliards de dollars, ce qui équivaut aux recettes fédérales totales des États-Unis sur 23,1 mois. Ce tsunami de la dette ne cesse de croître : en 2019, le montant à refinancer n’était que de 4 297 milliards de dollars, soit deux fois moins.

Pendant ce temps, le plafond de la dette fédérale a de nouveau été dépassé, et il est prévu de le relever de 4 000 milliards de dollars, ce qui obligera le Trésor américain à continuer d’effectuer des paiements. C’est la fonction par excellence du gouvernement fédéral américain : s’il cesse d’effectuer les paiements dont dépend la moitié des ménages américains, les États-Unis cesseront effectivement d’exister en tant qu’État unifié et se désintégreront à mesure que chaque État cessera d’envoyer de l’argent à Washington et tentera de prendre soin des siens.

Que fait-on pour éviter ce scénario ? Le plan actuel consiste à raboter les dépenses de 1 500 milliards de dollars puis à les réduire… tenez-vous bien… de 2 000 milliards de dollars sur une période de 10 ans ! Personne de sensé ne penserait que cela suffirait.

Mais il y a aussi le problème à court terme : emprunter 4 000 milliards de dollars supplémentaires au cours de l’année prochaine tout en renouvelant près de 10 000 milliards de dollars de dette à court terme. Les paiements d’intérêts dépasseront le quart de toutes les dépenses fédérales. Les nouveaux droits de douane de Trump pourraient ajouter un petit quelque chose aux recettes fédérales, mais ils feront également grimper l’inflation du dollar. En retour, les taux d’intérêt devront augmenter pour compenser.

Que se passe-t-il lorsqu’un tsunami atteint le rivage ? Généralement, la panique s’ensuit. Certaines personnes courent vers les hauteurs tandis que d’autres se noient ou sont emportées par la mer sur des débris. Un tsunami de la dette est différent car la substance en question est différente : l’eau est physique tandis que l’argent est une construction mentale qui n’a aucune réalité physique. Une autre différence est que le niveau de panique sur le rivage n’a aucun effet sur le niveau d’un tsunami qui le frappe, alors qu’une panique financière est l’ingrédient clé qui fait d’un tsunami de la dette plus qu’une simple métaphore.

Mais le fait est que ni les efforts extraordinaires de Musk pour réduire le gaspillage et la fraude, ni ceux de Trump pour réduire les déficits commerciaux et augmenter les revenus en imposant des droits de douane, et certainement pas le plan visant à réduire les dépenses de 1 500 milliards de dollars tout en autorisant de nouveaux emprunts de 4 000 milliards de dollars, actuellement en cours d’examen par les différents comités de la Chambre des représentants des États-Unis, ne sont susceptibles d’avoir un impact significatif sur le résultat final lorsque la panique financière finira par arriver.

(Remerciements : Alex)

Le 13 Février 2025, Club Orlov – Traduction de ‘Sakerfrancophone’

lundi 22 août 2022

22 août 2022 Des terroristes ukrainiens assassinent la fille du philosophe russe Alexander Dugin

Source : https://boosty.to/cluborlov/posts/a66c9edd-ba73-4796-8276-ae84c114d9bd?from=email&from_type=new_post

 Le samedi 20 août 2022, dans le quartier Odintsov de Bolshaya Vyaz'ma, près de Moscou, une bombe placée sous le siège du conducteur a coûté la vie à la journaliste Darya Dugina, 29 ans, fille du philosophe et politologue russe Alexander Dugin. La bombe a été placée par la citoyenne ukrainienne Natalya Vovk, née en 1979, qui était arrivée en Russie le 23 juillet avec sa fille Sofia Shaban. Elles avaient loué un appartement dans l'immeuble où vivait Douguine et l'avaient suivie dans une Mini Cooper portant trois plaques d'immatriculation différentes :

de Donetsk, du Kazakhstan et d'Ukraine. Le jour de l'attaque terroriste, Alexandre Douguine et sa fille étaient présents au festival "Tradition". Après avoir déclenché l'engin explosif, les deux femmes ont fui vers l'Estonie en passant par Pskov. Alexander Dugin suivait Darya dans une autre voiture et a été témoin de l'explosion. Il se trouve actuellement dans un hôpital, où il est traité pour un traumatisme psychologique. Lui et sa fille étaient très proches et travaillaient ensemble sur divers projets.

Bien que les médias occidentaux se soient empressés de qualifier Douguine de "conseiller de Poutine" ou de "nationaliste russe" ou de toute autre épithète insensée, il ne s'agit là que de la bêtise habituelle des médias occidentaux. Douguine est un philosophe et, étant plutôt controversé, il n'est en aucun cas proche du Kremlin. Il a produit une œuvre très impressionnante et ce n'est peut-être pas une bonne idée de la résumer en quelques phrases, mais je vais essayer.

Les spécificités de l'État russe sont liées au vaste paysage eurasiatique et sont indépendantes de l'ethnologie, de la religion, de l'économie ou de l'idéologie. Elles nécessitent, pour leur préservation, un seul dirigeant fort dont le pouvoir repose sur l'approbation d'une vaste majorité conservatrice, autonome et patriotique. Lorsque la Russie a bénéficié d'un tel leadership, notamment sous le Prince Vladimir [~915-1015], Ivan IV le Terrible [1530-1584], Pierre Ier le Grand [1672-1725], Joseph Staline et maintenant Vladimir Poutine, son royaume s'est rapidement étendu. Même sous des dirigeants moins grands, il s'est développé de manière constante parce que son modèle de gouvernance, avec un centre autoritaire sauvegardant les intérêts de communautés éloignées, grandes et petites, sans distinction d'ethnie, de langue ou de religion, a progressivement gagné des adhérents parmi les populations voisines sur la base du principe de complémentarité ethnique évidente. Les deux contre-exemples d'incompétence massive sont Mikhaïl Gorbatchev et Boris Eltsine, qui ont amené la Russie au bord de l'effondrement économique et de la dissolution politique. Après la fin du moment unipolaire de l'Amérique, il y a une dizaine d'années, la Russie n'a cessé d'étendre son influence et a d'excellentes chances de rejoindre les autres grandes nations d'Eurasie pour former un centre de pouvoir eurasien qui se débarrassera du fardeau du contrôle extérieur et de l'exploitation par les nations occidentales. Dugin considère Moscou comme la troisième Rome et l'héritier de l'Empire romain d'Orient et de l'Empire mongol. C'est un patriote russe, mais le qualifier de nationaliste est un pur non-sens puisque la Russie n'est pas une nation mais une fédération de nombreuses nations.

Comme il semble habituel avec les Ukrainiens, l'acte odieux de l'assassinat de la fille de Douguine a été pour eux un acte puissamment autodestructeur. Avant cet événement, Douguine travaillait dans une relative obscurité et ses idées étaient connues dans des cercles plutôt étroits et considérées comme controversées. Mais aujourd'hui, son nom est partout et des dizaines de millions de personnes le recherchent et étudient son travail. Le martyre de sa fille l'a élevé, elle et lui, au rang de héros nationaux et leurs noms, ainsi que son œuvre, vivront à jamais.

Les Ukrainiens n'auraient guère pu faire plus pour faire avancer la cause de la souveraineté eurasienne et pour hâter la disparition de leur faux clan nationaliste monoethnique encore né, contrôlé par l'étranger. L'assassinat de la fille d'un philosophe est un acte d'humiliation nationale ukrainienne et ses dirigeants, qui ont ordonné le meurtre, se vautreront désormais dans l'ignominie et la honte perpétuelles.

Dmitry Orlov

Source : https://boosty.to/cluborlov/posts/a66c9edd-ba73-4796-8276-ae84c114d9bd?from=email&from_type=new_post

jeudi 3 mars 2022

La situation en Ukraine : Prédictions et réalité

 


Par Dmitry Orlov – Le 27 février 2022 – Source Club Orlov

OrlovJeudi dernier, j’ai reposté mon article « top dix des signes que la Russie a envahi l’Ukraine«  d’il y a 8 ans, lorsque le changement de régime et la guerre civile en Ukraine ont commencé et que l’Occident n’a cessé d’affirmer que la Russie avait envahi le pays. Eh bien, jeudi dernier, la Russie a effectivement envahi le pays.

La Russie avait le droit légal d’envahir l’Ukraine de plusieurs points de vue : pour défendre ses alliés à Donetsk et à Lougansk ; pour se défendre contre les armes de destruction massive ukrainiennes, que le président ukrainien a menacé de commencer à produire à la conférence de Munich sur la sécurité ; et pour empêcher l’OTAN de poursuivre son avancée vers les frontières russes, en violation de son engagement antérieur de « pas un pouce à l’est ». La Russie a exercé son droit de légitime défense en vertu de l’article 51 de la partie 7 de la Charte des Nations unies. L’Ukraine a renoncé à son droit à l’intégrité territoriale en vertu de la déclaration des Nations unies de 1970 en refusant d’honorer les droits de sa population russophone. Elle a également refusé de renouveler son traité d’amitié avec la Russie et n’avait donc plus de frontière définie avec la Russie que celle-ci était tenue de respecter.

D’un point de vue strictement juridique, affirmer que « la Russie a violé l’intégrité territoriale de l’Ukraine » ou qu’il s’agit d’un « acte d’agression russe » n’est que pure foutaise. D’un point de vue moral, le fait que l’ensemble de la communauté internationale soit restée les bras croisés et ait discuté inefficacement de politique pendant huit ans, alors que la population civile de Donetsk et de Lougansk était continuellement bombardée par l’« opération antiterroriste » ukrainienne, est tout à fait honteux.

Les personnes qui s’élèvent aujourd’hui contre l’action militaire de la Russie en Ukraine doivent répondre à une question simple : Où étiez-vous ces huit dernières années pendant que le carnage se déroulait à Donetsk et à Lougansk, que des gens étaient brûlés vifs à Odessa, que le gouvernement ukrainien organisait des opérations terroristes sur le territoire russe [pro-russe, NdT] et que l’ensemble de la population ukrainienne était contrainte de faire des courbettes aux Américains et de parler ukrainien, le plus souvent contre son gré ? Si votre réponse est « Je ne savais pas », vous avez perdu le droit d’avoir une opinion éclairée sur ce qui se passe là-bas aujourd’hui. Gardez cela à l’esprit et agissez en conséquence.

Je vais maintenant passer en revue les dix prédictions que j’ai faites il y a huit ans et voir si elles se sont avérées justes à la lumière des événements qui se sont déroulés ces trois derniers jours. On peut raisonnablement s’attendre à ce que je me sois complètement trompé ; sinon, il s’agira d’un petit miracle. Veuillez garder cela à l’esprit.

1. L’artillerie ukrainienne est silencieuse. Elle ne bombarde plus les quartiers résidentiels de Donetsk et de Lougansk. C’est parce qu’elle a été localisée avec une grande précision avant l’opération et que, avant jeudi après-midi, elle a été complètement anéantie par des attaques aériennes et des tirs de roquette au sol ; c’était le premier point du programme. Les habitants se réjouissent de voir leur terrible épreuve prendre fin.

Ce n’est pas tout à fait vrai. Donetsk et Lougansk continuent d’être bombardés sporadiquement, bien que la plupart des tirs aient été réprimés et que de plus en plus de territoires soient libérés des forces ukrainiennes par la milice du Donbass (avec les forces russes jouant un rôle de soutien). Dans le même temps, de nouvelles possibilités de carnage de civils résultent du fait que les bataillons nazis d’Ukraine, sous la direction de leurs mentors des États-Unis et de l’OTAN, cachent des armes lourdes dans les quartiers résidentiels et utilisent les civils comme boucliers humains.

2. L’activité militaire sur le terrain, à Donetsk et à Lougansk a complètement changé de nature. À la place des petits groupes de résistants, il y a maintenant des bataillons russes de 400 hommes et des dizaines de blindés suivis des convois de véhicules de soutien (camions citerne, communications, cuisines de campagne, hôpitaux de campagne, etc.) Le flux des véhicules entrant et sortant est incessant, et on peut facilement le voir sur les photos des systèmes de reconnaissance ou des satellites. À cela s’ajoute le flot continu des échanges radios en russe que tout le monde peut intercepter sans problème ; l’opération est devenue impossible à cacher.

C’est manifestement le cas. Aucune personne saine d’esprit n’affirmerait aujourd’hui qu’il n’y a pas de forces russes en Ukraine. Elles ont rendu leur présence aussi évidente que possible et la vue de colonnes interminables de véhicules militaires russes roulant sans entrave dans la campagne ukrainienne semble provoquer un changement radical dans la mentalité de la population ukrainienne. Tout au long de l’histoire, elle a toujours été prompte à changer d’allégeance au gré des circonstances et des lignes de bataille, et cette fois-ci ne fera probablement pas exception.

3. L’armée ukrainienne a vite disparu. Les soldats et les officiers ont enlevé leurs uniformes, abandonné leurs armes et font de leur mieux pour se fondre dans la population locale. Personne ne pense que l’armée ukrainienne a la moindre chance contre l’armée russe. La seule et unique fois où l’Ukraine a remporté une victoire militaire contre la Russie, c’était à la bataille de Konotop en 1659, mais à l’époque, l’Ukraine avait comme allié le puissant Khanat de Crimée et, vous l’avez peut-être remarqué, cette fois-ci la Crimée n’est pas dans le camp de l’Ukraine.

Là encore, ce n’est pas tout à fait vrai. Il s’avère qu’un nazi endurci est intégré à chaque détachement des forces ukrainiennes et que son travail consiste à tirer sur ceux qui tentent de se rendre. Néanmoins, un nombre inconnu de soldats ukrainiens se sont rendus, ont signé la promesse de ne plus combattre l’armée russe, ont reçu de la nourriture et ont été renvoyés chez eux. Au total, l’armée ukrainienne ne se révèle pas différente des autres forces organisées et entraînées par l’OTAN, que ce soit en Afghanistan, en Géorgie, en Irak ou ailleurs. Toutes se révèlent immédiatement complètement inutiles dès qu’une véritable force militaire arrive sur place, que ce soit les Russes, les Talibans ou le Califat islamique. Il convient également de noter que les grandes quantités d’armes récemment fournies à l’Ukraine par les États-Unis se sont révélées totalement inutiles. Les missiles antichars Javelin, qui ont contribué à remplir les poches de certains hauts responsables du Pentagone, se sont révélés encore plus inutiles : le temps qu’ils soient prêts à tirer, il n’y a généralement plus personne en vie pour le faire, et les soldats ne s’en servent même pas.

4. Il y a des checkpoints russes partout. On laisse passer les civils locaux mais tous ceux qui sont associés à un gouvernement, étranger ou local, sont retenus pour être questionnés. Un système de filtration a été mis en place pour renvoyer les conscrits ukrainiens démobilisés chez eux, mais les volontaires et les officiers sont enfermés dans des centres de détention préventive pour déterminer si des crimes de guerre ont été commis sur leur ordre.

Ce n’est pas vrai du tout. Les troupes russes ne s’engagent en aucune façon avec les civils, évitant scrupuleusement les quartiers résidentiels et faisant de leur mieux pour que la fourniture d’électricité, d’eau et d’autres produits essentiels ne soit pas perturbée. En ce qui concerne la dénazification, je ne suis toujours pas sûr du plan, mais mon intuition pour le moment est que cela sera laissé aux Ukrainiens eux-mêmes. Il est fort probable qu’une fois qu’ils auront réalisé ce que les nazis et leurs maîtres occidentaux ont fait à leur pays, ils feront de leur mieux pour rassembler les nazis et les pendre aux lampadaires. Les nazis le verront venir (certains le font déjà) et s’enfuiront vers la Pologne ou la Slovénie ou vers des points plus à l’ouest.

5. La plupart des postes frontières sont maintenant sous contrôle russe. Certains sont soutenus par l’aviation, l’artillerie et des bataillons de chars pour dissuader l’OTAN d’essayer d’envahir l’Ukraine. On laisse passer les marchandises civiles et humanitaires. Les hommes d’affaires aussi, à condition qu’ils remplissent les formulaires adéquats (qui sont en russe).

Les gardes-frontières ukrainiens le long de la frontière russe ont abandonné leurs postes. Certains d’entre eux ont marché jusqu’au côté russe et se sont rendus. Les frontières russe et bélarussienne sont contrôlées par les côtés russe et bélarussien. Les postes-frontières occidentaux sont bondés par toutes les personnes qui essaient de fuir.

6. La Russie a instauré une zone d’exclusion aérienne sur toute l’Ukraine. Tous les vols civils ont été annulés. Il y a une foule d’employés du Département d’État étasunien, d’agents de la CIA et du Mossad et d’employés d’ONG occidentales qui se retrouvent coincés à l’aéroport de Borispol à Kiev. Certains appellent nerveusement tous ceux qu’ils connaissent sur leur portable. Les politiciens occidentaux exigent d’être immédiatement évacués, mais les autorités russes veulent les garder sur le territoire pour établir leur éventuelle complicité dans des crimes de guerre.

Les sites de radars en ligne montrent qu’il n’y a aucun vol au-dessus de l’Ukraine. En fait, le trafic aérien a été perturbé sur une grande partie de l’Europe, avec de nombreux espaces aériens fermés et beaucoup de nouvelles restrictions sur le trafic. De nombreux vacanciers, notamment ceux d’Ukraine, sont bloqués où qu’ils se trouvent. Ceux qui se trouvent en Égypte ont de la chance : le gouvernement égyptien paie leur séjour à l’hôtel pendant qu’ils sont bloqués là-bas. Les Occidentaux, en revanche, ayant tiré la leçon du fiasco en Afghanistan, ont fui l’Ukraine à l’avance. Comme il existe une longue liste d’endroits d’où ils doivent se barrer avant que leur chance ne s’épuise, il est bon qu’ils s’y fassent.

7. Les dirigeants ukrainiens, jamais avares de paroles jusqu’ici, comme le président Porochenko, le député Iatseniouk et d’autres, ne donnent plus d’interview aux médias occidentaux. Personne ne sait au juste où ils sont. Le bruit court qu’ils ont déjà quitté le pays. La foule a envahi les résidences qu’ils ont abandonnées et elle est sidérée d’y trouver des toilettes en or pur. Les oligarques ukrainiens sont eux aussi introuvables, excepté le seigneur de guerre Igor Kolomoisky, qui, abandonné par ses hommes de main, a été retrouvé mort d’une crise cardiaque dans sa résidence (selon The Saker).

La tête parlante ukrainienne numéro un, le président-comédien Zelensky, se cache dans un bunker à Lvov, tel un Führer, entouré de ses sbires nazis. Ses missives confuses aux fidèles semblent avoir été préenregistrées. Dans le même temps, la guerre de l’information se poursuit à un rythme soutenu, avec l’arrivée quotidienne de nombreuses fausses nouvelles, trop nombreuses pour être comptabilisées. Les choses sérieuses commenceront lorsque les chaînes de télévision de Kiev seront dénazifiées et que les Ukrainiens sortiront de leur torpeur de huit ans, comprendront certaines choses par eux-mêmes et deviendront extrêmement furieux contre ceux qui leur ont menti pendant huit longues années.

8. Les 800 000 Ukrainiens réfugiés en Russie commencent à rentrer chez eux en masse. Ils vivaient dans des village de tentes, la plupart dans la région voisine de Rostov, mais avec l’hiver qui arrive, ils ont hâte de rentrer à la maison maintenant que les bombardements ont cessé. En même temps qu’eux, des équipes de reconstruction, des camions de ciment et des wagons plats chargés de tuyaux, de câbles et d’armatures en acier arrivent en quantité pour réparer les dégâts causés par les bombardements.

Ce n’est pas encore le cas. Ce sera un processus lent, étant donné que le nombre de réfugiés, huit ans plus tard, se compte en millions et est dispersé dans de nombreuses régions russes.

9. L’activité diplomatique et militaire internationale est intense, surtout en Europe et aux États-Unis. Les armées sont en alerte maximale, les diplomates courent d’une conférence à l’autre autour du globe. Le président Obama vient juste de tenir une conférence de presse pour annoncer que “Nous n’avons pas encore de stratégie en Ukraine”. Ses conseillers militaires lui disent que sa stratégie habituelle de “bombarder un peu pour voir” ne servira à rien dans le cas présent.

C’est bien le cas. L’objectif des dirigeants occidentaux est désormais de paraître déterminés et forts tout en ne faisant rien de conséquent. Ils parlent sans cesse de couper la Russie du système de messagerie bancaire SWIFT, mais reculent d’horreur lorsqu’ils réalisent ce que cela signifiera pour le prix de leur énergie (qui sont déjà dangereusement élevés). La position de la Russie vis-à-vis des sanctions occidentales semble être « Envoyez, nous sommes prêts ! ». Apparemment, huit années ont suffi à la Russie pour se préparer minutieusement à cet événement.

10. Kiev s’est rendu. Il y a des tanks russes sur la place Maïdan. L’infanterie russe éponge ce qui reste de la Garde Nationale ukrainienne. Un couvre-feu est instauré. La conquête de Kiev ressemble à l’opération “Shock and Awe” de Bagdad : quelques boums suivis d’un soupir.

Il est peu probable que les chars russes pénètrent dans le centre-ville ; ils sont concentrés sur la destruction des installations militaires, la démobilisation des militaires ukrainiens et la destruction des bataillons nazis. Un couvre-feu est en effet en vigueur à Kiev.

Un autre développement significatif mérite d’être mentionné : Les forces russes prennent en charge les installations nucléaires de l’Ukraine, y compris celle de Tchernobyl, qui est désormais sous contrôle conjoint russe/ukrainien. Cela réduira le risque que les nazis ukrainiens tentent de faire exploser l’une d’entre elles sur leur chemin vers l’enfer. L’Ukraine possède 15 réacteurs nucléaires, et comme elle n’a pratiquement plus d’autres sources d’énergie, elle les fait tous tourner à plein régime. Deux d’entre eux ont été arrêtés récemment en raison de problèmes techniques. La Russie travaille très dur pour rendre un Tchernobyl 2.0 moins probable.

Je ne suis pas sûr de la note que je dois m’attribuer pour mes prédictions. Les planificateurs politiques et militaires russes se sont révélés bien plus intelligents que moi, mais ce n’est pas du tout une surprise. Après tout, ils disposent de toutes les ressources intellectuelles d’un pays immense et puissant, alors que je ne suis qu’un type avec une chaise de bureau et un ordinateur portable.

Voulez-vous que je fasse d’autres prédictions sur l’Ukraine ? Bien sûr, pourquoi pas !

1. Les régions de Donetsk et de Lougansk vont poursuivre leur chemin vers une intégration de plus en plus étroite dans la Fédération de Russie. Elles font déjà partie de l’espace monétaire russe, leurs systèmes éducatifs sont intégrés à ceux de la Russie (mêmes normes et procédures), leurs systèmes de défense sont totalement intégrés et, sur le plan diplomatique, elles agissent comme une unité bien synchronisée.

2. Une zone plus à l’ouest, englobant probablement tout le bassin du Dniepr et le littoral de la mer Noire, de la frontière biélorusse à la frontière roumaine, fera partie d’une zone russe. Les régions de cette zone bénéficieront d’une autonomie politique dans un cadre général de sécurité et d’économie lié à la Russie. Les contours approximatifs de cette zone peuvent être déterminés à partir de la carte linguistique suivante. Les régions en rouge et orange sont russophones et font naturellement partie de la zone russe. Les deux seules exceptions seront une enclave carpatho-russe (en violet) qui devra être administrée séparément et une enclave hongroise (en vert) qui pourrait tout aussi bien être absorbée par la Hongrie.

3. Plus à l’ouest, il y aura une zone qui sera emballée dans du papier fantaisie avec des rubans et des nœuds et présentée comme un cadeau extra-spécial à l’UE pour qu’elle l’aime, la chérisse et en souffre de migraines et d’anévrismes. En gros, la zone jaune est de langue ukrainienne et constitue un buffet à volonté (mais ne vous étouffez pas) pour l’Occident. Elle possède un sol relativement pauvre et une incidence élevée de carence en iode et d’imbécillité dans la population générale. C’est également de là que vient le nationalisme ukrainien et que provient l’actuel fléau nazi ukrainien. La position russe devrait être (si je peux me permettre de recommander ce que le gouvernement russe devrait faire) du type « Si vous aimez vos nazis ukrainiens, vous pouvez garder vos nazis ukrainiens ».

Dmitry Orlov

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Le livre de Dmitry Orlov est l’un des ouvrages fondateurs de cette nouvelle « discipline » que l’on nomme aujourd’hui : « collapsologie » c’est à-dire l’étude de l’effondrement des sociétés ou des civilisations.

Il vient d’être réédité aux éditions Cultures & Racines.

Il vient aussi de publier son dernier livre, The Arctic Fox Cometh.

Traduit par Hervé, relu par Wayan, pour le Saker Francophone

Source : https://lesakerfrancophone.fr/la-situation-en-ukraine-predictions-et-realite

mardi 25 janvier 2022

La Russie et la Chine ont-elles encore peur de nous ou sommes-nous juste en train de nous branler les uns les autres ? Tentative de réponse par Dmitri Orlov.

 Prévisions géopolitiques à court terme

Depuis que Poutine a annoncé qu’il exigeait des garanties de sécurité de la part des États-Unis et de l’OTAN (en bref, arrêter l’expansion de l’OTAN vers l’est, faire en sorte que l’OTAN se retire sur ses positions de 1997 et retire les armes offensives du voisinage immédiat de la Russie), nous avons été soumis à un barrage d’inepties de la part de la presse occidentale :

• Ces garanties de sécurité sont-elles un ultimatum ou un outil de négociation ?

• Les États-Unis et l’OTAN vont-ils les accepter ou les rejeter ?

• Poutine va-t-il envahir l’Ukraine ou sera-t-il stoppé dans son élan grâce à l’utilisation judicieuse et opportune de froncements de sourcils, de secousses de tête, d’agitations de doigts et de tics nerveux par des personnalités occidentales diverses et variées ?

• Si Poutine envahit l’Ukraine, cela signifie-t-il que la troisième guerre mondiale est enfin sur nous et que nous allons tous mourir ?

J’espère que je ne suis pas le seul à en avoir assez de cette tentative pathétique et fastidieuse de jeter un écran de fumée et de cacher l’inévitable réalité de ce qui est sur le point de se produire. Au cas où cela ne serait pas encore tout à fait clair pour vous, je voudrais tout expliquer. Je suis normalement plus prudent lorsque je fais des prédictions spécifiques, mais dans le cas présent, notre avenir immédiat a été soigneusement tracé pour nous par la Russie et la Chine, les États-Unis et leurs marionnettes assorties étant réduits au statut de personnages non actifs dans un jeu vidéo, qui ne peuvent faire qu’une chose : se cacher derrière un écran de fumée dense de mensonges risibles.

Premièrement, les demandes de garanties de sécurité russes ne sont pas des ultimatums. Un ultimatum est une sorte de “ou bien”, offrant un choix entre la conformité et les conséquences, alors que dans ce cas, la non-conformité et les conséquences suivront automatiquement. L’Occident et l’OTAN sont, pour des raisons de politique intérieure bien comprises, incapables de signer ces garanties ; les conséquences se feront donc sentir en temps voulu.

La Russie a exigé que les États-Unis et l’OTAN mettent par écrit leur refus d’accepter les garanties de sécurité. Ces morceaux de papier seront importants pour la suite : pour comprendre pourquoi, nous devons tenir compte du fait que tout ce qui fait partie de ces garanties de sécurité a déjà été accepté par l’Occident, à savoir la garantie « pas un pouce de plus à l’est » donnée aux Russes par les États-Unis il y a 30 ans et le principe de sécurité collective accepté par tous les membres de l’OSCE. En signant un document dans lequel ils déclarent leur refus de se conformer à ce qu’ils ont précédemment accepté, les États-Unis et l’OTAN se déclareraient essentiellement apostats du droit et de l’ordre internationaux. Cela impliquerait à son tour que leurs propres besoins de sécurité peuvent être ignorés et qu’ils méritent d’être humiliés et punis.

En outre, en mettant leur refus par écrit, les États-Unis et l’OTAN déclareraient que le principe de sécurité collective lui-même – en particulier en ce qui concerne les États-Unis et l’OTAN – est nul et non avenu, ce qui signifie que si, par exemple, les Bahamas, une nation souveraine depuis le 10 juillet 1973, décidaient de renforcer leur souveraineté en accueillant une batterie de missiles russes pointée à travers le Gulf Stream sur Miami et Fort Lauderdale, en Floride, les États-Unis n’auraient rien à dire sur la question, et si les États-Unis essayaient de s’exprimer, ils seraient battus avec ce même morceau de papier qu’ils ont signé. “Vous sentez-vous menacés maintenant ?” demanderaient les Russes ; “Peut-être auriez-vous dû y penser lorsque vous nous avez menacés en plaçant vos missiles en Pologne et en Roumanie”.

L’objectif initial déclaré des deux installations d’Aegis Ashore en Pologne et en Roumanie était d’abattre les missiles iraniens, qui n’existaient pas à l’époque, n’existent pas aujourd’hui, et n’auraient de toute façon jamais fait un détour géant pour survoler la Pologne ou la Roumanie. Bien que l’objectif déclaré de ces systèmes soit la défense antimissile, leurs plateformes de lancement peuvent également être utilisées pour lancer des armes stratégiques offensives : les missiles de croisière Tomahawk à charge nucléaire. Ces Tomahawk sont obsolètes et les Russes savent très bien les abattre (comme ils l’ont démontré en Syrie) mais cela reste très gênant, sans compter qu’ensemencer la campagne russe avec du plutonium américain pulvérisé ne serait bon pour la santé de personne.

Nous devons donc nous attendre à ce que de mauvaises choses arrivent à ces installations, mais nous devons également nous attendre à rester plutôt mal informés sur les détails. Alors que les non-négociations sur les exigences russes en matière de garantie de sécurité seront aussi publiques que possible (malgré les cris plaintifs des Occidentaux demandant qu’elles se déroulent en privé), les “moyens technico-militaires” que la Russie utilisera pour faire face au non-respect des exigences occidentales ne seront pas largement documentés. L’installation roumaine pourrait devenir inopérante à cause d’un petit volcan récemment découvert à proximité ; l’installation polonaise pourrait succomber à une explosion de gaz de marais.

Une nouvelle série d’accidents malheureux pourrait amener les États-Unis et l’OTAN à devenir timides et réticents à empiéter sur les frontières de la Russie. Les troupes de l’OTAN stationnées dans les pays baltes, à un jet de pierre de Saint-Pétersbourg, deuxième ville de Russie, pourraient se plaindre d’avoir entendu à plusieurs reprises le mot “Thud !” clairement et bruyamment annoncé, ce qui entraînerait un diagnostic de schizophrénie et leur évacuation. Un avion espion américain pourrait connaître un léger dysfonctionnement de son GPS, ce qui l’amènerait à pénétrer dans l’espace aérien russe, à être abattu et à voir son pilote, s’étant éjecté, condamné à de nombreuses années d’enseignement de l’anglais à des enfants de maternelle à Syktyvkar ou Petropavlovsk-Kamchatsky. Les navires de la marine américaine et de l’OTAN, déjà sujets à des collisions entre eux, avec des montagnes sous-marines et des barges, pourraient subir un nombre inhabituellement élevé d’accidents de ce type à proximité des côtes russes, ce qui les ferait s’en éloigner. Un grand nombre d’événements de ce type, dont la plupart se dérouleraient hors de la vue du public, et dont les nouvelles seraient supprimées dans la presse occidentale et les médias sociaux, obligerait la puissante armée américaine à faire face à une question existentielle inconfortable : “Les Russes ont-ils encore peur de nous, ou sommes-nous en train de nous branler les uns les autres ?” Leur réponse sera de se réfugier dans le déni et de se branler plus fort et plus vite que jamais.

Mais s’ils ne font que se branler les uns les autres, alors qu’en est-il de leur politique d’endiguement ? Qu’est-ce qui va contenir la Russie et l’empêcher de recréer l’URSS 2.0 ? si ce n’est que les Russes ne sont pas stupides, qu’ils ont appris leur leçon la première fois, et que la Mère Russie ne permettra plus à une bande d’inutiles ingrats non russes de téter son ample sein. “Mais quand donc la Russie va-t-elle envahir l’Ukraine ?”demandent les esprits curieux, en particulier ceux qui ont prêté attention aux sources d’information occidentales affirmant que la Russie a rassemblé 100 000 soldats à la frontière ukrainienne (ce n’est pas le cas).

La dernière théorie en date est que ce qui empêche la Russie d’envahir le pays est le temps chaud. Apparemment, il a fait exceptionnellement chaud depuis 2014, ce qui explique pourquoi les troupes russes n’ont pas encore traversé la frontière ukrainienne. Qu’est-ce qu’ils attendent ? La prochaine ère glaciaire qui devrait arriver d’un millénaire à l’autre ? Au lieu de cela, la Russie a juste obtenu les morceaux d’Ukraine qu’elle voulait – la Crimée, le Donbass et quelques millions de professionnels russophones hautement qualifiés – tout cela sans organiser une invasion. Elle attend maintenant que le reste de l’Ukraine dégénère dans son état final de parc à thème ethnique et de réserve naturelle. La seule chose qui ne va pas avec ce plan est que l’Ukraine doit être démilitarisée, comme l’exigent les récentes demandes de garanties de sécurité de la Russie.

Mais que se passera-t-il si les garanties de sécurité de la Russie ne sont pas respectées et que les États-Unis et l’OTAN continuent à bourrer l’Ukraine d’armes, à envoyer des formateurs et à établir des bases? Eh bien, il faudra alors les détruire. Cela peut se faire en lançant quelques roquettes depuis de petits navires naviguant dans la mer Caspienne, comme cela a été fait pour détruire les bases d’ISIS en Syrie ; aucune invasion terrestre n’est nécessaire. Il ne faudra pas grand-chose pour inciter les États-Unis et l’OTAN à évacuer l’Ukraine dans la panique, puisqu’ils ont déjà élaboré des plans à cet effet et ont annoncé qu’ils ne se battraient pas pour la défendre.

Si c’est ce qui se passe, que pensez-vous qu’il se passera ensuite ? Les États-Unis déclencheront-ils une guerre nucléaire à cause de l’Ukraine? Umm… que pensez-vous d’un “NON !!!” ? Les États-Unis vont-ils imposer des “sanctions infernales” ? Peut-être, mais vous devez comprendre qu’à l’heure actuelle, les États-Unis et les autres économies occidentales peuvent être caricaturés avec précision comme un vase de cristal plein d’excréments posé sur le bord d’une haute étagère au-dessus d’un sol en marbre dur. L’espoir est que personne ne va éternuer parce que la pression sonore pourrait le faire basculer. Les sanctions infernales semblent en effet pouvoir provoquer un éternuement. Inutile de dire que les États-Unis continueront à parler de sanctions infernales et peut-être même à adopter une loi à cet effet, et à prétendre avoir envoyé “un message fort”, mais sans résultat.

La Russie agira-t-elle immédiatement après avoir accepté par écrit le refus de l’Occident de lui fournir les garanties de sécurité demandées ? Non, il y aura forcément un délai. Voyez-vous, le 4 février est dans un peu plus d’une semaine et il n’y a tout simplement pas assez de temps pour commencer et terminer une action militaire. Qu’y a-t-il le 4 février ? La cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Pékin, bien sûr, à laquelle Poutine sera l’invité d’honneur alors que les dignitaires américains n’ont même pas été invités.

Lors des Jeux olympiques, Poutine et Xi signeront une série d’accords majeurs, dont l’un pourrait transformer la relation déjà très forte entre la Chine et la Russie en une véritable alliance militaire. L’ordre mondial tripartite annoncé par le général Milley, dans lequel les États-Unis, la Russie et la Chine sont sur un pied d’égalité, n’aura duré que trois mois. Avec la Russie et la Chine agissant comme une unité, l’OCS, qui comprend désormais la quasi-totalité de l’Eurasie, devient plus qu’un simple pôle géopolitique. En comparaison, les États-Unis et les 29 nains de l’OTAN ne constituent pas tout à fait un pôle géopolitique et le monde redevient unipolaire, mais avec une polarité inversée.

Nous ne devons donc pas nous attendre à ce qu’une action militaire ait lieu entre le 4 et le 20 février. Si une quelconque frasque militaire devait se produire pendant les Jeux olympiques, qui sont traditionnellement une période de paix dans le monde, il s’agirait à coup sûr d’une provocation occidentale, puisque les Jeux olympiques sont une période traditionnelle de provocations occidentales (la Géorgie pendant les Jeux olympiques de Pékin en 2008 ; l’Ukraine pendant les Jeux olympiques russes de Sotchi en 2014). Nous pouvons être sûrs que tout le monde est très bien préparé à cette provocation et qu’elle sera traitée très durement.

La pire des provocations serait que les conseillers de l’OTAN parviennent à pousser les troupes ukrainiennes infortunées et démoralisées à envahir le Donbass. Si cela se produit, l’opération se déroulera en deux étapes. La première consistera à tromper les Ukrainiens pour qu’ils tombent dans un piège. La seconde consistera à menacer de les détruire en utilisant l’artillerie russe à longue portée depuis la frontière russe. Lorsque cela s’est produit précédemment, le gouvernement ukrainien de Kiev a été contraint de signer les accords de Minsk, qui exigeaient que l’armée ukrainienne se retire et que le gouvernement de Kiev accorde l’autonomie au Donbass en modifiant la constitution ukrainienne.

Mais comme le gouvernement de Kiev n’a montré aucune intention de respecter les termes de ces accords au cours des années écoulées et qu’il a plutôt fait tout son possible pour les saboter, il n’y a aucune raison de s’attendre à ce qu’une nouvelle série d’accords de Minsk soit signée. Au contraire, ce sera la fin de la route pour l’État ukrainien. C’est exactement ce que Poutine a promis. Les conseillers de l’OTAN risquent d’être frustrés dans leurs efforts pour amener les Ukrainiens à attaquer : il est préférable pour eux de rester assis là, à se faire pousser encore et encore par leurs responsables de l’OTAN et à se faire harceler par des fonctionnaires et des espions des États-Unis et de l’Union européenne, plutôt que de voir leurs meilleurs éléments anéantis par l’artillerie russe ou de subir une dernière humiliation nationale.

Depuis le 20 février, cependant, nous devons nous attendre à une nouvelle et intéressante distraction intérieure. Il pourrait s’agir d’un château de cartes financier occidental ou d’une pyramide qui finit par s’effondrer, d’un nouveau virus amusant ou d’une pénurie de gaz naturel qui provoquerait une énorme urgence humanitaire. Ou encore, il pourrait s’agir d’une combinaison de ces éléments : le virus pourrait être attribué à la Chine, la pénurie de gaz à la Russie et l’effondrement financier aux deux. Pendant que tout le monde est distrait, un ou deux porte-avions pourraient disparaître, l’installation Aegis Ashore en Pologne pourrait être détruite par une explosion de gaz de marais et ainsi de suite. Mais alors personne n’y prêtera attention.

Il y aura toujours la question existentielle majeure qui harcèlera le complexe militaro-industriel américain : “La Russie et la Chine ont-elles encore peur de nous ou sommes-nous juste en train de nous branler les uns les autres ?” Je pense savoir quelle réponse la Russie et la Chine offriraient : “Ne vous inquiétez pas pour nous. Continuez à vous branler les uns les autres”.

Le 19 janvier 2022, Club Orlov – Traduction du Sakerfrancophone

vendredi 29 janvier 2021

Le coronavirus et la pandémie pétrochimique

 Par Dmitry Orlov – Le 18 janvier 2021 – Source Club Orlov

Je me demande à quel moment il deviendra évident pour une fraction critique de la population que le problème auquel s’attaquent les fermetures, les verrouillages, les couvre-feux et diverses autres mesures de contrôle prétendument épidémiques, qui sont en réalité des mesures de suppression de la consommation, n’est pas épidémiologique mais pétrochimique, motivé par la nécessité de réduire la consommation de pétrole de manière systématique et symétrique ? Après tout, cela m’est déjà apparu comme une évidence. Se peut-il que je sois vraiment seul ? Permettez-moi de vous donner un indice.

Pour revenir un peu en arrière, du point de vue du capitalisme transnational, le monde est là simplement pour lui fournir des ressources et des services à partir desquels il peut générer des profits. Sa vision du monde naturel montre un déficit mental frappant : une incapacité à voir les limites. Tant qu’il ne les rencontre pas, il ne peut tout simplement pas les voir et suppose que les ressources sont infinies. Et lorsqu’il se heurte à ces limites, il traite invariablement le problème comme un problème financier et jette de l’argent en l’air pour le régler, qui peut généralement être imprimé par une banque centrale convenablement coopérative. Il est évident qu’il considère la presse à imprimer comme une autre ressource inépuisable, comme en témoigne la longue série de poussées d’hyperinflation dans les pays du monde entier.

Ainsi, lorsqu’en juillet 2008, le prix du pétrole a atteint près de 150 dollars le baril, on a automatiquement supposé que le problème n’avait rien à voir avec l’épuisement des ressources mais était entièrement dû au manque d’investissement dans l’industrie pétrolière. Comme le pétrole des puits de pétrole conventionnels sur terre se raréfiait, le système a jeté d l’argent dans le forage en mer, dans les sables bitumineux, dans la fracturation hydraulique et d’autres ressources relativement plus coûteuses, l’imprimant à volonté selon les besoins. Certes, l’augmentation des investissements a fini par entraîner une augmentation de la production et un marché pétrolier saturé, mais le fait que l’augmentation des investissements soit devenue nécessaire avait tout à voir avec l’épuisement des ressources : les ressources qui pouvaient être produites le moins cher étaient les premières à être produites et les premières à être épuisées. De plus, l’effet de l’augmentation des investissements est temporaire ; comme la rouille, l’usure ne dort jamais, et à un certain moment, le niveau de dépenses nécessaire pour maintenir la production devient impossible à maintenir.

Avançons rapidement jusqu’en août 2019, lorsqu’il s’est soudainement avéré que les instruments de la dette fédérale américaine, que l’on pensait auparavant aussi bons que l’or, ne pouvaient plus être utilisés comme garantie pour les prêts au jour le jour entre banques sans payer des intérêts exorbitants. À peu près au même moment, il est devenu évident que la poursuite de la production américaine de pétrole de schiste, qui a permis aux États-Unis de redevenir pendant un bref instant le premier producteur mondial de pétrole, est non seulement un gaspillage net d’argent, mais s’épuise aussi trop rapidement pour être soutenue. La chute de la production de pétrole aux États-Unis et les réductions de production prétendument volontaires de l’Arabie saoudite (dont les champs sont énormes mais très anciens) ont fait de la Russie le producteur pivot, capable de contrôler les prix du pétrole à sa guise. Pire encore, les Russes construisent furieusement des usines pétrochimiques et autres parce qu’ils prévoient d’arrêter d’exporter du pétrole et de se tourner vers la fabrication et l’exportation de produits à valeur ajoutée. Par exemple, ils prévoient de s’emparer d’un tiers du marché mondial du plastique polyéthylène.

Comme le niveau de la consommation de pétrole détermine directement le niveau de l’activité économique globale, si l’on ne peut ni produire ni acheter plus de pétrole, il faut réduire la consommation de pétrole. Une fois que cette prise de conscience a été faite, vers décembre 2019, les conseils d’administration des grandes corporations et leurs sous-fifres supposés élus démocratiquement dans les gouvernements nationaux occidentaux se sont tournés vers la suppression de la consommation publique par l’imposition de contrôles sociaux. Une merveilleuse solution provisoire a été trouvée sous la forme d’un virus de la grippe pas particulièrement mortel. Les frontières ont été fermées et des mesures de confinements ont été imposées, ce qui a entraîné l’arrêt du tourisme et d’une grande partie du secteur des services. Alors que la crise économique s’aggrave, des souches mutantes de ce virus de la grippe pas particulièrement mortel sont découvertes dans le monde entier et sont utilisées pour justifier de nouvelles restrictions à la consommation dans les pays qui manquent de ressources financières et physiques pour continuer à fonctionner comme avant.

Cette stratégie est de plus en plus difficile à vendre au grand public, car les chercheurs du monde entier découvrent que les raisons d’imposer des contrôles sociaux ne sont pas justifiables en tant que mesures de santé publique. Aucune preuve n’a été montrée que la fermeture des écoles et des cours de récréation a affecté le cours de l’épidémie. Aucune preuve n’a été trouvée que des individus asymptomatiques (c’est-à-dire en bonne santé) sont capables de propager le virus. On ne peut pas non plus prouver que les « lockdowns » (une forme de peine de prison américaine pour enfermer les détenus dans leur cellule pour leur propre protection) ont été efficaces. Le test PCR couramment utilisé produit de nombreux faux positifs qui le rendent au mieux trompeur en tant que test de dépistage pour une population majoritairement saine, et au pire un peu de technologie politique : le paramètre Ct du test PCR peut être utilisé comme un bouton pour régler le nombre prévu de résultats faux positifs.

Les preuves ne sont pas encore concluantes, mais il semble probable qu’il sera finalement prouvé que le port du masque par des individus en bonne santé (maintenant appelés « asymptomatiques ») fait plus de mal que de bien en incubant et en aidant à la propagation des bactéries. La réponse à l’apparition de ces résultats de recherche a été d’imposer des contrôles stricts sur les médias sociaux, en essayant d’arrêter la propagation de ces idées subversives, et en essayant de supprimer les manifestations et les émeutes des personnes qui s’opposent à être opprimées de cette manière, parce que l’information fuite.

Enfin, permettez-moi d’expliquer pourquoi les fermetures, confinements, couvre-feux et diverses autres mesures de contrôle prétendument épidémiques, qui sont en réalité des mesures de suppression de la consommation, sont motivées par la nécessité de réduire la consommation de pétrole de manière symétrique. Environ la moitié de chaque baril de pétrole est transformée en essence, utilisée dans les voitures et autres petits moteurs ; l’autre moitié est transformée en distillats – diesel, carburéacteur, combustible de soute pour les navires et mazout de chauffage. Pour que l’industrie pétrolière continue à fonctionner sans heurts, à rester rentable et à éviter l’accumulation de stocks invendus, la destruction de la demande pour ces deux types de produits doit être symétrique ; ainsi, il faut trouver un équilibre entre empêcher les gens de prendre l’avion (économie de kérosène) et empêcher les gens de se rendre au travail en voiture (économie d’essence). Le mécanisme par lequel ces problèmes logistiques de l’industrie pétrolière sont traduits en déclarations de sécurité publique prétendument motivées par des raisons médicales reste un mystère. Si, à un moment donné, quelqu’un divulgue un modèle informatique qui permet de régler les boutons de confinement, de fermeture des entreprises, de couvre-feu et de fermeture des frontières afin d’ajuster et d’équilibrer la consommation d’essence et de distillats de pétrole, alors nous aurons notre arme du crime.

Dmitry Orlov

Le livre de Dmitry Orlov est l’un des ouvrages fondateurs de cette nouvelle « discipline » que l’on nomme aujourd’hui : « collapsologie » c’est à-dire l’étude de l’effondrement des sociétés ou des civilisations.

Traduit par Hervé, relu par Wayan, pour le Saker Francophone





vendredi 10 mars 2017

Homesteading : qu’est-ce donc ? / Homesteading : what is it ?


source : http://lesakerfrancophone.fr/homesteading-quest-ce-donc

Par Dmitry Orlov – Le 14 février 2017 – Source Club Orlov

Le livre Prosperous Homesteading est sorti depuis un peu plus d’une semaine maintenant et se vend très bien. Mais, sur la base des commentaires reçus à ce jour, le concept de « homesteading », tel qu’il est défini dans ce livre très utile, doit être mieux expliqué. Oui, vous pouvez enregistrer votre maison comme un homesteading pour la protéger contre la saisie ou pour abaisser vos impôts. Seriez-vous alors dans un cas de homesteading ? Non.

Le homesteading n’est pas un passe-temps, une entreprise ou un hobby individuel ; c’est l’activité principale d’une famille. Il s’agit d’un « bouclier de vie » essentiel, un moyen de contourner les contraintes imposées par une société en ruine qui survit en parallèle, mais qui est incapable de simplement considérer des changements absolument essentiels. Il s’agit de vous isoler vous-même et votre famille des aléas d’un système qui dysfonctionne pour récupérer un avenir viable et la tranquillité d’esprit.


Il y a un peu plus d’une décennie, je suis tombé dans une autre forme de vie en marge : le seasteading. Nous avons vendu la maison et la voiture, acheté un voilier et navigué au loin. Cela m’a permis de quitter un emploi dans une entreprise et de consacrer la majeure partie de mon temps à faire de la recherche, à écrire et, en général, à profiter. Le voilier, en tant que forme de vie en marge, a permis à ma famille de sortir de la « loi d’airain » maison-voiture-travail à laquelle une grande partie de la population est asservie.

Bien que le seasteading nous ait permis de réduire considérablement nos dépenses et nous ait donné beaucoup de possibilités de choix, en tant que solution c’est incomplet : nous avons encore besoin d’un revenu externe, et dans un contexte économique précaire, une telle dépendance ne doit pas être prise à la légère. Le homesteading résout ce problème, car en pratiquant le homestead, vous produisez tout ce dont la famille a besoin, y compris un surplus de richesses nécessaires pour la maintenance et pour acheter les quelques éléments qui doivent encore être achetés.

Alors, qu’est-ce que homesteading ? Ce n’est certainement pas du jardinage. La plupart des gens qui jardinent vont encore au magasin pour la nourriture, tandis que les homesteaders font pousser tout ce qu’ils mangent à l’exception de ces choses qui peuvent être achetées en vrac à bien meilleur marché que ce qu’ils peuvent produire, telles que les céréales (à moudre dans la ferme selon les besoins, parce que le stockage de farine ne fonctionne pas), et les articles que le homesteader ne peut pas produire, comme le sel et les pièces de rechange. D’autres exceptions incluent les produits de luxe comme l’huile d’olive, le café et le thé.

Le homesteading n’est pas de l’agriculture, parce que les agriculteurs produisent généralement un certain nombre de cultures de rente qu’ils vendent au lieu de se concentrer sur la production de tout ce qu’ils utilisent et de couper dans les achats de leur nourriture à l’extérieur. L’agriculture est une activité hautement réglementée ; le homesteading  est à peine réglementé. Il est possible d’exploiter une entreprise à partir d’une ferme (et c’est souvent une bonne idée) ; mais c’est une idée terrible de traiter le homesteading comme une entreprise.

Alors, qu’est-ce que le homesteading ? C’est l’activité de trouver et de couper chaque cordon ombilical qui vous lie à l’économie de la dette, à l’extérieur. C’est le processus consistant à éliminer à peu près chaque dépense en faisant à la ferme votre nourriture, l’eau, le carburant et, enfin, le capital. C’est l’accumulation de capital sous forme de terres agricoles et de bétail, qui permet à un homesteader de transmettre un héritage pour sa succession aux générations futures – aux enfants nés dans le homestead.

Pour prospérer avec une famille pratiquant le homesteading, les dépenses doivent être réorientées, des activités qui ne produisent pas et ne durent pas vers celles qui le font. Les factures pour la télévision par câble, l’hypothèque, les assurances, les combustibles fossiles et de nombreux dispositifs d’économie du travail, le confort et le luxe sont éliminés complètement. Les factures d’électricité et d’eau sont réduites ou éliminées (selon la situation locale). Les dépenses pour les actifs improductifs, tels que le logement (c’est-à-dire la maison) sont réduites. Au lieu de cela, l’argent est redirigé vers des biens productifs : terre, bétail et outils.

Certaines personnes qui ont commenté l’article de la semaine dernière ont posé une question raisonnable : qu’en est-il de la communauté ? Oui, la communauté est très importante et c’est précisément la présence de la communauté environnante de familles prospères pratiquant le homesteading qui a permis à Jeffers et à sa famille de trouver un moyen de prospérer aussi. Ainsi, on peut dire qu’un homestead prospère nécessite des voisins prospères. Des familles fortes forment des collectivités fortes. Pour survivre, les communautés doivent être intergénérationnelles et se fixer un objectif explicite de fournir les moyens de subsistance à leurs enfants. Une communauté homesteading n’est donc rien de plus qu’une famille élargie.

Dmitry Orlov

Note du Saker Francophone

Ce que Dmitry Orlov décrit en terme de relation entre homesteaders, c'est tout simplement les facteurs d'entraide décrits par Kropotkine dans son livre Entraide.

À noter quand même que c'est un concept juridique légal aux États-Unis avec le Homestead Act (1862). Cela pourrait donner des idées en Europe ou en France...