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Montjoie ! Saint Denis !
« Montjoie ! Saint Denis ! » est un cri d'armes ou cri de guerre utilisé par les armées des rois de France, en particulier celles des Capétiens. Il associe le terme de « montjoie », au sens de « bannière de l'armée royale », à une référence à saint Denis, patron des rois de France.
Origines et étymologie[modifier | modifier le code]
Le cri d'armes « Montjoie ! Saint Denis ! » apparaît sous la dynastie capétienne, succédant au seul « Montjoie ! » des xie – xiie siècles1. Paul Quentel explique dans l'Encyclopædia Universalis qu'il est difficile d'établir son origine mais qu'il est, semble-t-il, déjà en usage à la bataille de Bouvines sous le règne de Philippe II Auguste1. Ce cri de guerre reste en vigueur jusqu’au xvie siècle2.
Selon une légende née au début du xive siècle, le roi Clovis aurait été victorieux contre le roi sarrazin Condat au pied de la tour ou donjon de Montjoie dans la forêt de Marly (sur ce qui est aujourd'hui la commune de Chambourcy dans les Yvelines) grâce à un écu portant trois fleurs de lys d’or sur un fond azur, confectionné par Clotilde3. Ce miracle serait commémoré par le cri de guerre1.
Une autre hypothèse évoque Montjoie comme le lieu de martyr de saint Denis, nommé « Mont-joie Saint Denis »4, et situe l'endroit, la Montjoie, dans la plaine du Lendit, entre Paris et Saint-Denis5,note 1.
Selon Anne Lombard-Jourdan, l'étymologie du terme serait francique (Mundgawi) et signifierait « Protège-pays »7. L'historienne note que l'appel « Montjoie et saint Denis !» reprend le vieux cri héroïque « Munjoie ! » en le christianisant8. Cette formulation apparaît pour la première fois dans la chanson de geste le Couronnement de Louis, composée entre 1131 et 1137, et suggère une probable intervention de l'abbé Suger8.
D'autres modulations contemporaines se trouvent en littérature, ainsi « Montjoie ! saint Denis ! » dans Girart de Viane, « Montjoie ! Dis aidiés ! saint Denis ! » dans Fierabras, ou « Montjoie ! escrie. Aïde, saint Denis ! » dans Anseïs de Carthage8.
Cri d'armes royal[modifier | modifier le code]
Le cri juxtapose les termes :
- « Montjoie », la « bannière de l'armée », derrière laquelle se rassemble l’ost lorsqu’il marche à la bataille2.
- « Saint Denis », le saint patron et protecteur des rois de France. Pour les rois capétiens, ce cri de guerre permet d'invoquer Denis de Paris et ainsi de bénéficier de sa protection particulière dans le combat. L'oriflamme de Saint-Denis était une bannière de couleur rouge parsemée de flammes d’or derrière laquelle se rassemblaient les chevaliers français2. Conservée à l'abbaye de Saint-Denis, elle en était extraite uniquement lorsque de grands dangers menaçaient le royaume de France9.
L'invocation à saint Denis a été ajoutée au cri d'armes royal à l'époque où l'oriflamme était levée10, Louis VI le Gros étant le premier à l'arborer dans ses armées, en 112411.
« Montjoie Saint Denis ! » est par exemple crié au siège de Damiette, en 1249, à la bataille de Furnes, à Azincourt en 1415, au siège de Montargis, ou encore au siège de Pontoise avec Charles VII en 144110. Le cri d'armes était attaché au roi d'armes11 et n'était proféré qu'en présence des rois de France, « aux armées qu'ils commandaient, dans les combats auxquels ils prenaient part »12.
Des cris de guerre similaires sont adoptés en Bourgogne (« Montjoie Saint-André ! »), en Anjou (« Montjoie Anjou ! »), par la Maison de Bourbon (« Montjoie Notre-Dame ! ») ou par les rois d'Angleterre (« Montjoie Notre-Dame Saint-Georges ! »)1.
Dans la culture et la fiction[modifier | modifier le code]
- Le chœur Montjoie Saint-Denis13.
- Montjoie ! Saint-Denis ! est une toile du peintre Georges Mathieu de 195414.
- Montjoie ! Saint-Denys ! est la devise de la commune française de Saint-Denis, en lisière de Paris15.
- « Montjoie ! Saint Denis ! Que trépasse si je faiblis ! », réplique de Godefroy de Montmirail dans le film Les Visiteurs, accolant le cri de guerre des chevaliers français à sa devise personnelle16,13.
Occurrences contemporaines[modifier | modifier le code]
- En 2018, un militant royaliste d'Action française lance ce cri de guerre lorsqu'il entarte le député Éric Coquerel17,13.
- En juin 2021, un homme du nom de Damien Tarel prononce "Montjoie ! Saint-Denis ! À bas la Macronie !" avant de gifler le président de la République française, Emmanuel Macron, alors en visite à Tain-l'Hermitage dans la Drôme9.
Notes et références[modifier | modifier le code]
Notes[modifier | modifier le code]
- Les Montjoies étaient aussi neuf petits monuments commémoratifs jalonnant le trajet de Paris à Saint-Denis, soit le chemin du cortège funéraire royal jusqu'à la nécropole des rois de France qu'était la basilique Saint-Denis. Ils avaient été édifiés à l'époque des funérailles de Philippe Auguste en 1223 et de Louis IX en 1270, à l'emplacement de chaque reposée de cercueil. Ces oratoires comportaient des statues de Philippe Auguste, Louis VIII et Saint Louis6
Références[modifier | modifier le code]
- Paul Quentel, « MONTJOIE SAINT-DENIS » [archive] , sur Encyclopædia Universalis (consulté le ).
- Maxime Macé et Pierre Plottu, « Que signifie «Montjoie ! Saint-Denis !» crié à la figure de Macron ? » [archive], sur liberation.fr, (consulté le ).
- Laurent Theis, Clovis, de l'histoire au mythe, Bruxelles, Éditions Complexe, coll. « Le Temps et les hommes », 1996, 225 p., pp. 112-118 (« Les fleurs de lys [archive] »).
- Oscar-Amédée de Watteville du Grabe, Le cri de guerre chez les différents peuples, Paris, Librairie historique des Provinces, (lire en ligne [archive]), p. 9-12
- Lombard-Jourdan 1993, p. 162-163.
- Beaune 1985, p. 123.
- Lombard-Jourdan 1993, p. 164-165.
- Lombard-Jourdan 1993, p. 168.
- « Que signifie «Montjoie, Saint-Denis !», l'expression utilisée par l'homme qui a giflé Emmanuel Macron ? » [archive], sur cnews.fr, (consulté le ).
- de Buttet 1974, p. 127.
- de Buttet 1974, p. 128.
- Oscar-Amédée de Watteville du Grabe, Le cri de guerre chez les différents peuples, Paris, Librairie historique des Provinces, (lire en ligne [archive]), p. 9-12
- « A quoi fait référence l'expression « Montjoie Saint-Denis » ? » [archive], sur www.20minutes.fr, (consulté le )
- (en) « Georges Mathieu. “Montjoie Saint Denis !”, 1954 | MoMA » [archive], sur moma.org (The Museum of Modern Art) (consulté le ).
- Alphonse Chassant et Henri Tausin, Dictionnaire des devises historiques et héraldiques. [Volume 1] / par MM. A. Chassant et Henri Tausin, Paris, J.-B. Dumoulin, 1878-1895 (lire en ligne [archive]), p. 199
- « Leurs meilleures répliques » [archive], sur leparisien.fr, (consulté le ).
- « Entarté par l'Action française, Éric Coquerel (FI) porte plainte » [archive], sur www.valeursactuelles.com, Valeurs actuelles, .
Annexes[modifier | modifier le code]
Articles connexes[modifier | modifier le code]
Bibliographie[modifier | modifier le code]
- Colette Beaune, Naissance de la nation France, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque des histoires », , 431 p. (ISBN 2-07-070389-4, présentation en ligne [archive]).Réédition : Colette Beaune, Naissance de la nation France, Paris, Gallimard, coll. « Folio. Histoire » (no 56), , 574 p. (ISBN 2-07-032808-2).
- Anne Lombard-Jourdan (préf. Jacques Le Goff), Fleur de lis et oriflamme : signes célestes du royaume de France, Paris, Presses du CNRS, , 319 p. (ISBN 2-87682-058-7, présentation en ligne [archive]).Réédition : Anne Lombard-Jourdan (préf. Jacques Le Goff), Fleur de lis et oriflamme : signes célestes du royaume de France, Paris, CNRS Éditions, , 319 p. (ISBN 2-271-06059-1).
- Anne Lombard-Jourdan, « "Munjoie !", Montjoie et Monjoie. Histoire d'un mot », Nouvelle revue d'onomastique, nos 21-22, , p. 159-180 (lire en ligne [archive]).
- Henry de Buttet, « Le cri d'armes », Mémoires - Fédération des sociétés d'histoire et d'archéologie de l'Aisne, vol. XX, , p. 118-129 (lire en ligne [archive]).
Liens externes[modifier | modifier le code]
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :
- « Cri de guerre: Montjoie et Saint Denis » [archive], sur Le Guichet du Savoir de la BML.