mercredi 6 avril 2022

La Farce Tranquille #47 : SPÉCIAL 1ER TOUR + Macron en meeting


 Juste Milieu.

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Il y avait bien 2 officiers de la DGSE dans l'hélicoptère abattu en Ukraine

 6 avril


L'information traînait sur les canaux spécialisés, et qui rapportaient ce qui se passait à Marioupol. Une information particulière a capté l'attention, à propos d'un bataillon du régiment nazi Azov qui était totalement encerclé par l'armée de Vladimir Poutine, et pour lequel Kiev déployait des moyens inhabituels. Gleb Bazov avait même précisé que les Ukrainiens se sont retrouvés bloqués dans 4 "chaudrons" :


1) les usines Ilyich et Azovmash
2) le complexe métallurgique Azovstal
3) sur la rive gauche de la ville
4) et dans le port (ci-dessous la carte de la ville en rose, les forces russes) 

http://


Et c'est à partir de là que les plusieurs choses curieuses se sont passées:

1) Le 28 mars dernier, un hélicoptère avait embarqué plusieurs haut-gradés d'Azov, dont les commandants Prokopenko et Baraniouk, puis:

2) Le 29 mars, Emmanuel Macron a demandé par téléphone à Poutine une évacuation de toute urgence "pour raisons humanitaires" avec l'appui de la Grèce et de la... Turquie!

Note: pour que Macron collabore avec les services de son ennemi juré Erdogan, c'est que, forcément, il y a anguille sous roche, car Macron n'avait jamais pardonné à Erdogan ses insultes (voir mon reportage à Istanbul de septembre 2021 - onglet reportages).

3) Les Grecs se sont joints à cette demande alors que la majorité des fonctionnaires grecs sont pro-russes (orthodoxes), et que Athènes ainsi que d'autres villes ont même organisé des grandes manifestations en soutien de Moscou !!! Ca ne colle pas vraiment... sauf pour noyer le poisson.

4) Les Ukrainiens ont également appuyé cette demande, et pour cause: la colonne aurait permis à ses combattant d'Azov de quitter le piège russe qui s'était renfermé sur eux.

Pensant que tout se passerait pour le mieux, plusieurs hélicoptères ukrainiens (avec des blindages allemands) se sont posés dans le chaudron avec plus ou moins de succès puisque le 31 mars, 2 ont été abattus par les Russes:

Si le premier est introuvable car sous les flots, le second s'est écrasé dans un lieu-dit nommé "Rybatskoye", ne laissant que 2 survivants sur les 17 passagers. Ironie de l'histoire, il a été abattu par un tube sol-air fourni par les Américains, et capturé par les Russes auprès d'un soldat Ukrainien tué précédemment.

Et là, surprise:

Dans ce qui reste de l'appareil du lieu du crash, les Russes découvrent - ou plutôt identifient- l'un des chefs d'Azov, le commandant Palamar (dit "Kalina"), 2 autres membres officiers d'Azov, Tymius Juri Vladimirovitch et Dyachenko Maksim, ainsi que 3 autres personnes présentées comme 2 instructeurs français de la DGSE ainsi qu'un gradé américain, et pas n'importe lequel s'il vous plaît: le général des Marines Roger Cloutier (photo ci-dessous). Est-ce là un bluff des Russes ?


Précisons que le général Cloutier a toujours été un grand supporter du colonel Sirsky, commandant des Forces Ukraniennes, auquel il était très lié, donc sa présence ne serait pas illogique dans l'appareil. Via Gleb Bazov et Ole Nkarei:

"Gen RogerCloutier, commanding general of NATO Southern European Task Force and senior responsible officer for American Military forces in northern Italy is said to be trapped in Marioupol" et "If Gen Roger Cloutier, GoC/NATO Land-Command is trapped in Mariupol, as is being rumoured, the Russians will dig up every inch of that city to kill or capture. No escape. Some of his H/Q Staff, too. What a holy f*ck the Europeans are making of this Ukraine mess."




Donc CIA et DGSE auraient été évacués dans le même hélicoptère que d'autres officiers de l'unité Azov... (sachant que la CIA entraîne Azov depuis 1998). Précisons qu'on sait que l'un des survivants parle russe sans accent, ce qui ne laisse qu'un seul Français éventuellement survivant de l'appareil, la nuance est importante ici.

En effet, si les russes ont montré l'interrogatoire de l'Ukrainien, il n'a été donné aucune information sur le 2e survivant, ce qui est par définition suspect.

L'information concernant ces deux officiers des services français morts en Ukraine en compagnie des soldats d'Azov a même pris de l'ampleur, et je me suis dit que -si c'était vrai et s'ils n'ont pas survécu- Poutine disposait alors d'un sacré levier sur Emmanuel Macron, à savoir récupérer leurs corps et les rapatrier afin qu'ils puissent bénéficier d'un enterrement digne de ce nom (sans parler des autres conséquences).

Du coup, on comprend mieux la soudaine décision de Macron de virer sur le champ le général Eric Vidaud, patron de la Direction du Renseignement Militaire, la très vieillotte DRM.

La raison? La DRM avait donné de mauvaises infos à Macron (qui, sur cette base là donc, aurait pris la décision d'autoriser la DGSE d'envoyer des instructeurs aider les nazi "Azoviens" ?) ! Voilà qui va améliorer les relations entre Macron et les militaires français, sans parler du fait que cela revient à une sorte de déclaration de guerre à la Russie!

Mais voici la partie la plus importante:

Ne sachant s'il s'agissait d'une pure propagande russe (cette possibilité est logique, d'où mon emploi du conditionnel dans la première partie de cet article) ou si 2 officiers de la DGSE sont vraiment entre les mains des Russes, j'ai voulu vérifier l'information à tout hasard auprès de l'un de mes contacts historiques tôt le matin, à vrai dire sans grand espoir, vu le niveau de secret et de paranoïa dans lequel ce monde vit. Est-il exact que 2 officiers de la DGSE ont été tués en Ukraine?

Mon contact m'a rappelé bien plus tard ce week-end et m'a juste dit ceci: "OUI. J'en ai eu la confirmation. Et je ne peux pas vous en dire plus, vous comprendrez plus tard."
.

Ma traduction: soit les 2 sont morts, soit l'un a survécu mais il est dans un état grave.

En conséquence, Macron ne pourra plus trop traîner Vladimir Poutine dans la boue sur les médias, vu qu'il y a 2 hommes à récupérer, même s'ils sont morts (au moins un).

Et même si Poutine prend encore le président de la France au téléphone, ce qui est certain, c'est que Macron sera désormais forcé de se soumettre au président russe: il y a bien 2 officiers de la DGSE à récupérer pour les familles, sachant que un est éventuellement encore vivant mais gravement blessé.

Par extension de cette confirmation, alors il y aurait aussi dans le tas le général américain (mort ou vivant), et tout porte à croire que cela va être une sacrée négociation, vu le profil de Roger Cloutier qui est toujours à la tête du LANDCOM de l'OTAN de la base turque d'Izmir. S'il a été capturé ou tué, ce serait alors une tragédie pour Joe Biden, l'US Army, la CIA et l'OTAN !

"Allied Land Command formerly Allied Land Forces South-Eastern Europe (LANDSOUTHEAST) is the standing headquarters for NATO land forces which may be assigned as necessary (...) When directed by the Supreme Allied Commander Europe, it provides the core of the headquarters responsible for the conduct of land operations. The command is based at Sirinyer, Izmir in Turkey".

Ci dessous, sa prise de commandement des mains du général Thomson (avec une intro du général Walters) le 4 août 2020 à Izmir :




Lecteurs sur Apple IOS si vous ne voyez pas la video cliquez ce lien


Mais quelles que soient raisons, il est totalement irresponsable de la part d'Emmanuel Macron d'avoir envoyé des officiers de la DGSE sur un champ de bataille des Russes avec lesquels, à ce jour, nous sommes toujours en paix, au risque de déclencher des hostilités supplémentaires et, surtout, d'aggraver la situation.

PS: voici le lien pour la video de la télévision chinoise CGTN du lieu du crash via Alexander Bunin qui a écrit (en cyrillique) "????? ?????????? ?????????? CGTN ?? ??????? ??????? ? ????????? ??????????? ???, ? ??????? ?????????????? ?????????? ???????????? ????????? «????» ?????? ? ??? ??????? ??????????? ???????? DGSE.

PS2: ci-dessous, un lance roquette anti-char donné aux Ukrainiens par la France, pour ceux qui pensent que Macron ne fait rien pour les armer, aux côtés des Anglais, des Suédois, des Allemands, des Japonais, des Espagnols, etc.


 
 


photo: Laurent Courtois


PS3: En Syrie 13 instructeurs français avaient été capturés, mais ce fut le silence total des médias en France, seul le Telegraph de Londres avait abordé le sujet. 

Source : https://www.jovanovic.com/blog.htm

Notes sur le monstre nucléaire d’Ukrisis



• A l’occasion du “massacre de Boucha”, dont la responsabilité a été d’office attribué à qui l’on sait, sans nécessité d’enquête et d’appréciation, a été évoquée la possibilité d’un engagement direct entre l’OTAN (les USA) et la Russie, que Ukrisis a brutalement rendu possible et, pour certains même, souhaitable. • Il semble bien que nous n’y soyons pas encore, mais la poussée de psychologie folle qui se manifeste permet de constater que, pour ces esprits ainsi enfiévrés, la possibilité d’un conflit nucléaire n’est en rien une barrière infranchissable ni une folie impensable. • Cette possibilité fut pourtant cette barrière infranchissable et cette folie impensable qui, tout au long de la Guerre Froide, écartèrent le risque suprême de l’anéantissement réciproque. • Notre époque n’a plus cette sagesse. • Elle est emportée par un affectivisme dément et manifeste une “rage impotente” qui trouverait enfin son omnipotence si sa pression terrible nous menait à une telle extrémité. • Il reste possible, sinon assez probable, de résister à cette pression mais il n'est nullement indifférent de savoir qu’elle existe bel et bien.

6 avril 2022 (21H45) – Ce que nous nommons “monstre nucléaire” pourrait s’énoncer “retour du nucléaire”. C’est que nous connaissons actuellement avec Ukrisis, avec une suite de coup de boutoir communicationnel qui remettent au premier plan des commentaires suscités par cette terrible question : “Pourquoi pas jusqu’au nucléaire ?”. Cela se fait avec une aggravation constante du questionnement, le dernier épisode pouvant être résumé, chez les plus extrêmes avec pourtant certains présumés très sérieux, –  donnant cette remarque étrange : “Oui, pourquoi pas le nucléaire, mais cela ne sera pas ‘la même chose’ que précédemment...”.

Ce dernier point est manifeste puisqu’il est l’enfant monstrueux du monstrueux massacre de Boucha, dont on ne sait s’il ne s’agit pas après tout, tant les choses ont été très vite faite et maladroitement, d’une monstrueuse manipulation. Partir en guerre pour une “manipulation”, on a déjà vu et c’est même très courant ; mais pour la guerre nucléaire ?

Voici le début d’un texte de Caitlin Johnstone, repris par ‘ConsortiumNews’ le 4 avril. Elle reprend l’interview du professeur John Spencer, du Modern War Institute, sur MSNBC, le réseau TV le plus à gauche aux USA.

« Lors d’une  apparition dans l’émission ‘Velshi’ de MSNBC, John Spencer,  du Modern War Institute, a  explicitement préconisé un conflit militaire direct entre les États-Unis et la Russie en raison d'allégations de crimes de guerre dans la ville ukrainienne de Boucha.

» “Je suis prêt à m’engager en ce moment, – contrairement à ce que j’étais avant ce jour, – pour mettre les gens en contact direct avec la Russie, pour arrêter la Russie”,  a déclaré Spencer. “Appelez cela du maintien de la paix. Appelez ça comme vous voulez. Nous devons faire plus que fournir des armes. Et par ‘nous’, je veux dire les États-Unis. Oui, nous le ferons en coalition avec beaucoup d’autres, mais nous sommes l’exemple. Alors mettons des troupes au sol, envoyons nos systèmes d’armes directement à la Russie”.

» Remarquez la gymnastique verbale bizarre utilisée par Spencer pour obscurcir le fait qu'il prône une guerre chaude avec une superpuissance nucléaire : “mettre les gens en contact direct avec la Russie”, “envoyer des armes directement à la Russie”. Qui parle comme ça ? Il appelle l'armée américaine à tirer sur l’armée russe, il le dit juste très bizarrement.

» Pour être clair, ce n'est pas seulement un groupe de réflexion financé par l'industrie de l’armement qui dit cela ; le Modern War Institute  fait partie du département d’instruction militaire de l’Académie militaire des États-Unis, géré directement par le Pentagone .

» Interrogé par l'animateur de l'émission, Ali Velshi, sur ce qu'il pensait des avertissements selon lesquels une confrontation militaire directe avec la Russie pourrait conduire à une guerre nucléaire, Spencer  a déclaré : “C’est un risque énorme, je le comprends. Mais aujourd'hui, c’est différent”. »

Nous partions qu’en principe tout honnête homme bien informé sait de quoi l’on parle lorsque l’on parle de “guerre nucléaire”, guerre d’anéantissement de l’espèce, sans vainqueur ni vaincu, face qui induit dans l’extrême de sa logique à une complète et commune description... Mais nous n’avons peut-être pas raison avec ce “en principe”.

Il y a dans l’intervention de Spencer, qui n’est qu’un exemple parmi d’autres ces derniers jours, l’affirmation qu’il faut aller à une éventuelle guerre nucléaire selon un argument effectivement très bizarre, sinon complètement incongru et déraisonnable, sinon tout simplement lunatique :

« C’est un risque énorme [...] Mais aujourd'hui, c’est différent »

... Car en quoi une guerre nucléaire aujourd’hui est-elle différente d’une guerre nucléaire hier puisqu’une guerre nucléaire est par essence un phénomène de guerre absolue, puisqu’avec la possibilité de l’anéantissement ? Qu’est-ce que cela veut dire ? Qu’une guerre nucléaire après Boucha est une guerre nucléaire plus morale ? (Sans savoir de quoi Boucha est le nom, mais bon..) Que les morts d’une guerre nucléaire après Boucha sont beaucoup plus moraux que ceux d’une guerre nucléaire d’avant... ?

Certes et en plus, il y a le fait qu’il s’agit d’un universitaire d’une académie du Pentagone, et qu’il émet une opinion, de la possibilité/sinon de la nécessité de la guerre nucléaire selon un argument moral appuyé sur un événement extrêmement suspect, et de toutes les façons sans commune mesure dans ses effets et dans sa nature à tout ce qui précède dans le raisonnement. L’affectivisme, – car c’est bien de lui dont il s’agit, – tient, dans ce cas, de la démence pure... Et tant pis pour la morale, surtout lorsqu’on fait partie du gang américaniste-militariste qui n’a cessé de s’illustrer, de My-Lai à Panama City, à Belgrade, à Bagdad, à Faloujah, etc., sans parler de ses innombrables provocations et manipulation du phénomène ‘false flag’, en général pour pouvoir déclencher une guerre “morale” (plutôt que “guerre juste”, concept dont il faut se garder si l’on n’a pas Thomas d’Aquin comme conseiller spécial du Pentagone, rétribué par Lockheed-Martin...)

Cela nous conduit à l’observation du phénomène de “relativisation” et “d’abêtissement” du phénomène absolu qu’est la guerre nucléaire. Cette subversion du concept passant du relatif à l’absolu est la marque de fabrique de l’affectivisme comme démarche subversive de l’esprit postmoderne. Des esprits les plus soi-disant sérieux en sont affectés comme les autres, – nous voulons dire : plus, bien plus que les autres...  

Le nucléaire et la mémoire courte

Un point important des diverses situations d’affrontement militaire que nous avons connues depuis la fracture de 1989-1991 a été la quasi-disparition du facteur de la possibilité de la guerre nucléaire qui fut le fondement conceptuel de la Guerre Froide. Ce facteur terrifiant écrasa les relations stratégiques pendant la période et eut la vertu paradoxale d’engager les deux principaux rivaux, les deux superpuissances, à une prudence extrême, voire à une coordination réelle pour ne pas risquer d’atteindre ce niveau de quasi-anéantissement réciproque. Ceux qui vécurent avec cette condition absolue (et nous en fûmes, sans aucun doute) en ont gardé la trace, et ils eurent beaucoup de mal :
1) à imaginer qu’on puisse n’en plus tenir compte d’une façon absolument impérative réglant tout le reste ; et
2) à envisager l’idée qu’on puisse se lancer, somme toute le cœur léger et la communication moralinesque en bandouillère dans des conditions puis des conflits où un affrontement USA-Russie deviendrait une possibilité extrêmement concevable, voire pire encore.

Mais bon, nous ne fûmes bien sûr pas les seuls dans ce cas. On donnera ici, d’un texte du 17 mars 2022 de Tom Engelhardt (« Cold War II or World War III? »), une description de ce phénomène de perception à propos de l’Ukraine (qui s’est encore aggravé avec la poussée d’irrationalité du massacre’ de Boucha). Il faut signaler qu’Engelhardt, sur son site fameux ‘Tomgram.com’, est un commentateur très nettement de gauche, qui fut un opposant résolu à Trump et qui, bien sûr, s’élève avec vigueur contre l’action militaire russe en Ukraine. (On le voit, par exemple, à la description qu’il fait du sort des centrales nucléaires ukrainiennes, épousant complètement la narrative occidentale, depuis largement mise en question comme il l’est en général des narrative américanistes-occidentalistes.) Mais ses réflexions reprises ici ne sont nullement idéologiques, elles sont psychologiques et concernent la perception radicale et écrasante (la deuxième destruction de l’humanité qu’il évoque est la catastrophe climatique, qui ne fait aucun doute pour lui, mais qui n’est plus la priorité) :

« ...Ce qui me ramène à Vladimir Poutine. Ce qui est étrange avec cette autre forme de suicide planétaire qu’est l’armement atomique, c'est que, depuis au moins la fin de la guerre froide, elle n’est généralement pas sur la table (pour ainsi dire) ou dans les nouvelles.  Certes, pendant les années Trump, le président a implicitement menacé de faire pleuvoir l'enfer nucléaire sur la Corée du Nord, – il a parlé de "feu et de fureur”, – et, à un moment donné, il a évoqué la possibilité de mettre fin à la guerre d'Afghanistan par une telle frappe, mais la plupart du temps, de 1990 à hier soir, les armes nucléaires (l'Iran, qui n'en possédait pas, mis à part) ne faisaient tout simplement pas partie de la conversation. [...]

» Alors que toute cette activité est en cours depuis longtemps et suscite remarquablement peu d'attention, les armes nucléaires, – et les possibilités apocalyptiques – ont à nouveau fait les gros titres grâce à Vladimir Poutine. Après tout, alors que ses troupes se dirigeaient vers l'Ukraine, il a soudainement et très publiquement émis une directive mettant ses forces nucléaires en “alerte élevée” et a offert ce joyau au monde :

» “Quiconque tente de nous entraver, et plus encore, de créer des menaces contre notre pays, contre notre peuple, doit savoir que la réponse de la Russie sera immédiate. Et elle vous conduira à des conséquences telles que vous n'en avez jamais rencontrées dans votre histoire.”

» Pour rendre son propos encore plus clair, il a rapidement supervisé le lancement test de quatre missiles balistiques à capacité nucléaire. Étant donné que les États-Unis disposent toujours d'un grand nombre d'armes nucléaires tactiques basées en Europe, considérez que nous sommes à nouveau, comme lors de la première guerre froide, sur le qui-vive et dans une impasse nucléaire. Pendant ce temps, en Ukraine, les Russes menacent de répéter la catastrophe de Tchernobyl en s'emparant des centrales nucléaires qu'ils ont installées et entretenues en temps de guerre dans un feu d'horreur.  L'une d'entre elles a déjà été capturée dans des circonstances effrayantes.

» Avec le recul, le plus étrange est peut-être que la plupart des Américains, et peut-être même la plupart des habitants de la planète, ont pratiquement oublié la menace nucléaire. Rétrospectivement, on peut se demander comment cela a pu être possible, surtout si l'on a mon âge et que l’on se souvient de l’apprentissage de protection à l'école, lors d’exercices répétés d’attaques nucléaires, alors que les médias de l’époque se demandaient si les gens devaient partager leurs abris nucléaires personnels avec leurs amis et voisins. Et n’oubliez pas que c'était à l'époque où, en réalité, les armes nucléaires russes ne pouvaient pas encore atteindre notre pays (alors que les États-Unis avaient déjà la capacité de dévaster le monde communiste).

» Voici donc une étrange ironie : pendant les années où nous étions le plus attentifs, ils n’auraient rien pu nous faire. Une fois qu’ils ont vraiment eu la capacité de faire, nous avons essentiellement commencé à oublier ces armes. Ainsi, aujourd'hui, la destruction potentielle de l'humanité est de nouveau sur la table ; – et cette fois-ci, de manière assez brillante, de deux manières différentes. »

La “rage impotente”

Nous pensons sans originalité que cette question de l’emploi du nucléaire a, du côté du bloc-BAO, essentiellement à voir avec la psychologie, et une psychologie exacerbée, complètement indifférente à toute raison et à toute mesure. Il s’agit du produit de ce que Larry Johnson nomme la “rage impotente”, dans ce passage d’un texte où il explique les réactions de ceux qui espéraient que le “massacre de Boutca” conduirait à une entrée en guerre de l’OTAN. (Et Johnson, lui, ne doute pas une seconde que le “massacre” fut un ‘false flag’ organisé.)

« Connaissez-vous l'expression “rage impotente” ? C'est ce que vivent actuellement les États-Unis et leurs alliés de l'OTAN. Je soupçonne que les informateurs qui ont aidé les Ukrainiens à organiser le massacre de Boutca comptaient sur un raz-de-marée de rage pour pousser l'OTAN à agir. Mais cela ne s'est pas produit. Au lieu de cela, l'Europe a opté pour de nouvelles paroles de colère et des sanctions économiques qui vont à l'encontre du but recherché. »

Cette “rage impotente”, ou “rage impuissante” si l’on veut, marque dans l’esprit de ceux qui veulent à tout prix impliquer directement l’OTAN, cette démarche psychologique qui, d’une façon presque absolue, ignore complètement la question du nucléaire. C’est bien en revenir à la remarque du “c’est différent” (« C’est un risque énorme [...] Mais aujourd'hui, c’est différent »), qui signifie finalement, si l’on veut bien être un peu rude dans la traduction : la “question” de la guerre nucléaire n’existe plus, seule existe la nécessité de réagir à mesure de l’horreur absolue de cet acte de massacre tel qu’on le perçoit, tel qu’il est décrit, voire tel qu’il est fabriqué et simulacré justement pour activer cette “rage impotente” ; une sorte de cercle vicieux si l’on veut, dont le seul verrou à faire sauter pour en sortir, celui de la logique extrême puisqu’il s’agit d’arriver à une confrontation Russie-USA (via OTAN), ouvrirait la voie inévitablement vers ce qui devrait être au terme une confrontation nucléaire.

On ne s’interroge même plus, notamment comme le font avec brio un Scott Ritter et un Joe Lauria, comment défaire l’imbroglio de Boucha, en prenant en compte les divers éléments qui font fortement douter de la culpabilité russe, puisque, comme l’écrit Lauria :

« ...lorsqu’il s’agit de guerre, les nations occidentales se dispensent du besoin d'enquêtes et de preuves et prononcent une culpabilité fondée sur des motifs politiques : la Russie est coupable. Affaire classée. »

Ce qui importe désormais, c’est de rendre omnipotente cette “rage impotente”, et donc d’utiliser tous les outils disponibles pour cela. L’outil suprême est-il le nucléaire ? Eh bien, l’on envisagera sans vraiment d’interrogation, ni même peut-être d’hésitation, de l’employer, c’est-à-dire d’arriver à une situation de confrontation nucléaire. La “rage impotente” qui anime l’affectivisme moraliste affirmant l’empire de la morale et la punition de tous ceux qui sont dans le camp du mal, cette rage domine tout le reste. C’est elle qu’il faut satisfaire, ce qui correspond parfaitement à l’idéologie dominante où la nature doit se plier à nos exigences, où les conditions d’anéantissement de l’arme nucléaire doivent se conformer à l’oukase de la morale, – c’est-à-dire en ne tuant que les “méchants”, mais par centaines de millions si l’on veut, et l’on voudrait bien parbleu !

Ainsi entend-on mater le monstre nucléaire, ainsi le “monstre nucléaire” tend à n’être plus ce qu’il fut, ce processus d’anéantissement réciproque. Nous caricaturons à peine, car il nous semble bien que c’est cette voie, cette façon de penser, que suivent de plus en plus lestement et la vertu au cœur, les cohortes de nos zélotes bellicistes. C’est cette psychologies qui conduit à considérer de moins en moins le nucléaire comme quelque chose qui est à part, une Matière furieuse qui contient la Fin des Temps, cet “éclair plus clair que mille soleils” et le « Maintenant nous sommes tous des fils de pute » dit par Bainbridge à Oppenheimer... Tiens, lisez ceci :

« Assistant à l’explosion de Trinity, la première bombe atomique, le 17 juillet 1945, James M. Farrel nota pour son compte-rendu officiel : “Les effets lumineux défièrent toute description. Tout le paysage fut illuminé par une lumière écrasante d'une intensité plusieurs fois supérieure à celle du soleil de midi. Elle était dorée, mauve, violette, grise et bleue. Elle éclaira chaque pic, crevasse et crête de la chaîne de montagne voisine avec une clarté et une beauté qui ne peut être décrite mais doit être observée pour être imaginée... ” Bainbridge dit à Oppenheimer : “Maintenant nous sommes tous des fils de pute.” Oppenheimer dit qu’il avait pensé à ce verset du Bhagavad-Gita : “Si dans le ciel se levait tout à coup la Lumière de mille soleils, elle serait comparable à la splendeur de ce Dieu magnanime...” Plus tard, en 1965, pour la constitution des Atomic Archives, il précisa longuement en modifiant d’une manière significative la citation, passant de l’illusion de l’éclair à la pénombre de la méditation au bord des abysses du Mordor :

» “Nous savions que le monde ne serait plus le même. Certains ont ri, certains ont pleuré. La plupart étaient silencieux. Je me suis souvenu d'une ligne du texte hindou, le Bhagavad Gita ; Vishnou essaye de persuader le Prince de faire son devoir et, pour l‘impressionner, prend son apparence aux multiples bras et lui dit : ‘Maintenant je suis la Mort, le destructeur des mondes’. Je suppose que nous avons tous pensé cela, d’une façon ou d'une autre”. »

On suppose que tout cela ne fait plus le poids devant les numéros inspirés de Zelenski, qualifiés d’héroïque par les grandes stars d’Hollywood (qui préparent des films, certes). Il n’est bien entendu nullement assuré que la “rage impotente” l’emporte et déclenche le feu des “mille-soleils”. Mais elle essaiera jusqu’au bout, à chaque occasion. Il faut savoir tout de même que l’ignorance et l’irresponsabilité des zombies ont conduit les récipiendaires de ces traits de caractère de la modernité-agonisante au terme de leur voyage et que les susdits zombies profiteront de la moindre occasion pour tenter d’allumer ce feu du ciel.

Source : https://www.dedefensa.org/article/notes-sur-le-monstre-nucleaire-dukrisis

Guerre en Ukraine. Tout ça pour ça ?

 6 Avril 2022

D'un strict point de vue analytique, il était possible de dire jusqu'à la dernière quinzaine que, malgré quelques couacs retentissants, l'intervention russe en Ukraine suivait bon an mal an son chemin.

Certes, première bourde majeure du renseignement, la population et surtout l'armée ukrainiennes ne s'étaient pas retournées contre le gouvernement. Les historiens du futur se pencheront sans nul doute sur la chose mais il ne faut pas être grand clerc pour deviner une magistrale opération d'enfumage de la part de quelques généraux ukrainiens envers leurs contacts du FSB, promettant monts et merveilles aux futurs envahisseurs avant de retourner leurs armes contre eux. C'est vraisemblablement ce qui s'est passé autour de Kiev aux premiers jours de la guerre (fiasco de l'opération aéroportée de Gostomel).

Certes, avec une naïveté désarmante, le Kremlin n'avait visiblement pas prévu la force de la réaction occidentale et des sanctions subséquentes, la meilleure preuve étant le gel des réserves de la banque centrale russe détenues à l'étranger. Si cette mesure de rétorsion inédite est un véritable suicide à moyen terme pour le système financier impérial, il n'est reste pas moins que l'amateurisme de Moscou, qui avait laissé une partie de ses actifs à portée de sanction, laisse rêveur. [A moins, diront certains jusqu’au-boutistes, que le plan consistait justement à sacrifier ces actifs pour montrer à la face du monde que le système financier occidental n'est plus digne de confiance.]

Certes, les Ukrainiens résistaient avec acharnement sur certains points - Kharkov, Soumy, Tchernihiv, région de Kiev - bloquant sérieusement l'avancée russe. Plutôt bien armées, à la fois avec du matériel russe et otanien, les forces ukrainiennes bénéficiaient en outre de l'imagerie satellite américaine en temps réel, ce qui changeait évidemment la physionomie des combats et expliquait les pertes assez lourdes du côté russe.

Certes, ces contretemps, ces boulettes dans la préparation de la guerre, ces erreurs de jugement parfois grossières (une première depuis que Poutine est au pouvoir) avaient mis à mal le plan A des Russes, à savoir une victoire rapide et le renversement non moins rapide du marigot kiévien. M'enfin, le plan B suivait son cours...

L'ours continuait à détruire méthodiquement l'infrastructure militaire adverse et, malgré son infériorité numérique, à grignoter lentement mais sûrement la moitié orientale de l'Ukraine, à l'est de la ligne Kiev-Odessa. Voici la carte que nous publiions le 13 mars :

Bien que partiellement erronée - dans le nord-est où les Russes ne contrôlaient en réalité pas tout le territoire hachuré, notamment Tchernihiv qui leur résistait - cette carte du ministère français des Armées donnait le ton général. Encore quelques semaines et le Dniepr serait atteint, l'Ukraine "utile" (agricole et industrielle) occupée, les infrastructures essentielles (ports et centrales nucléaires) contrôlées.

Un mois plus tard, la situation est presque inversée : tout le nord-est, conquis au prix de lourdes pertes, a été évacué.

Les raisons officielles et officieuses s'entremêlent :

- Faire preuve de bonne volonté en vue des négociations de paix.

Un vœu qui risque de devenir pieux après le massacre de Boucha, justement dans la zone évacuée. Même s'il faut rester prudent, on ne sera pas étonné que beaucoup d'éléments ne collent pas avec la version serinée urbi et orbi. En d'autres temps, votre serviteur aurait décortiqué l'événement en détail mais là n'est pas le propos du billet. Ce qui importe, c'est que les têtes pensantes de Moscou n'aient une nouvelle fois rien vu venir alors que tout indiquait depuis le début de la guerre que Kiev et ses parrains étaient prêts à tout type de provocation/false flag/intox...

- Réaffecter les forces sur le Donbass.

Il est vrai qu'entre les nombreuses erreurs de jugement, la tactique parfois folklorique et les ressources très insuffisantes allouées au siège de Kiev, les troupes russes ont fini par y devenir inutiles. Mais c'est tout de même un indéniable aveu d'échec, d'autant que tout le saillant entrant dans le ventre mou de l'ours est également évacué.

Aucun analyste militaire ne comprend d'ailleurs vraiment l'approche des Russes, mélange de guerre light et d'incohérences. Hier par exemple, au trente-neuvième jour du conflit, ils en étaient encore à bombarder plusieurs dépôts de carburants de l'armée ukrainienne, question qui aurait normalement dû être réglée dans les premières 48 heures.

L'on se demande comment une guerre aussi existentielle pour Moscou a pu être aussi mal planifiée et menée avec une telle désinvolture. Hybris, sentiment de supériorité mal placé, fiasco du renseignement ? Internationalement, le crédit militaire tiré de l'intervention en Syrie a en tout cas été fortement dilapidé.

Sur le plan diplomatique, Poutine donne la curieuse impression de s'être fait balader par Zelensky. Pire, les faits l'ont même forcé à s'aligner sur Biden. En février, Joe l'Indien déclarait qu'une  incursion russe sur la question du Donbass n'entraînerait pas forcément une réaction occidentale très virulente. Aujourd'hui, du fait des aléas de la guerre, l'ours en est effectivement réduit à se concentrer finalement sur le Donbass, mais après avoir cueilli au passage des tonnes de sanctions pour son invasion ratée sur le reste du territoire.

Certes, les Russes peuvent se prévaloir de contrôler le sud de l'Ukraine, mais que vont-ils en faire ? C'est un moyen de pression sur Kiev mais, stratégiquement parlant, ces régions méridionales n'ont aucune valeur en tant que zone tampon. Et après-guerre, les russophones et plus généralement tous ceux soupçonnés d'avoir collaboré avec l'occupant risquent même d'être ciblés par les nationalistes ukrainiens (c'est peut-être d'ailleurs ce qui s'est passé à Boucha).

A ce titre, on voit que l'objectif de dénazification n'est que partiellement atteint. Si des milliers de azovites ont passé un bien mauvais quart d'heure à Marioupol, la milice (et les autres) reste active dans le reste du pays. Nul doute que la guerre actuelle va remplir leurs écoles de recrutement pour les années à venir...

Et si la démilitarisation et la dé-otanisation de l'Ukraine sont toujours sur la table, la position de force des Russes pour les imposer dans les négociations est peut-être moins évidente aujourd'hui vu les erreurs/revers sur le terrain ces deux dernières semaines.

A Moscou, beaucoup doivent maintenant se demander si le jeu en valait vraiment la chandelle. En 2014, Poutine aurait pu prendre le Donbass tout entier en quelques jours s'il l'avait décidé. Huit ans plus tard, il se retrouve exactement dans la même position, mais face à une opposition incommensurablement plus combative, au prix d'une perte de prestige international et d'une rupture durable, presque irréparable avec le Vieux continent, mettant de facto fin au Grand jeu sur la case ouest de l'échiquier eurasien.

Tout ça pour ça ?

Source : https://www.chroniquesdugrandjeu.com/2022/04/tout-ca-pour-ca.html?

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