source : http://www.chroniquesdugrandjeu.com/2015/12/syrak-brule-t-il.html
Flambée de tension au Moyen-Orient qui se rapproche dangereusement de la ligne rouge.
Contrairement à ce que nous annoncions il y a deux jours, la Turquie n'a pas (encore ?) retiré ses troupes entrées illégalement en Irak, provoquant la fureur de Bagdad qui se joint d'ailleurs maintenant à la Russie et à l'Iran pour accuser Ankara de bénéficier du pétrole de Daech. La Ligue arabe dénonce le déploiement tandis que le gouvernement irakien donne 24 heures aux Turcs avant de saisir le Conseil de sécurité de l'ONU. Si l'affaire arrive jusque-là, il sera très intéressant de voir la réaction des trois alliés otaniens de la Turquie - USA, France et Royaume-Uni. Défendre l'illégalité de l'intrusion turque serait extrêmement embarrassant, particulièrement pour les Etats-Unis dont l'Irak est théoriquement l'allié, et enverrait un signal ô combien négatif dans la région. Laisser le couple russo-chinois condamner la Turquie à l'ONU risquerait de mettre très à mal la crédibilité de l'OTAN. Entre la peste et le choléra, que choisiront les pompiers-pyromane ? Encore une fois, le déconcertant sultan a mis ses amis dans une situation pénible.
Mais la dispute autour des troupes turques pourrait aller bien plus loin. Le chef du Comité parlementaire irakien pour les questions de défense et de sécurité, un certain Zamili, dont l'influence ainsi que les liens avec l'Iran et les milices chiites sont connus de tous, menace de faire appel à la Russie pour expulser les Turcs ! Il serait cocasse que Moscou et Ankara s'affrontent en Irak après avoir si difficilement évité la collision en Syrie suite à l'incident du Sukhoi...
Et puisque nous parlons des tensions russo-turques, elles sont loin de s'apaiser, avec une possible nouvelle crise internationale, sur les détroits cette fois. Selon le traité de Montreux de 1936, le Bosphore et les Dardanelles sont ouverts à la navigation internationale ; Ben Erdogan ne peut donc stopper les bateaux russes qui continuent de faire voile vers la côte syrienne en provenance de la Mer noire. Voulue ou non, la provocation d'aujourd'hui a mis le sultan dans tous ses états. Alors que le Caesar Kunikov passait entre les deux rives d'Istanbul, un soldat russe a délibérément épaulé un lance-missile au vu et su de tous.
Fureur en Turquie où l'ambassadeur russe a été convoqué (ça devient une habitude ces derniers temps) et que certains ministres accusent Moscou de violer le traité de Montreux. Après avoir tué deux pilotes russes, le sultan s'attendait sans doute à voir les marins du Kunikov lancer des pétales de rose... A propos de fleurs (et d'autres produits), les sanctions russes risquent de coûter0,3% à 0,4% au PIB turc voire plus dans le pire des scenarii. De quoi enrager encore plus le grand mamamouchi dans son immense palais d'Ankara...
Comme si tout cela ne suffisait pas, Damas accuse les Etats-Unis d'avoir commis "un acte d'agression" en bombardant (pour la première fois depuis 2011 !) ses troupes, tuant trois soldats syriens à Deir-ez-Zor. L'US Air force a nié les faits. Ce n'est certainement pas l'aviation russe et l'EI n'a pas d'avions, alors qui ? En attente de plus amples informations, trois cas possibles :
- mensonge de Damas. Ce qui impliquerait qu'Assad se sent de plus en plus sûr de ses forces et du soutien russo-iranien pour provoquer ainsi les Américains. Peu probable.
- mensonge de Washington et bombardement par erreur. Une bourde n'est en effet pas impossible, c'est le scénario le plus probable.
- mensonge de Washington et bombardement intentionnel, ce qui n'est ni plus ni moins qu'un acte de guerre. Peu probable.
Précisons que, comme nous l'avions vu il y a quelques jours, les S400 russes déployés suite à l'incident du Sukhoi ne couvrent pas la Syrie orientale où se trouve justement cette poche de résistance de Deir-Ez-Zor. Par contre, les radars ont sans doute tout vu.
Comme pour l'incursion turque en Irak, comme pour la mini-crise des détroits, nous en saurons plus ces prochaines heures ou ces prochains jours. Une chose est sûre : le Moyen-Orient est au bord de l'ébullition.
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