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jeudi 18 août 2022

Ukrisis en suspens

source : https://www.dedefensa.org/article/ukrisis-en-suspens

 17 août 2022 (20H55) – ... Quand le titre dit “en suspens”, cela signifie “en attente” de quelque chose, et cela dans une atmosphère étrange, en suspension si vous voulez, attendant que l’Éole des grands événements se décide à souffler dans la direction choisie par les dieux. Le fait est que je perçois la guerre d’Ukrisis, non pas encalminée, non pas stagnante, mais plutôt dans une immobilité symbolique pleine de tensions souterraines, qui définit bien cette attente.

Je réalise cette sensation que j’éprouvais si vaguement et sans vraiment m’y arrêter, à la lecture d’une page du blog de Andrei Martyanov du 16 août. D’abord, Martyanov nous donne un extrait d’une dépêche de Tass (d’abord en russe, qu’il traduit en anglais, restituée ici en français)

« Les planificateurs occidentaux ont pratiquement fait une croix sur le régime de Kiev et planifient déjà la partition de l'Ukraine, a déclaré le porte-parole du Service de renseignement extérieur, le colonel-général Vladimir Matveev, lors de la Conférence de Moscou sur la sécurité internationale. “De toute évidence, l'Occident ne se préoccupe plus du sort du régime de Kiev. Comme le montrent les informations reçues par le SVR, les planificateurs occidentaux l'ont presque passé par pertes et profits et sont en train d'élaborer des plans pour la division et l'occupation d'au moins une partie des terres ukrainiennes”, a-t-il déclaré. Toutefois, selon le général, l'enjeu dépasse largement l'Ukraine : pour Washington et ses alliés, il s'agit du sort du système colonial de domination mondiale. »

Ensuite, Martyanov poursuit en commentaire, qui renvoie à d’autres détails de l’intervention du porte-parole du SVR :

« Parmi les nombreuses choses que Matveev a exposées, l'une d'entre elles s’impose particulièrement, à savoir le détachement des États-Unis de la réalité et leur approche dogmatique de leurs anciennes possessions coloniales, qui se réduisent aujourd'hui à l'Europe. Cela explique la dissonance cognitive des États-Unis qui créent de plus en plus de chaos dans des tentatives désespérées de préserver une domination mondiale déjà perdue. Comme le dit Matveev (en russe), une telle approche est risible mais aussi dangereuse. Il a résumé cette attitude en utilisant cette image : “L’Occident s’affaiblit, il trébuche mais se croit toujours puissant...”, ce qui est tout à fait vrai si l'on considère non seulement ce que l'Occident combiné fait mais aussi qui est à la barre. Il s’agit donc d'un ensemble très intéressant de déclarations du SVR. »

Tout cela est dit alors que les événements militaires en Ukraine semblent figées, ou plutôt ne “bénéficient” plus d’une publicité importante. Il y a pourtant deux points d’agitation, très spécifiques, très spectaculaires et très dangereux.

• Les affrontement autour du site de la centrale nucléaire de Zaporozhye, marqués hier par des tirs de plusieurs missiles ukrainiens dont on discute bien entendu avec fièvre pour savoir si ce sont les Ukrainiens qui attaquent les Russes, ou bien les Russes qui attaquent des Ukrainiens pro-russes au milieu de soldats russes, sans doute pour le panache. Le risque, selon les Ukro-Russes parlant sans autorisation du département d’État, notamment Vladimir Rogov, membre de l'administration du gouvernement local, est qu’un coup au but sur le système de refroidissement aurait des conséquences apparentant ses effets à une “arme nucléaire sale”.

« “L’un des missiles guidés a frappé à seulement dix mètres" des barils contenant le combustible nucléaire usé, a déclaré Rogov à Soloviev Live. “D'autres ont frappé un peu plus loin, à 50 ou 200 mètres”.

» Le site de stockage étant à l'air libre, toute frappe entraînera la libération de déchets nucléaires de plusieurs dizaines à plusieurs centaines de kilogrammes et la contamination de la zone, a expliqué le fonctionnaire. “En langage clair, ce serait comme une bombe nucléaire sale”, a déclaré Rogov.

» Si le réacteur lui-même ne peut être détruit qu'avec une arme nucléaire tactique, les systèmes de refroidissement et le stockage des déchets sont beaucoup plus vulnérables et leur endommagement pourrait facilement provoquer une catastrophe, a précisé le responsable. Les troupes ukrainiennes ont déjà tiré “plusieurs dizaines” de projectiles lourds sur les systèmes de refroidissement, a ajouté M. Rogov. Si elles parviennent à désactiver un tel système, cela pourrait provoquer une fusion plus importante que la catastrophe de Tchernobyl en 1986. »

• Il y a aussi les événements en Crimée (explosions, dont l’une reconnue comme un sabotage par les Russes), et particulièrement des menaces contre le pont de Kerch, entre la Crimée et la Russie continentale. La dernière interprétation est que cette attaque serait la contre-attaque ukrainienne contre Kherson, promise et non tenue. Explication d’un vrai officiel ukrainien...

« Le pont russe de Crimée, la plus grande structure de ce type en Europe, “devrait être détruit”, a averti un collaborateur du président ukrainien Vladimir Zelensky. “C'est une construction illégale et le principal point d'accès pour approvisionner l'armée russe en Crimée”, a déclaré Mikhaïl Podolyak au Guardian mardi, expliquant pourquoi Kiev veut l'attaquer. [...]

» [Concernant les deux explosions en Crimée], Kiev n'a pas officiellement revendiqué les incidents, mais de nombreux responsables ukrainiens ont laissé entendre que c'était le cas, Podolyak suivant le modèle dans son interview avec le journal britannique.

» “Je suis certainement d'accord avec le ministère russe de la défense, qui prévoit d'autres incidents de ce type dans les deux ou trois prochains mois. Je pense que nous pourrions en voir davantage”, a-t-il noté.

» L'assistant du président ukrainien a qualifié les attaques clandestines présumées de “contre-offensive”, de nature différente du type d'action militaire habituellement décrit par ce terme. “Une contre-offensive ukrainienne est très différente [d'une contre-offensive russe]. Nous n’utilisons pas les tactiques des années 60 et 70, du siècle dernier”, a-t-il affirmé. Le Guardian a suggéré que Podolyak avait peut-être tacitement admis l'incapacité de l'Ukraine à rassembler des troupes et des armes pour une véritable contre-offensive contre les troupes russes sur le champ de bataille. »

Supputations & interprétations...

Une fois écartées toutes les scories des simulacres extraordinaires qui enveloppent les événements militaires en Ukraine, il resterait certaines hypothèses expliquant aussi bien les incidents sur les deux points détaillés, que les affirmation du SVR. Dans les deux cas, il s’agit d’actions politiquement très hasardeuses, qui ont de fortes possibilités jusqu’à l’extrême de la certitude, d’être considérés par les Russes comme des casus belli impliquant des frappes de décapitation contre l’Ukraine, voire des frappes contre des objectifs alliés (de l’OTAN). Il est probable que les Russes commenceraient par les premiers et, selon les réactions des pays de l’OTAN, y ajouteraient ou non la seconde option.

Dans l’hypothèse générale évoquée, il est très possible, sinon probable que l’équipe Zelenski, se sente effectivement beaucoup moins soutenue par l’Ouest depuis plusieurs semaines, notamment (en dernière instance), du fait de son incapacité de lancer une contre-offensive sur Kherson. Elle pourrait alors envisager ces deux options (Zaporozhye et/ou Kerch) pour brutalement dramatiser le conflit et obliger l’Ouest (les USA) à y rester, à continuer à la soutenir, voire à entrer dans le conflit. Le cas du pont de Kerch est particulièrement ambigu puisqu’il est, même selon la logique-Zelenski, au moins autant à la Russie qu’au Zelenskistan.

De toutes les façons, les deux menaces sont du type catastrophique, apte à enflammer le conflit à un niveau beaucoup plus haut que celui où il se trouve actuellement. Un tel événement trouverait les Russes dans un état d’esprit multiplié d’intransigeance tandis que les USA flottent dans une ‘cinetic diplomacy’ démente et sans beaucoup de moyens militaires ni aucun lien avec la réalité, – là-dessus, le SVR ne se trompe certainement pas. (Même chose pour certains Européens, sans aucun doute, notamment les Français du Macronistan qui s’avèrent être d’un niveau inimaginable de bassesse soumise et de sottise arrogante.)

Un tel scénario est une voie royale pour une extension maximale, du conflit certes, mais parallèlement, et de mon point de vue beaucoup plus rapidement que le conflit lui-même, extension maximale des crises internes, aussi bien de la pseudo-“coalition” du bloc-BAO que des pays le composant. Un moyen d’éviter une telle issue est la liquidation de l’équipe Zelenski par les Occidentaux, ce qui demande une certaine unité d’action au moins aux USA (entre les diverses factions), ou bien un coup d’éclat de l’un ou l’autre centre de pouvoir (la CIA, jusqu’ici très discrète et dont on dit que le directeur Burns aurait une action personnelle importante après des Russes).

Les tout récents nouveaux-déboires du SBU indiquent qu’il existe une opposition au sein du régime qui peut jouer un rôle dans cette orientation intra-démocratique... D’autre part et inversement, Zelenski dispose d’une telle surface hystérico-médiatique établie par le déchaînement du simulacre de la presseSystème et des élites du même bord que son élimination constituerait une opération extrêmement délicate, qui peut alimenter un peu plus la détérioration du climat dans le monde américaniste-européaniste.

Pendant ce temps, les liens entre Chinois et Russes, diplomatiquement et militairement, ne se sont jamais mieux portés.

mercredi 20 juillet 2022

Lavrov. Donner des armes à longue portée à l’Ukraine conduira à ce que le pays perde plus de territoire

 

Par Moon of Alabama – Le 20 juillet 2022

Aujourd’hui, le ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russie, Sergei Lavrov, a annoncé les terres ukrainiennes que la Russie a l’intention de capturer.

Cela dépendra de la portée maximale des armes que l’Ukraine aura sous son contrôle.

Via RIA Novosti (traduction automatique) :

Lavrov : les livraisons d’armes à longue portée à Kiev vont étendre la portée géographique de l’opération spéciale

MOSCOU, 20 juillet – RIA Novosti. Si l’Ukraine reçoit des armes à longue portée des pays occidentaux, alors l’envergure géographique de l’opération spéciale des troupes russes changera, a déclaré le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, dans une interview avec Margarita Simonyan, rédactrice en chef de RT et du groupe de médias Rossiya Segodnya.

« Le président a dit très clairement, comme vous l’avez cité – dénazification, démilitarisation dans le sens où il n’y a pas de menaces pour notre sécurité, de menaces militaires à partir du territoire de l’Ukraine, cette tâche reste encore à faire« , a souligné le ministre.

Dans le même temps, il a rappelé que lors de la réunion des négociateurs à Istanbul à la fin du mois de mars, la situation sur cette question était sensiblement différente.

« Maintenant, la géographie est différente. C’est loin d’être seulement la RPD et la RPL, c’est aussi la région de Kherson, la région de Zaporozhye et un certain nombre d’autres territoires, et ce processus se poursuit, et se poursuit de manière constante et persistante« , a ajouté le chef de la diplomatie russe.

Il a souligné qu’au fur et à mesure que l’Occident, dans une rage impuissante ou dans un désir de rendre la situation aussi mauvaise que possible, expédie de plus en plus d’armes à longue portée en Ukraine, par exemple des HIMARS, les objectifs géographiques de l’opération spéciale s’éloigneront encore plus de la ligne actuelle.

« Parce que nous ne pouvons pas permettre à la partie de l’Ukraine que Zelensky contrôlera, ou à celui qui le remplacera, de disposer d’armes qui constitueront une menace directe pour notre territoire et le territoire des républiques qui ont déclaré leur indépendance, celles qui veulent que leur avenir soit décidé par elles-mêmes« , a-t-il conclu.

Note à Washington : Si vous livrez des missiles HIMARS à l’Ukraine avec une portée étendue (300 km au lieu de 80 km), la Russie devra s’enfoncer davantage en Ukraine pour sécuriser ses propres frontières et celles des républiques du Donbass.

Cette décision fait suite aux appels lancés en Ukraine pour que des missiles HIMARS à portée étendue frappent le pont de Kertch, celui qui relie la Crimée à la Russie. Le point le plus proche de la zone que l’Ukraine détient encore se trouve à environ 260 kilomètres du pont.

Des rumeurs indiquent que l’Ukraine aurait déjà reçu de tels missiles. Via Naked Capitalism :

Zelensky ordonne aux troupes de tenir Siversk malgré de lourdes pertes, purge davantage de fonctionnaires ; Poutine à Téhéran – Alexander Mercouris.

Notez en particulier qu’à partir de 10:10, Mercouris rapporte que le responsable de la RPD, Eduard Barsurin, a déclaré que l’Ukraine avait reçu des missiles HIMARS d’une portée de 300 km. L’Ukraine a clairement indiqué qu’elle avait l’intention de frapper des cibles en Crimée, que la Russie considère comme territoire russe, notamment le pont de Kertch. Mercouris pense qu’il faudrait un très grand nombre de missiles pour y parvenir, plus que ce dont dispose actuellement l’Ukraine, mais toute frappe sur la Crimée entraînerait des représailles très fortes de la part de la Russie. L’Ukraine est en train de fumer quelque chose de fort si elle pense que cela amènera l’Occident à faire beaucoup plus pour elle qu’il ne le fait actuellement.

Mercouris a tort lorsqu’il affirme que le missile HIMARS à longue portée n’aurait qu’une petite ogive, car il doit être tiré à partir de l’un des six tubes de la cartouche HIMARS ordinaire. Le missile à longue portée est l’ATACMS. Il est livré dans une boîte différente qui ne comporte qu’un seul tube pour un missile d’un diamètre de 610 mm. Il peut être tiré par tous les systèmes qui utilisent habituellement la boîte de 6 missiles.

La version du missile MFM-140 ATACMS la plus susceptible d’être utilisée est le M57 (ATACMS TACMS 2000) :

Il transporte une tête explosive pénétrante à fragmentation WDU-18/B de 500 livres, portée par le missile antinavire Harpoon de la marine américaine, qui a été redésignée WAU-23/B lorsqu’il a été utilisé dans l’ATACMS.

Ce n’est pas l’ogive idéale pour attaquer une cible dure, mais elle est suffisamment importante pour au moins endommager lourdement le pont de Kertch.

Si elle est utilisée, l’Ukraine perdra toutes les terres situées à moins de 300 kilomètres de la Crimée, des oblasts de Donbass et de Louhansk et de la frontière nord de l’Ukraine avec la Russie. Odessa n’est qu’à 180 kilomètres de la Crimée et Kiev à quelque 200 kilomètres de la frontière russe la plus proche. Si l’on prend au sérieux les propos de M. Lavrov, ces villes passeraient sous occupation russe en cas d’utilisation d’un missile HIMARS à longue portée.

Lavrov a cité plusieurs oblasts ukrainiens qui figurent déjà sur la liste des souhaits de la Russie :

C’est loin d’être seulement la RPD et la RPL, c’est aussi la région de Kherson, la région de Zaporozhye et un certain nombre d’autres territoires, […].

Le nombre d’autres territoires devra inclure les oblasts de Kharkiv et de Dnipropetrovsk pour protéger la frontière de Donetsk et de Luhansk des armes à longue portée. Il faudra peut-être prendre Mykolaiv et Odessa pour protéger les installations pétrolières et gazières de la Russie à l’ouest de la Crimée. L’Ukraine a déjà attaqué celles-ci avec des armes à longue portée.

Si j’étais un décideur ukrainien, je prendrais la menace de Lavrov très au sérieux.

L’arme à longue portée que les États-Unis et la Grande-Bretagne ont livrée à l’Ukraine jusqu’à présent est le missile antinavire Harpoon, d’une portée de 124 kilomètres, proche de celle des missiles ukrainiens Tochka-U, qui est de 120 kilomètres. Le ministère russe de la défense avait précédemment affirmé qu’au moins deux lanceurs Harpoon avaient été détruits. Selon son rapport quotidien, un autre a été éliminé hier près d’Usatovo, dans la région d’Odessa.

Moon of Alabama

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.

Source : https://lesakerfrancophone.fr/lavrov-donner-des-armes-a-longue-portee-a-lukraine-conduira-a-ce-que-le-pays-perde-plus-de-territoire

samedi 9 juillet 2022

La cause nucléaire du pont de Kerch

 • Brusquement, la menace d’un affrontement grave impliquant la Russie directement et, indirectement les USA, se fait jour à propos du pont de Kerch (entre la Crimée russe et la Russie continentale). • On parle de menaces d’attaque contre ce pont, qui serait un véritable casus belli pour la Russie. • Le Pentagone, contrairement à son attitude antérieure, serait plutôt offensif et ne cherche pas à freiner les Ukrainiens. • Il s’agit pour beaucoup du reflet d’une situation américaniste et de l’administration Biden bien difficile... • Contributions : dedefensa.org et WSWS.org.

Dans la crise Ukrisis, l’attention des options et hypothèses stratégiques, et éventuellement stratégiques à risque nucléaire, se déplace vers le pont de Kertch, ce pont construit entre la Crimée et la Russie continentale après l’intégration de la Crimée à la Russie en 2014. Le risque d’une extension majeure du conflit jusqu’à la possibilité du nucléaire ne suit pas nécessairement l’évolution de la situation sur le terrain, ou bien la suit inversement à un sens que certains croiraient être proche du terme du conflit en faveur des Russes (plus la situation sur le terrain devient difficile pour le bloc-BAO, ou OTAN-Ukraine, plus le nuage devient menaçant). Quoi qu’il en soit, cette menace s’est renouvelée alors que les Russes bouclent la reconquête du Donbass ; elle est passée assez brutalement, du Nord au Sud, de la Baltique à la Mer Noire.

• Hier (disons, il y a deux semaines), c’était l’exclave de Kaliningrad qui constituait un risque majeur d’extension brutale du conflit vers une dimension continentale avec un sérieux risque nucléaire. Il s’est avéré que la Lituanie se trouvait extrêmement isolée dans sa tentative d’exercer une pression maximale sur la Russie, ni les USA ni l’UE, ni même vraiment la Pologne qui avait bien lu les consignes, ne l’ayant soutenue dans ses exigences maximalistes.

• Aujourd’hui, se font voir et lire les signes que la possibilité d’une gravité au niveau supérieur du conflit est passé au pont de Kersh, entre la Crimée qui est un territoire russe pour Poutine et tous les Russes (et les Criméens, bien sûr), et la Russie continentale. Il y a d’abord une intervention de celui qui est sans doute le plus médiocrement inepte de tous les SACEUR de l’OTAN, le général Breedlove, qui est à 50-80 degrés de QI en-dessous, de gens comme les généraux Norstad, Goodpaster, Rogers, voire Haig, sans compter les trois premiers, les grands anciens que furent Eisenhower, Ridgway et Gruenther. Breedlove est un redoutable combattant de la communication qui méprise les Russes en Ukraine selon les conceptions zeleskiennes, après avoir avoué être complètement déculottés par eux en 2014, en Crimée justement :

« “Nous avons assisté à l'exécution de plusieurs exercices rapides au cours desquels de grandes formations de forces ont été mises en état d'alerte et se sont exercées, puis se sont retirées”, a déclaré [Breedlove]. “Et puis soudain... boum-boum, les voilà en Crimée... avec une force hautement prête, hautement préparée”, a-t-il ajouté. [...]

» “Le général a déclaré qu'il était clair que la Russie avait considérablement amélioré ses capacités depuis la guerre de 2008 en Géorgie. “L'incursion de la Russie en Géorgie [...] n'a probablement pas été la plus douce”, a-t-il déclaré. “À titre de comparaison, l'incursion en Crimée s'est déroulée comme une horloge, en commençant par une déconnexion presque complète des forces de Crimée de leur commandement et de leur contrôle via le brouillage et les cyberattaques, puis un enveloppement complet par les forces russes à l'intérieur de la Crimée.” »

Aujourd’hui, changement complet chez Breedlove. Il recommande d’attaquer le pont de Kerch, qu’il considère comme une “cible légitime”. L’idée d’employer des missiles anti-navires ‘Harpoon’, livrés en nombre limité par le Danemark, pour accomplir cette mission nous semble problématique quant à la puissance destructive, mais après tout Breedlove est de l’USAF et il n’engage par la capacité d’un système d’arme de son service.

« “Le pont Kerch est une cible légitime”, a déclaré Breedlove. “Cela ne me surprend pas du tout que les Russes soient préoccupés par le pont Kerch. Il est incroyablement important pour eux.”

» Maintenant que l'Occident a donné à l'Ukraine des missiles Harpoon, je pense que les Russes ont toutes les raisons de s'inquiéter que l'Ukraine lance une attaque sur le pont. »

Mais Breedlove n’est qu’un hors d’œuvre, auquel on peut rajouter l’arrestation à Hambourg, de deux soldats allemands faisant partie d’un groupe de douze irréguliers qui planifiait une opération clandestine de sabotage du pont de Kerch. Ce qui importe, c’est la réponse lapidaire en apparence, circonstanciée dans la forme indirecte, du porte-parole du Pentagone qui répondait à la question portant justement sur la suggestion de Breedlove : une attaque contre le pont de Kerch est-il ou non exclu pour l’emploi d’armes US fournies à l’Ukraine, en tant que “cible potentielle” ? La réponse en termes pesée, est implicitement positive puisque, pour les USA, la Crimée reste ukrainienne et par conséquent le pont de Kerch l’est, – disons au moins pour moitié ? Aussi, le porte-parole, qui n’est plus l’amiral Kirby, nous dit-il :

« À ma connaissance, il n'y a pas de préclusions concernant les Ukrainiens qui se battent sur leur territoire souverain contre la Russie. »

Le reste de la longue intervention du porte-parole apparaît comme une confirmation indirecte mais appuyée de la déclaration de Stoltenberg selon laquelle l’OTAN, et essentiellement les USA, préparent l’Ukraine pour la guerre depuis « 2015 – oui, 2015  »

Le site trotskiste WSWS.org rapporte aujourd’hui en détail cette séquence, – pour une fois très précis, informatif et incisif, à la différence de la couverture communication décevante d’Ukrisis de ce site, depuis le début des opérations. Il ne fait guère de doute, selon ces déclarations du porte-parole du Pentagone, que le Pentagone justement semble avoir nettement évolué, d’une position très retenue, très prudente sinon hostile à des opérations ukrainiennes défiant la Russie, à une position beaucoup plus offensive. Cela n’est pas exactement affichée, mais cela est implicitement évident, Breedlove ne serait dans ce cas que comme porte-voix et “influenceur” missionné de l’attention de la presseSystème vers une telle possibilité d’attaque, permettant aux militaires US de ne pas repousser cette possibilité sans prendre trop de risque d’une communication trop précise à cet égard..

Or, comme l’explique WSWS.org, une telle opération porte toutes les possibilités d’une extension dramatique du conflit vers un affrontement direct avec la Russie, et avec une possibilité très sérieuse d’un affrontement avec les USA, et de l’usage du nucléaire. WSWS.org rappelle opportunément qu’en avril-mai, la politique officielle US, le Pentagone bien entendu mais aussi le téléprompteur de Biden lui-même, rejetait la possibilité de l’emploi par les Ukrainiens d’armes US vers le territoire russe. Depuis, cette possibilité a été à l’une ou l’autre occasion écornée, notamment lors de tirs de roquettes tirées de systèmes US HIMAT en territoire russe. Mais le pont de Kerch, c’est bien autre chose, beaucoup plus grave, une inévitable “ligne rouge” pour la Russie, qui mettra Poutine dans l’obligation de riposter à mesure.

Quelle est la cause de cette évolution ? WSWS.org conclut par cette observation :

« Le fait que le Pentagone ait publiquement refusé d'exclure une telle action montre clairement l’imprudence et le désespoir absolus qui guident les décideurs américains. »

Cela nous paraît correspondre à une réalité et résumer l’impasse de ce conflit. Dès lors que, d’une façon ou l’autre, il s’agit d’un affrontement entre les USA et la Russie, aucun des deux ne voudra céder contre l’autre. Le durcissement du Pentagone apparaît donc logiquement suscité par les succès russes sur le terrain, en Ukraine, impliquant une possible défaite du camp où ils sont eux-mêmes engagés. Le Pentagone nous rassure : « S’il le faut, les USA fourniront des armes à l’Ukraine pour les années à venir », peut-être pour les décennies, sans doute pour l’éternité...

Face au risque d’une sorte d’enlisement paradoxal, parce qu’enlisement dans la terrible tension de menaces extrêmes pouvant ou devant à un moment ou l’autre se concrétiser en une catastrophe, la véritable tangente qui peut tout changer est un bouleversement intérieur radical. Nous croyons qu’il interviendra bien plutôt aux USA, ce qui est volontairement caché, enterré, maquillé, bidouillé, par une presseSystème-BAO plongée dans un formidable exercice de “cancellation” des mauvaises nouvelles américanistes, et sans doute aussi du mauvais temps pour les vacances...

Comme nous ne cessons de la répéter avec une grande constance, ce sont bien les USA qui se trouvent dans une situation qu’on pourrait qualifier de façon impertinente de “prérévolutionnaire” ; du coup, il nous paraît également fort possible que le durcissement du Pentagone que nous observons vienne directement d’un ordre direct de l’équipe de communication de la Maison-Blanche. L’administration Biden voudrait améliorer sa catastrophique politique étrangère par une affirmation en Ukraine avant les élections législatives de novembre, où le parti démocrate se trouve placé devant la perspective d’une défaite historique, paralysant totalement un exécutif portant déjà le poids d’une politique incohérente sous les ordres d’un président dans un état psychologique et cognitif désatreux.

Le texte de WSWS.org ci-dessous, sous le titre « Le porte-parole du Pentagone refuse d’“exclure” une attaque ukrainienne contre le pont russe de Kerch », est daté du 8 juillet 2022.

dedefensa.org

Source : https://www.dedefensa.org/article/la-cause-nucleaire-du-pont-de-kerch