09 août 2024 (18h50) – Malgré tous les ingrédients existants pour en
faire un événement de type “naturellement-catastrophique”, de ce type
auquel nous sommes habitués d’après les schémas des manœuvres des forces
cachées, la campagne présidentielle américaniste n’est pas seulement
catastrophique (illustration de la crise catastrophique du système de
l’américanisme), – elle est singulière, étrange, inattendue... Preuve de
leur puissance insaisissable et inconnaissable, les événements
parviennent encore à nous surprendre malgré que nous ayons tout imaginé,
absolument tout, de l’apocalypse quotidien qui est inscrit sur notre
menu comme plat du jour permanent...
Note de PhGBis : « ...et, en vérité,
absolument fondé et justifié. Ici, PhG doit préciser que cette
atmosphère catastrophique n’est ni infondée, ni artificiellement
fabriquée. Si je prends un seul exemple : moi qui ai vécu un bon quart
de ma carrière en Guerre Froide, notamment la période 1979-1985,
j’affirme absolument qu’un seul jour, une seul heure où des soldats US
et des soldats Russes auraient pu directement et d’une manière
identifiée se trouver face à face était considéré comme un risque
colossal d’apocalypse nucléaire. Aujourd’hui, nous vivons sous ce régime
depuis plusieurs années (Syrie, Ukraine). Quelles que soient toutes les
explications secrètes du monde, il reste que c’est une “atmosphère
apocalyptique”... Et ce n’en est qu’une parmi d’autres. »
Donc, je veux dire que ce caractère “singulier, étrange, inattendu”
caractérisant les présidentielles est un fait absolument extraordinaire
qui doit nous arrêter. Il explique par ailleurs que nous avons du mal à
commenter cette campagne comme celles, également apocalyptiques, de 2016
et 2020, mais qui suivaient une certaine logique ; avec celle-ci,
c’est peine perdue et perdue d’avance.
Il y a de nombreuses causes à cela, certaines tactiques de l’un et
l’autre camps, d’autres objectives qui forment la majorité des cas.
Aucune référence passée n’est disponible pour éclairer notre lanterne.
La fausse-vraie transformation de Kamala
La nomination de Kamala Harris ne fut certainement pas une surprise
mais ce fut un choc. Cette femme, décrite quasiment comme d’une totale
incompétence dans une mesure jamais vue dans ces milieux, transformant
la moindre phrase de plus de cinq mots en “salad’s words”,
soudain devenait candidate. Sans être devenue brillante en aucune façon
du fait de la nomination, il reste qu’elle existait et, tant bien que
mal, jouait le rôle de candidate. Ce fut un choc d’autant plus fort
qu’il libérait les démocrates du poids étouffant de tous ces mensonges
les poussant à affirmer, comme ils le firent pendant quatre ans, que
Biden était en forme parfaite, avait tous ses esprits, sa lucidité. Le
contraste était saisissant malgré la “salad’s words” et une réelle dynamique naquit autour de Kamala Harris.
« Ce fut un choc psychologique énorme, remarque un stratège républicain avec cynisme et lucidité, il
libéra les démocrates qui, pour quelques jours furent quittes du poids
épuisant des mensonges de Joe Biden et crurent qu’ils entraient dans le
royaume enchanté de la vérité. En fait, ils ne faisaient que vivre
l’ivresse de la transition entre un vieillard producteur de mensonges
faisandés à une arriviste ambitieuse réputée inexistante, productrice de
mensonges un peu plus frais mais encore plus inconsistants... »
Quoi qu’il en soit, il est vrai que cet épisode secoua l’équipe
Trump. Trump lui-même parut perdre de sa maîtrise et de sa verve, et
l’on peut se demander si cette perte d’énergie aurait été complètement
compensée s’il n’y avait eu l’action salvatrice de J.D. Vance.
L’embarras de Trump et l’aide salvatrice de Vance
Vance avec Trump forment un duo redoutable. Ils ne sont certainement
pas ma tasse de thé en tout, – loin de là ! – et notamment pour leur
position incroyablement ultra-sioniste en soutien de Netanyahou. Aussi
mon jugement concerne-t-il simplement et exclusivement leur efficacité
électorale dans cette campagne si étrange et incroyablement animée de
hauts et de bas pour les deux camps.
Il faut remarquer que Trump n’a pas choisi Vance en fonction de son
apport électoral (son électorat) ou de la région d’où il vient (du
gentil et tranquille Ohio), mais essentiellement pour des raisons
idéologiques et dialectique de dynamique de campagne. Cela diffère
complètement des habitudes de choix d’un vice-président qui, en général,
ne sert à rien d’autre que d’assurer des voix et rassurer certains
soutiens. On s’en est aussitôt aperçu au rôle que tient Vance en adjoint
opérationnel du commandent-en-chef et nullement en fournisseur
logistique d’un supplément de base électorale.
Trump au meilleur de sa forme est emphatique, grossièrement épique,
pompeux et ronflant, agressif et vulgaire avec ses adversaires, selon la
doctrine du ‘carpet bombing’, avec des successions de slogans
où le ton et l’envol comptent infiniment plus que le contenu. Vance est
complètement différent : une diction impeccable et très rapide,
tranchante et cinglante, documentée et imparable, frappant directement
au centre de la cible, une maîtrise de l’esprit de l’éloquence plutôt
que des émotions ; et plutôt une bombe lourde planante à guidage
super-précis (une FAB-3000 russe, par exemple) que l’arrosage
indiscriminé des zones démocrates. Les deux se complètent donc.
Mais en l’espèce et pour la période envisagée, c’est Vance qui fut le
sauveur. Autant l’élan de Trump peut se trouver très fortement affecté
par une baisse de régime, autant la fermeté dialectique de Vance
parvient assez aisément à maîtriser ces moments de faiblesse. Il connaît
sa feuille de route à merveille et il a poursuivi son travail de frappe
malgré le passage à vide de l’équipe.
« Presque instantanément, il s’est trouvé partout à la fois, dans
des meetings, face à la presse, dans des interviews, bien meilleur dans
les réparties improvisées qu’à la lecture de son téléprompteur... » (Victor Davis Hanson)
L’étrange choix de Kamala
Puis vint le moment du choix de son VP par Kamala Harris. La plupart
des observateurs pensaient qu’en raison de sa faiblesse politique,
Harris serait conduite à choisir une forte personnalité équilibrant ses
engagements assez marqués : un démocrate plutôt centriste, équilibrant
son radicalisme-Woke affiché, et plutôt ami d’Israël, équilibrant ses tendances à courtiser le camp progressiste pro-palestinien du parti.
Note de PhGBis : « On notera que pour
elle non plus, il ne fut guère question des avantages logistiques du VP,
mais de ses engagements idéologiques, comme du côté de Vance pour
Trump. L’idéologie, et l’idéologie extrémiste, domine tout. »
Finalement, à la sélection finale, tout le monde jurait qu’elle
choisirait le gouverneur Josh Shapiro, homme de poids de grande vertu
politicienne, même considéré avec respect par des républicains, et par
Trump lui-même. Ce fut Tim Walz, ce qui donna à Trump l’occasion d’un long commentaire où il transparaissait entre les mots que la pression d’Obama pour ne pas choisir Shapiro avait pesé lourd.
« “Tout le monde pensait que ce serait Shapiro, mais il s'est
avéré que ce n'était pas Shapiro”, a déclaré Trump sur Fox News
mercredi. “Je suis convaincu que ce n’est pas pour la raison dont nous
parlons. C’est parce qu’il est juif et qu’ils pensent qu’ils vont
offenser quelqu’un d’autre”.
« « Je pense qu'il y avait d'autres personnes meilleures que lui,
je les connais toutes. Mais j’ai été choqué quand il s’agissait des
deux derniers et elle n’a pas choisi Shapiro”, a-t-il ajouté.
» La faction “progressiste” des Démocrates s’était opposée à
Shapiro, citant son soutien à Israël et ses critiques des manifestations
étudiantes pro-palestiniennes à travers les États-Unis. Certains
critiques l’ont surnommé “Genocide Josh” – faisant écho au surnom de
“Genocide Joe” donné au président Biden – tandis que d’autres ont
souligné les problèmes potentiels qu’un ticket Harris-Shapiro aurait
pour attirer les électeurs musulmans, arabes et palestino-américains
dans les principaux États charnières.
« “Vous ne vous sentiriez pas très à l’aise si vous étiez Israël
en ce moment avec cette équipe”, a déclaré Trump à Fox News. ”C’est la
pire équipe jamais constituée pour un Juif ou pour Israël”. »
Effectivement, le gouverneur du Minnesota Tim Walz n’apporte qu’un
renforcement du militantisme de Kamala. C’est de son État, dans la ville
de Minneapolis, que partit la saison des émeutes de l’année 2020 avec
la mort de George Floyd. Walz se montra d’un féroce laxisme, laissant
faire plusieurs jours d’émeutes, de pillages et d’incendie en toute
impunité, laissant la rue aux Black Live Matters. Victor Davis Hanson, qui qualifie le duo de « deux Néo-Maxistes », rapporte que
« ...la femme du gouverneur ouvrait la fenêtre le soir pour
sentir l’odeur des magasins et des petites entreprises, résultats d’une
vie de travail, en train de brûler du fait des émeutiers... Sa fille
alla avertir ces émeutiers qu’ils pouvaient être tranquilles, que son
père était décidé à ne pas appeler la Garde Nationale... »
Quelques remarques intempestives
L’équipe Harris-Walz, dont on s’interroge sur le fond de la logique
du choix, constitue une cible rêvée pour Trump-Vance. Ils constituent
aussi un bloc de gauche extrémiste, sans aucun aménagement de
modération, tandis qu’en face d’eux le bloc Trump-Vance constitue un
bloc de populistes également extrêmes, selon la même recette. Le miracle
habituel du Système régulateur dans les présidentielles n’a pas eu
lieu ; il n’y a eu aucun rassemblement plus ou moins dans un sens
bipartisan, célébrant l’habituelle messe démocratique du Parti Unique,
apaisant les tensions et le clivage entre les deux blocs, et au
contraire l’accentuation des deux extrêmes et le creusement de l’abîme
d’affrontement. Quels que soient les vainqueurs et les vaincus, quelle
que soit la bonne marche ou la marche chaotique du vote, l’antagonisme
sera toujours aussi fort, sinon plus fort encore après le vote.
Autrement dit, cette “élection décisive” ne décidera de rien du tout.
L’Amérique est définitivement entrée sur la voie de la désintégration,
et il n’y aucune raison que l’accélération des événements que l’on
observe depuis 2016-2020 ne continue pas ni ne grandisse encore plus.
Jusqu’ici, le chaos intérieur du système de l’américanisme n’est pas
encore répercuté directement (un peu indirectement) sur les événements
extérieurs. Il semble que nous puissions penser, moi le premier, que
cette élection va enfin accélérer une confrontation de ces deux
“fronts”. La désintégration de l’intérieur de l’Empire secrète une
pourriture qui devrait désormais infecter la politique extérieure, la
fameuse politiqueSystème.
Ce sera un grand moment et toutes les crises du monde, qui composent en autant de “sous-crises” notre GrandeCrise,
en seront bouleversées. C’est alors qu’il faudra songer à les résoudre,
en ce moment magique où les premiers éléments d’un monde nouveau
commenceront à apparaître dans le chaos global ainsi créé.