jeudi 8 décembre 2016

L’Escargot déchaîné n° 30 - Editorial des objecteurs de croissance belges / The unchained snail n° 30 - Editorial of the Belgian objectors of growth

source : http://objecteursdecroissance.be/spip.php?article764

L’Escargot déchaîné n° 30


mpOC | Posté le 4 décembre

D’éloges et de chagrins Quelques jours à peine avant l’odieuse masse de licenciements opérée par son entreprise sur le site de Gosselies, un conseiller de Caterpillar stipulait, au travers des colonnes du journal Le Vif, que la santé financière de l’usine basée à la périphérie de Charleroi était bonne.
Pas suffisamment, semble-t-il, pour rassasier la cupidité des actionnaires du groupe. Dans un monde ultralibéral accordant des dividendes toujours plus démesurés aux capitalistes, l’actionnaire-roi marche main dans la main avec le client-roi. Peu importe si les quelques 2.200 personnes licenciées payent lourdement les effets de la logique économique du laisser-faire, intime et fidèle allié de l’avidité croissanciste, si cela permet aux nantis de se « n(é)antiser » toujours un peu plus. Il semble que le ventre de ce monstre que nous alimentons tacitement ne pour-ra jamais se contenter de ce qu’il engloutit. Éternel insatiable, le vorace se trouve avantagé par un discours social faisant abstraction de la limite, entité pourtant indispensable à toute société dé-cente qui ne vouerait pas inconsciemment un culte au suicide collectif.
C’est sans vergogne que la direction de Caterpillar a poussé le cynisme jusqu’à son paroxysme, s’étonnant que la production carolingienne n’ai pas repris tout de suite après l’annonce de ces licenciements massifs. Toute étonnée du comportement pourtant profondément humain de son personnel, elle fit mine de ne pas comprendre pourquoi ses employés étaient psychologique-ment inaptes à reprendre le travail. Nous touchons ici des seuils de non-pensée et de vacuités affectives de plus en plus légions.
Symbole de l’inertie politique quasi-généralisée, le ministre du travail Kris Peeters a mis en garde les Belges par l’intermédiaire des colonnes du journal Le Vif. Cette petite vague ne serait que le prodrome d’une tempête plus aiguë : « Mais c’est au final à l’entreprise de décider. On ne peut pas forcer une société à rester ouverte ». C’est donc à l’entreprise de décider, et tant pis pour le reste. Tout est dit, ou presque… C’est ainsi que la fonction des hommes et femmes politiques de nos si chères « démocraties » semble se réduire en la défense, par un aigre silence, des intérêts financiers de quelques calculateurs privés.
Preuve que son royaume n’est pas mort, nous avons fêté, dans la foulée de ces derniers évènements, la journée du client. Les festivités se sont déroulées le samedi 24 septembre et ont mis à l’honneur ceux sans qui l’actionnaire ne serait rien : les consommateurs. Et s’il y a du consommateur, c’est qu’il y a du consommé pardi ! Par conséquent, faisons l’éloge de McDonald’s et de toutes ces chaînes de distributions de malbouffe rapides accordant à qui le veut le privilège de se délecter de tripes de bovins bourrés aux antibiotiques.
Acclamons également chaleureusement Monsanto qui, par souci philanthropique, a pour projet d’éradiquer les insectes et autres nuisibles tout en appauvrissant les sols vivriers. Demandons également un tonnerre d’applaudissements pour cet ingénieux concept d’obsolescence programmée sans qui les machines de notre quotidien auraient une durée de vie telle que cela briderait le cercle ô combien vertueux de l’hyper-consommation. Dans la même lignée, merci à Phillips qui, membre du cartel Phoebus à partir de 1924, participa, fort heureusement pour la santé de la croissance économique, à la limitation de la durée de vie des ampoules. Ne manquons pas de féliciter la General Motors qui, au début de son histoire (et à l’inverse de Ford), se mit à fabriquer des voitures aux hétéroclites esthétismes afin d’encourager le consommateur à en changer tous les trois ans. Étant donné que seuls les imbéciles ne changent pas d’avis (ce qui n’empêche aucunement ceux qui en changent d’être potentielle-ment d’irréductibles idiots), remercions Ford et tous les autres concessionnaires automobiles d’avoir adopté la même stratégie que leur concurrent. L’industrie pharmaceutique mérite aussi toutes nos louanges, elle qui, soucieuse de la santé de tous, propose sur le marché une quantité astronomique de pilules qui éradiqueront bientôt les maux psychiques et biologiques qu’elle aura elle-même créés.
Suite de l’édito dans l’Escargot déchaîné téléchargeable ci-dessous.
http://objecteursdecroissance.be/IMG/pdf/escargot_no30.pdf