Destinataire(s) : Céline TELLIER - Ministre wallonne de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal + Philippe HENRY - Ministre du Climat, de l’Énergie, de la Mobilité et des Infrastructures + Elio DI RUPO - Ministre-Président de la Wallonie.
D’une part, sachant que:
Les entreprises extractivistes sont de puissants acteurs et ont besoin d’un Code minier actualisé pour lisser leur image et celle de leurs activités en vue de construire l’acceptabilité sociale de leur retour sur nos territoires que provoque le titanesque projet de réindustrialisation & de relance minière européenne.
Projet accompagné d’une campagne visant à rendre acceptable l’exploitation des sous-sols européens. Dans le même temps, la Commission évalue les régions du continent à sacrifier écologiquement pour permettre l’approvisionnement en minerais des différents secteurs industriels, et ainsi nourrir la croissance économique par la double Transition : “verte” et numérique.
Nos sociétés sont démocratiques. Pourtant, pour mettre en place le plan de développement économique de notre société (voulu par les secteurs industriels et la Commission Européenne), la stratégie politique est de fournir une information au public le plus tardivement possible. Autrement dit, la population subit un silence (voire une désinformation médiatique) qui dure jusqu’au lancement des phases d'exploration, en fin de processus d’actualisation du Code minier. Ce que de nombreux acteurs dénonçaient avec force dans cette carte blanche le 17/11/22 via Le Soir. [https://www.lesoir.be/477606/article/2022-11-17/pour-une-democratisation-immediate-de-la-question-miniere-en-belgique]
Ensemble, nous nous rendions ainsi compte de la définition unilatérale imposée d’« une bonne gestion du patrimoine commun des habitants de la Wallonie », alors que très peu de citoyens.nes sont correctement informés.es et ont conscience des conséquences de tels projets industriels extractivistes en cours ailleurs ou à venir chez nous.
En effet, depuis le début du processus d’actualisation de ce Code minier, l’opacité la plus complète a entouré son élaboration pour mettre, comme si souvent, la société civile devant le fait accompli.
Ce, sans information en amont qui permettrait à tout.e citoyen.ne de prendre la mesure des enjeux pour pouvoir se faire sereinement un avis éclairé sur cette difficile question.
La rédaction du nouveau Code de gestion des ressources du sous-sol s’inscrit donc dans l’Initiative Matières Premières lancée par la Commission Européenne dès 2008 [formalisé dès 2012] et contribue, selon le secteur minier lui-même, à la « Ruée vers l’or européenne des 21, 22 et 23ème siècles ». La mise à jour de ce document va fortement conditionner les décennies à venir en Wallonie.
Et d’autre part, conscients.tes :
Des multiples effondrements de la biodiversité en cours dus à l’impact massif, dévastateur et invisibilisé de notre modèle de développement, dont les effets sont démultipliés par la digitalisation forcée et généralisée de la vie en société.
De l’urgence à mettre en œuvre des solutions efficaces, réalistes et à la hauteur des enjeux climatiques et socio-environnementaux auxquels nos sociétés humaines sont confrontées, dans quelque partie du monde que ce soit.
En effet, une compréhension des impacts de l’essor de nos sociétés industrielles & technologiques sur les écosystèmes et les populations humaines ne peut pas se limiter à la seule prise en compte des émissions de gaz à effets de serre, mais doit tout autant inclure l’entièreté des enjeux humains, sociétaux et environnementaux qu’il induit au Nord & au Sud: réalités de l’extractivisme, exploitations sociales, patriarcat, inégalités, répressions, pollutions diverses, technocratie, militarisme, destruction des habitats naturels, dépossession politique, destruction de la biodiversité, finitude des ressources, etc.
Rendre les ressources de nos sous-sols accessibles n’aura d’autre effet que d’ajouter de nouvelles exploitations industrielles aux mines déjà existantes ailleurs, pour répondre à des besoins d’expansionnisme industriel non souhaités et non souhaitables. Les intérêts économiques ne peuvent décemment plus se penser à court terme [dizaines d’années].
Doit aujourd’hui émerger une définition collective du modèle de développement (qui ne se conçoit pas exclusivement économiquement) le plus raisonnable et réaliste permettant un avenir véritablement durable, serein et soutenable. Par « durable », nous n’entendons évidemment pas « économiquement viable » mais bien « qui ne diminue par les capacités des générations futures à subvenir à leurs besoins fondamentaux ».
De la seule véritable mine d’or de la Wallonie que représentent ses ressources d’eau douce (potable). Eau douce représentant moins de 3 % de l’eau présente sur Terre (!). Cette précieuse ressource est non-renouvelable, tout comme les minerais nécessaires aux infrastructures de haute-technologie que sont les éoliennes, panneaux photovoltaïques et autres batteries qui sont appelées insidieusement, elles, « énergies renouvelables ». Quel paradoxe pour des objets qui dépendent exclusivement de ressources du sous-sol non renouvelables !
L’eau, cette richesse que nous devrions sans mesure et de toutes nos forces préserver du moindre risque de pollution et de pénurie (et donc du gaspillage!) à une époque où les sécheresses s’annoncent de plus en plus intenses et fréquentes, comme nous l’explique le 6ème rapport du GIEC.
Or, comme ce fut démontré en Finlande, en Allemagne, en Espagne, en France, ou encore en Grèce, l’exploitation des ressources du sous-sol balaie sans retenue tout respect des ressources en eau douce, des terres arables, des habitations et même des zones Natura 2000.
Nous sommes par ailleurs conscients.tes que « l’évaluation des risques » n’est souvent qu’une manœuvre biaisée, et donc hypocrite permettant de contourner tout principe de précaution qui préserverait sans condition des écosystèmes sains restant et en cruel déclin.
C’est pourquoi, nous, membres de la société civile :
Demandons à ce que soit menée une longue, véritable et efficace mise en débats sur cette question du renouveau extractif en Wallonie et entendons ici questionner ouvertement la gouvernance, les processus de prises de décisions ainsi que la place laissée à l’avis des citoyens.nes concernant les conditions d’habitabilité de notre territoire jusque-là préservé. Ce, tout en permettant la remise en question lucide du techno-optimisme sans pour autant adopter une posture technophobe.
Qui choisit qui produit quoi, comment et pour quoi, pour qui ?
Dans quelles limites ? Avec quel pouvoir de contrôle/contrainte ?
Également bien au fait tant de la crise énergétique (renforcée par la guerre en Ukraine) que de l’intérêt économique que représenteraient ces ressources souterraines, et que des innovations technologiques pourraient très légèrement atténuer l’impact des installations, nous questionnons également des modes de vie imposés par la 4ème Révolution industrielle qui sont totalement dépendants des-dites ressources minérales.
Par ailleurs, évidemment, nul « syndrome NIMBY - NotInMyBackYard/PasDansMonJardin » n’est à interpréter dans notre action. Nous nous alarmons prioritairement sur 2 horizons que ce Code minier actualisé rendrait possibles :
- le stockage de CO2 dans nos sous-sols [qui se substitue à la nécessaire diminution de sa production]
- l’extractivisme minier au départ de l’Est de la Belgique [qui se substitue à la nécessaire diminution de nos dépendances aux ressources finies du sous-sol]
Sachant bien entendu que l’entièreté des portes ouvertes par ce nouveau Code minier devraient faire l’objet d’analyses d’impacts approfondies et amenées efficacement à la connaissance des médias et de la société civile. Thématique essentielle mais à ce jour fortement occultée des débats publics alors qu’avance l’agenda des promoteurs du renouveau extractif, il serait difficilement compréhensible de ne pas donner de suite favorable à notre demande formulée au travers de cette pétition. En tenir compte serait en effet le minimum de respect que des représentants.tes politiques doivent avoir envers la démocratie, et donc vis-à-vis de la population de la Wallonie et de nos voisins frontaliers.
Ainsi, nous demandons fermement :
1/ la suspension immédiate de la rédaction en cours du Code de gestion des ressources du sous-sol de Wallonie.
2/ la prolongation a minima jusqu’à échéance des prochains mandats électoraux [mai 2029] du moratoire initié par le précédent Ministre de l’Environnement, M. Carlo di Antonio.
Ce moratoire doit continuer de permettre le blocage total et sans condition de l’obtention de tout permis d’exploration/d’exploitation de nos sous-sols afin de permettre le temps long qu’exige l’application des valeurs démocratiques dans notre société libérale.
Période au terme de laquelle les résultats électoraux de mai 2029 permettront l’application d’un modèle de développement qui ne soit plus du seul ressort des plus influents acteurs économiques et politiques, mais également du ressort [et de la responsabilité !] de l’ensemble de la société civile et de tous les citoyens.nes, qui auront eu le temps nécessaire pour s’informer et donner un avis éclairé, et surtout contraignant. Donc, au-delà du simple avis consultatif.
CONTACT: lesdomineurs@proton.me
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