Source : https://www.dedefensa.org/article/jouer-avec-des-allumettes-i-grandecrise
7 septembre 2022 (16H55) – Un peu plus de six mois après le début de l’OMS (Opération Militaire Spéciale) de la Russie en Ukraine et deux mois avant les élections midterm aux USA, il paraît intéressant et instructif de proposer une vision d’ensemble, intégrée sinon transmutés en un seul élément colossal, des événements qui secouent nos relations internationales, notre-civilisation et le Système lui-même.
Je mets les choses dans cet ordre, par ordre d’importance croissante, car je pense que ce que je nomme “Système” est le phénomène le plus important, qui a perverti par le “déchaînement de la Matière” toute une civilisation pour la transformer en ce que nous connaissons et subissons, une sorte de “contre-civilisation”
PhG (voix-off) : « Il y aura plusieurs articles, trouvant leur place dans des rubriques différentes mais répondant à l’expression de ralliement de “Jouer avec des allumettes” ; au moins trois articles, sans doute 4 ; deux sur ‘Ukrisis’ (la crise générale autour de l’Ukraine) ; un sur ‘RapSit-USA2022 (la crise générale aux USA) ; un de conclusion à partir de la possibilité d’une interprétation métahistorique du concept de “multipolarisme”. »
Explorer le concept de GrandeCrise dans cet état d’esprit, c’est d’abord en décrire les conditions, les structures, la dynamique. C’est d’abord poser l’hypothèse que je tiens pour acquise qu’il s’agit d’une crise absolument générale et sans retour ni appel, c’est-à-dire devant aller à son terme d’entièreté catastrophique et eschatologique.
Le caractère extraordinaire de cette situation, maintes fois répétés parce que nécessaire à garder à l’esptit, est de pouvoir observer “sous nos yeux” la chose se faire, en temps vrai, – il s’agit même de la seule vérité temporelle que nous puissions énoncer... Si l’on est tenté, avec bien des arguments symboliques, de faire un parallèle entre la prise et le pillage de Rome par les Wisigoths en août 410 et l’attaque du 11-septembre comme acte brutal actant le début du ^phénomène la “chute de l’empire”, l’on doit savoir que le notion de temps et par conséquent, la perception du mûrissement inconscient jouent leur rôle. L’évêque d’Hippone, Saint-Augustin, fait ses sermons sur la chute de Rome en 411, un an après l’événement, comme si la nouvelle devait être ainsi appréhendée et perçue, du fait de la durée de cette communication ; quant à nous et notre 11-septembre, quelle différence !
« D'abord, il y a ceci : en même temps que nous subissions cet événement d’une force et d’une ampleur extrêmes, nous observions cet événement en train de s’accomplir et, plus encore, nous nous observions les uns les autres en train d'observer cet événement. L’histoire se fait, soudain dans un déroulement explosif et brutal, nous la regardons se faire et nous nous regardons en train de la regarder se faire. On sait également que ceux qui ont décidé et réalisé cette attaque l’ont fait parce qu’ils savaient qu’existe cet énorme phénomène d’observation des choses en train de se faire, et de nous-mêmes en train d’observer. Le monde est comme une addition de poupées russes, une duplication de la réalité en plusieurs réalités emboîtées les unes sur les autres. » (Philippe Grasset, “Chroniques de l’ébranlement”, éditions Mols, Bruxelles 2003.)
Nous avons donc suivi et observé, semaine après semaine, jour après jour, les événements. C’est chargé de cette connaissance immédiate, conscient de ses avantages extraordinaires et de ses travers catastrophiques, que j’observe analytiquement les événements présents. Je veux dire que je prends le risque des travers en toute connaissance de cause, et cherchant à en domestiquer les effets sans les ignorer, en profitant des avantages autant que faire se peut, sans m’aveugler à cet égard.
C’est dans ces conditions que j’énonce plusieurs traits qui pourraient prétendre constituer une prospective, mème si des moqueurs en venaient absurdement à parler de prophétie. Je n’ai nul besoin de cette prétention, l’évocation seule suffit, la référence à l’intuition, et une prise en compte somme toute confortable des incertitudes qui constituent la structure même de la GrandeCrise. Pour le reste, ni prospective à proprement parler, encore moins une prophétie.
On détaille donc plusieurs points, qui ne sont pas vraiment des “faits” mais des esquisses, des interprétations intuitives et même venues de ce que nomme l’“âme poétique”. Ils peuvent faire l’affaire pour donner une interprétation à la fois des événements en cours et de leurs destins, telle que je me les représente. On obtient ainsi une sorte d’ensemble un peu flou mais très structuré autour d’événements puissants ; c’est, je crois, le plus d’analyse que l’on peut développer sans emprisonner l’esprit dans des concepts devenus des “lieux communs” de la modernité.
L’issue catastrophique
Il y a l’inévitabilité d’une issue catastrophique, que l’on ressent en toutes choses dans les événements en cours, et de quelque façon que l’on observe la situation. Les outils principaux de cette situation sont à la fois l’extrême aveuglement des élitesSystème et dirigeants (bloc-BAO, What else ?) concernant les actes à poser, et leur extrême impuissance intellectuelle dans leur incapacité sidérante à tirer le moindre enseignement des échecs qui en résultent.
Outre l’extrême pauvreté des esprits qui représente une condition sine qua non pour parvenir à des postes de responsabilité (?), on identifie aisément dans cette situation l’effet de la quasi-instantanéité de la communication qui précipite les informations charriées dans l’impitoyable mixeur-broyeur de la narrative terroriste. Rien, ni même le hasard, ne parvient et ne parviendra à autoriser un jugement critique permettant de prévenir l’issue catastrophique d’un jugement complètement étranger à la moindre proximité d’une vérité-de-situation.
La “dynamique crisique”
Concernant ce que je nommerais la “dynamique crisique” (dynamique des crises), on observe une sorte de paradoxe étonnant, et cela de façon encore plus convaincante si l’on prend un peu de recul, essentiellement depuis 2015-2016, démarrage de la crise US (avec la candidature Trump et son élection), – que l’on nommera ‘subcrise’ par rapport à la GrandeCrise, – puis roulant de subcrise en subcrise sans qu’aucune des précédentes ne se résolve ni ne perde d’intensité.
Au contraire, apparaît une sorte de “dynamique paralysée”, ou bien encore plus paradoxal, une sorte de “tension gelée”. Il y a un mélange de mouvement “immobilisé” dans une direction et dans un développement, et une tension qui est normalement animée comme du feu (donc susceptible de s’éteindre), mais qui est comme gelée dans son état de fusion. Aucune des particularités habituelles de ces composants de crise ne répond aux rythmes connus. Ils sont tous emprisonnés pour aller dans le même sens, avec une accélération qui échappe elle aussi aux lois habituelles des cahots et des hauts-et-des-bas, pour se développer sans frein.
Deux axes crisiques
Depuis le début de l’année, et passées les phases crisiques précédentes qui se sont rassemblées et agglomérées dans la crise mondiale du Covid comme pour se placer à un échelon plus haut et trouver un/des nouvel/eaux axes de développement, plus puissant/s, plus dynamique/s, etc. Ce développement catastrophique se déroule selon deux axes évoluant en parallèle :
• celui d’‘Ukrisis’ qui rassemble tous les éléments des tensions internationales autour de l’Ukraine, avec le bloc-BAO développant sans le moindre à-coup une haine absolument aveugle contre la Russie et suscitant dans cette puissance et au sequin de ce « peuple d’exception » [*] une réaction à mesure ;
• celui de ‘RapSit-USA2022’, portant le fruit d’une surenchère de la subcrise 2015-2016, avec un fantastique développement d’une haine antiTrump au-delà de toute pondération possible et de tout argument mesuré et justifié, donc de toute reprise de contrôle, de tout retour en arrière.
Une course à la catastrophe
Il s’est établi avec une rapidité extraordinaire une “course à la catastrophe” entre ‘Ukrisis’ et ‘RapSit-USA2022’, dont on ne sait, pour chacune de ces subcrises, où se situe le point d’inflexion de la catastrophe. Par conséquent, on ne sait laquelle des deux se déclenchera, puis morphera en une catastrophe assez puissante pour modifier de façon décisive la situation générale affectant la civilisation elle-même, dans sa globalité. On connaît les effets extrêmes que peuvent produire les deux subcrises, effectivement catastrophiques :
• ‘Ukrisis’ peut déboucher sur une Troisième Guerre Mondiale ;
• ‘RapSit-USA2022’ peut déboucher sur un processus majeur de désintégration des USA (plus probablement l’un ou/et l’autre processus de sécession qu’une “guerre civile”).
Laquelle des deux subcrises débouchera la première sur une issue véritablement catastrophique (pas nécessairement la guerre mondiale pour ‘Ukrisis’, plus sûrement un processus de désintégration au moins en partie pour les USA) ? Mon appréciation est évidemment que l’évolution à souhaiter est celle des USA, ayant à l’esprit que cette évolution bouleverserait de fond en comble la situation générale et globalisée des relations internationales, nous précipitant sans le moindre doute dans une époque nouvelle où tout serait à reconsidérer, en ayant à l’esprit que rien ne pourrait être pire, en potentiel de gravité que ce qui a précédé.
Le jeu du multipolarisme
Je mettrais enfin comme une sorte de joker les évolutions en cours, d’une ampleur extraordinaire, autour de la Russie et de l’axe Russie-Chine, qui voient un rassemblement exceptionnel de pays du ‘Grand Sud’ (ou ‘Sud Profond’, ou encore les ‘Néo-NAM’). L’Italien Zhok nous offre un concept idéologique (ou anti-idéologique comme on dit antiSystème, d’autant plus que c’est ‘Ukrisis’ qui rassemble ces pays autour de la Russie), correspondant à la multipolarité : le ‘multipolarisme’. Cette dynamique va puiser dans diverses organisations d’ores et déjà opérationnelles, comme les très-fameux BRICS (BRICS+, et comment !).
On constate aujourd’hui, avec chaque jour une nouvelle progression, dans ce champ de cette nouvelle force en voie accélérée de constitution. Il s’agit de ceci qui est largement, pathétiquement, comiquement ignoré par nos diverses presseSystème si sensibles in illo tempore à l’émergence des divers Tiers-Monde ; il s’agit de l’étourdissante dynamique de ce rassemblement général et global qui constitue un formidable balancier contre le bloc-BAO. Les dernières nouvelles du BRICS+, auquel se sont joints déjà l’Argentine et l’Iran, son particulièrement significatives en ceci qu’elles officialisent un considérable élargissement, dans des sens extrêmement significatifs du recul du bloc-BAO, face à un bloc qui représente une masse allant vers les trois-quarts de l’humanité, sinon plus :
« La présidente du Forum international des BRICS s'attend à ce que la Turquie, l'Égypte et l'Arabie saoudite rejoignent le groupe “très bientôt”. Dans une interview accordée au journal russe Izvestia, Purnima Anand a déclaré que la Chine, la Russie et l'Inde avaient discuté de cette question lors du 14e sommet des BRICS, qui s'est tenu en ligne le mois dernier.
“Tous ces pays ont manifesté leur intérêt pour une adhésion et se préparent à déposer une demande d'adhésion. Je pense que c'est une bonne étape, car l'expansion est toujours perçue positivement ; cela augmentera clairement l'influence des BRICS dans le mond”", a expliqué Anand. "J'espère que l'adhésion des pays aux BRICS se fera très rapidement, car maintenant tous les représentants du noyau de l'association sont intéressés par l'expansion de l'organisation, donc ce sera très bientôt”. »
Dire tout cela, ce n’est pas proclamer l’inéluctable victoire du multipolarisme. On n’attend pas de vainqueur pour l’instant, et les péripéties de la catastrophe seront bien plus complexes qu’une course olympique avec médaille d’or à la clef (quoique la Russie soit exclue, n’est-ce pas). Il s’agit simplement de signaler ce qui existe et qu’ignorent les aveugles volontaires et les imbéciles par vocation.
Pour faire bref...
Ces quelques remarques, qui seront largement documentées dans les textes annoncés, sont là pour faire prendre l’exacte mesure du bouleversement en cours, qui ne pourra éviter des prolongements catastrophiques, avec la possibilité d’en faire des apocalypses, – c’est-à-dire avec recomposition et renaissance après la catastrophe. Une perspective eschatologique selon l’excellente définition qu’en donnait Roger Garaudy avant d’être expédié dans les enfers de la mal-pensance selon la gymnastique devenue la principale occupation de l’esprit de liberté des héritiers des Lumières qui vont avoir quelques difficultés à nous éclairer encore longtemps, fichtre !, avec ces lâches et honteuses restrictions énergétiques :
« [C]ette définition pratique et concrète, et excellente en tous points, que donne Roger Garaudy de l’eschatologie (à côté de la définition théorique : “Étude des fin dernières de l’homme et du monde”):
» “L’eschatologie ne consiste pas à dire: voilà où l’on va aboutir, mais à dire: demain peut être différent, c’est-à-dire: tout ne peut pas être réduit à ce qui existe aujourd’hui.” »
Note
[*] La formule est du général de Gaulle et s’applique au peuple (à la race ?) israélien/juif. Nous l’utilisons pour le peuple russe, en faisant le pari que de Gaulle n’aurait pas désapprouvé.
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