Source : https://lecourrierdesstrateges.fr/2022/06/10/cette-salutaire-crise-de-regime-que-le-docteur-jean-luc-mister-melenchon-prepare/
- parÉric Verhaeghe
- 10 juin 2022
À deux jours des élections législatives, la majorité présidentielle, qui a cumulé les ennuis depuis la réélection de Macron, fait preuve d'une véritable anxiété. Alors qu'Emmanuel Macron n'a pas fait campagne, trop sûr de sa victoire, la dynamique Mélenchon pourrait le priver d'une majorité absolue, voire pire : imposer immédiatement une cohabitation. Ce scénario inédit, mais d'autant plus plausible qu'il était prévisible, causerait une crise de régime. Enfin !
Une victoire de la NUPES aux législatives est désormais plausible. Elle contraindrait le Président de la République à subir une cohabitation, ou à dissoudre l’Assemblée Nationale pour obtenir une majorité nouvelle, sans garantie d’y réussir.
Ce scénario inédit dans la Vè République annoncerait probablement la mort de celle-ci, au terme d’une agonie probablement assez longue, et dans une douleur certaine, car il est vrai que le programme de Jean-Luc Mélenchon plongerait le pays dans une crise cataclysmique et constituerait une importante rupture dans le bloc occidental.
Le suicidaire programme de Jean-Luc Mélenchon
Pour tous ceux qui n’auraient pas lu le programme de La NUPES, je recommande de faire un tour sur le site de cet étrange attelage.
On y lit toutes sortes d’énormités qui relèvent toutes de l’économie administrée de type soviétique. Ces propositions complètement déconnectées des réalités proposent par exemple de doubler les effectifs de l’inspection du travail. Voilà qui est bien sympathique, mais les gens de la NUPES, qui sont majoritairement des fonctionnaires et des élus, méconnaissent complètement la crise de la main-d’oeuvre qui frappe l’Occident (la fameuse Grande Démission), et qui rend cette proposition totalement farfelue.
D’une manière générale, une phrase me semble parfaitement résumer ce programme :
Réaffirmer le contrat à durée indéterminée (CDI) comme la forme normale et générale de travail
Il fut un temps où Marx dénonçait l’aliénation par le salariat. Mélenchon adore l’idée d’aliéner toute la société en considérant qu’il est “normal” d’être salarié, et qu’il est donc “anormal” de ne pas l’être.
Les deux ans d’autoritarisme covidien pourraient donc être prolongés par cinq ans d’autoritarisme social : tous ceux qui ne tirent pas leur pitance d’une soumission à un ordre étatisé et jacobinisé seront sur la sellette. On se prépare de belles heures…
Dans la pratique, ce programme fera exploser tous les compteurs de la dépense publique et du déficit, et instaurera une pression fiscale insupportable. Comme dans toutes les préparations aux réouvertures de goulag, les sbires mélenchoniens expliquent que les impôts n’augmenteront que pour 10% des Français. On sait tous à quoi s’en tenir avec ce genre de mensonges, François Hollande les avait testés en son temps. Dans la pratique, les impôts augmenteront pour tous ceux qui travaillent et plongeront un peu plus le pays dans le dangereux éloge de la paresse qui le ronge depuis l’invention des trente-cinq heures.
Quand la face cachée du mélenchonisme se dévoilera
Personne n’a anticipé, ni dans la majorité, ni à gauche, ni à droite, un phénomène politique que les initiés connaissent. Une victoire de Mélenchon ne tarderait pas à dévoiler la face obscure du mélenchonisme, que des gens comme Thomas Guénolé ont découvert de l’intérieur.
En réalité, la France Insoumise est tenue par une clique de gens cupides qui mettront le pays en coupe réglée pour satisfaire leur amour de l’argent et du pouvoir. Les affaires concernant Alexis Corbière et Raquel Garrido, ou encore Danièle Simonnet, ont montré avec quelle facilité ces donneurs de leçons confondent l’intérêt général et leur intérêt personnel.
Bref, on se réjouit par avance des innombrables révélations qui fleuriront sur ce futur gouvernement qui joue au défenseur de la veuve et de l’orphelin. La déception risque d’être intense pour tous ceux qui sont dupes de la rhétorique mélenchonienne, et, dans tous les cas, la crise de régime interviendra par un rejet massif de l’opinion face à la corruption généralisée qui se prépare.
Je pourrais en tartiner des kilomètres, sur le sujet, mais quand, comme dans l’affaire Bouhafs, les Français découvriront le caractère très variable de la géométrie morale de leurs nouveaux gouvernants, le boomerang sera terrible.
Certains en viendront même à regretter Macron.
On peut donc se réjouir d’une victoire de la NUPES, car elle balaiera définitivement la classe politique issue de la Vé République.
Des reniements si prévisibles…
Le parcours d’Alexis Tsipras en Grèce devrait donner aux Français un avant-goût de ce qui les attend avec la NUPES.
Car, sur les estrades, Mélenchon joue aux fanfarons et aux Cyrano de Bergerac, exactement comme Tsipras en son temps. Mais très vite, les Allemands auront les moyens de le calmer, et même de le faire parler. Car l’épargnant allemand a déjà senti sa douleur avec l’aberrante propension de Macron à augmenter les dépenses publiques en creusant la dette française, puis en créant une dette européenne, avec l’argent de la BCE, qui est essentiellement apporté par l’Allemagne. Mais Macron avait le bon goût de faire des mamours aux Teutons et de les caresser dans le sens de la moustache, ce qui calmait leur colère tudesque.
J’ai un vrai doute sur le caractère reproductible de la manoeuvre avec un Mélenchon qui tonitrue sur la dureté des semaines à 35 heures et sur l’inhumanité qu’il y a à demander aux gens de travailler en contrepartie du salaire qui leur est versé. Si l’on ajoute que Mélenchon ne cache guère sa germanophobie, j’ai comme le sentiment que l’ours prussien, qui est en plein réveil psychique après soixante-quinze ans de castration post-nurembergienne, risque de couper les robinets de la monnaie face aux écarts de notre leader maximo.
Comme Tsipras, Mélenchon subira donc la pression allemande (et celles des “radins” comme la Hollande) pour rester dans un cadre budgétaire raisonnable ou, en tout cas, moins délirant que celui qu’il propose.
Si l’on en juge par la psychologie connue du docteur Jean-Luc, Mister Mélenchon devrait continuer à brasser de l’air comme Tartarin, et rapidement rentrer dans le droit chemin de l’orthodoxie budgétaire. Exactement comme Tsipras.
Les Français comprendront alors que leur Premier Ministre les a bernés et qu’il y a souvent loin de la coupe aux lèvres. J’ajouterais même que, assez rapidement, Mélenchon devrait mettre en place cette fameuse vaccination obligatoire dont rêve la gauche, pour le plus grand plaisir de l’industrie pharmaceutique.
Ces reniements en cascade,joints aux affaires qui ne tarderont pas à éclater, devrait faire le lit de cette République nécrosée dont nous ne parvenons pas à sortir.
Et si Mélenchon ne se reniait pas ?
Certains me diront, à juste titre, que j’ai mauvais esprit et qu’après tout, Mélenchon n’obtempérera pas forcément aux injonctions prussiennes.
Peut-être, effectivement. Et, à ce moment-là, commencera l’aventure. D’une part, les tensions européennes susciteront une intense spéculation sur l’euro, et sur les taux français, qui rendront le financement du déficit insupportable. Dans ce cas-là, Mélenchon devra prendre des mesures d’exception.
Dans la pratique, la France sera dans une situation proche de celle de 1794, au moment où l’hyperinflation a sévi, créant un monumental désordre politique et social. Là encore, le régime ne devrait guère y survivre et, comme en 1789, les tensions avec l’Allemagne devraient rapidement croître, plongeant le continent dans un fabuleux chaos.
Bref, que Mélenchon se renie ou pas, la situation politique sera explosive et désagrégera un peu plus des institutions à bout de souffle.
Le scénario idéal serait évidemment que Mélenchon entame un bras de fer avec l’Europe et la fasse exploser. Ce sera économiquement et socialement coûteux pour les Français… mais cette rude épreuve remettra de nombreuses pendules à l’heure. Il faut savoir souffrir pour être heureux.
Si, comme je le pense, Mélenchon ne va pas au bout de sa logique et plie pour jouir des ors de la République, nous vivrons une redoutable implosion fondée sur la désespérance des masses qui imaginent qu’il existe encore une issue démocratique à nos problèmes.
Nous entamons l’épreuve de vérité, en réalité. Et l’histoire jugera de notre courage dans l’épreuve.
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