La guerre n'est jamais le meilleur choix, néanmoins, une piqûre de rappel s'impose pour comprendre au mieux le cours des événements actuels. Christophe
Billet de synthèse générale sur la Crise ukrainienne. C’est l’aboutissement du travail mené depuis 3 mois…
Je n’ai pas prétention à détenir la Vérité, c’est un complément pour mieux comprendre une situation complexe d’affrontements géostratégiques faisant basculer une situation où une partie de la population manifeste pacifiquement pour plus de Droits à un putsch sanglant…
Il est donc extrêmement important de ne surtout pas céder à la tentation d’y voir je ne sais quel « complot ».
Tout n’est donc pas de la « faute » des États-Unis, c’est aussi le résultat d’une conjonction de positions contradictoires de l’Union européenne et de la Russie, et d’un manque de coopération multilatérale.
P.S. comme la série Ukraine s’est construite dans l’urgence (et souvent dans l’indignation), c’est ce billet qui fait foi pour donner notre vision finale de la situation…
Contexte général
En 2010, le Viktor Ianoukovytch était élu Président de l’Ukraine avec 52 % des voix – pour un mandat allant jusqu’en 2015. L’OSCE a reconnu la parfaite validité de cette élection.
L’hétérogénéité des résultats (comme dans la plupart des élections) était frappante :
On a un gradient d’Est en Ouest, où le président élu passe de plus de 95 % des voix à moins de 5%…
Ceci souligne la très grande hétérogénéité du pays (et donc sa fragilité – vu qu’il n’existe de façon indépendante que depuis 25 ans). Il comprend en réalité des régions très différentes en termes de population, de langue ou d’Histoire :
L’Est, russophone est en fait tourné vers la Russie ; l’Ouest est tourné vers l’Union Européenne.
Les négociations économiques et commerciales
Bien qu’ayant été élu essentiellement par l’Est russophone, cœur industriel du pays travaillant avec la Russie, Viktor Ianoukovytch a décidé en 2011 – sous la pression des oligarques – de mener à terme les négociations pour signer un accord d’association et de libre-échange avec l’Union Européenne, et ce alors que l’Ukraine en avait déjà un avec la Russie. Soulignons la folie de ce projet :
1/ l’économie ukrainienne étant totalement non compétitive face à celle de l’UE. Ce pays est toujours très loin du niveau de PIB par habitant du temps de l’URSS !
2/ l’Ukraine étant le pays le plus pauvre d’Europe (avec un salaire minimal à 100 € par mois, soit 30 % inférieur à celui en Chine !), un accord de libre échange va être mortifère pour l’emploi européen :
Le Président Ianoukovytch espérait en fait gagner sur les deux tableaux – ce qui n’était pas du tout réaliste. Évidement, cela n’a pas marché : le 25 février 2013, José Manuel Barroso indiqua : « Un pays ne peut à la fois être membre d’une union douanière et dans une zone avancée de libre-échange avec l’Union européenne ». L’Union Européenne commettait donc l’erreur tragique de demander à l’Ukraine de choisir son camp…
La Russie mit alors la pression sur l’Ukraine l’été 2013, commençant à freiner ses importations pour protéger son économie. Le porte-parole de la Commission européenne John Clancy, déclara alors le 23 aout 2013 : « Toute menace économique russe dirigée contre l’Ukraine et liée à la signature éventuelle d’un accord d’association avec l’UE est inadmissible. »
Ces échanges se poursuivent jusqu’à ce que, l’économie ukrainienne se détériorant, Ianoukovytch demande à l’UE une assistance de 20 Md€ par an, et que l’UE ne lui accorde que 600 M€. François Hollande a alors déclaré : « Nous ne pouvons pas, comme le président ukrainien le souhaite, payer l’Ukraine pour qu’elle rejoigne l’accord d’association. Non, nous ne paierons pas. » Excellent choix, mais alors pourquoi vouloir associer alors l’Ukraine et tenter de la détacher de la zone d’influence russe ?
Par ailleurs, le FMI conditionnait le versement d’un prêt à l’Ukraine à une nette diminution des dépenses sociales, en particulier au niveau du subventionnement du prix du gaz, et à une privatisation d’entreprises publiques.
Par ailleurs à partir de l’été 2013, de grands débats ont eu lieu en Ukraine sur l’opportunité de signer ou non cet accord. En particulier, l’Est du pays s’inquiétait des importantes conséquences négatives qu’il aurait sur leur activité économique. A contrario, des ONG pro-européennes se mobilisèrent (surtout à Kiev) en octobre/novembre pour récolter des centaines de milliers de signatures pour des pétition pro-UE.
Le 21 novembre, Ianoukovytch indiqua qu’il différait la signature de l’accord d’association – un sondage indiquant que seuls 35 % des Ukrainiens estimaient qu’il avait tort. Il précisa qu’il recherchait désormais un accord trilatéral UE-Ukraine-Russie, et demanda que soient mises en place de telles négociations. Proposition censée, mais brutalement rejetée par Manuel Barroso : « Quand nous signons un accord bilatéral, nous n’avons pas besoin d’un traité trilatéral »
Vladimir Poutine répliqua alors : « Un accord de libre-échange Ukraine/UE représenterait une grande menace pour nous. [Cela] déboucherait sur une hausse du chômage en Russie. […] Devons-nous étrangler des pans entiers de notre économie pour que l’Europe nous apprécie ? »
Notons que l’hubris européenne est très étonnante, refusant de tenir compte des intérêts des autres parties concernées, dans un manichéisme étonnant.
Prenons une analogie : c’est finalement comme si :
- l’Espagne négociait un accord de libre circulation des personnes avec l’Algérie,
- la France s’inquiétait – ayant elle-même une frontière avec l’Espagne et un accord de libre circulation des personnes (Schengen)
- du coup l’Algérie critiquait alors la France en expliquant qu’un pays tiers n’a pas à s’ingérer dans un accord bilatéral algero-espagnol ! Sauf que, quand ledit accord bilatéral a des conséquences importantes sur vous, vous n’êtes plus vraiment un « pays tiers »…
Ceci n’est nullement une exagération. Les anciens chanceliers allemands ont une très grande lucidité – certains Français aussi :
« Bruxelles s’impose également trop sur la scène politique mondiale, bien que la plupart des commissaires n’y comprennent pas grand-chose. L’exemple le plus récent est la tentative de la Commission de l’UE d’annexer l’Ukraine. Ainsi que celle d’attirer à elle la Géorgie. Faut-il rappeler que la Géorgie ne se trouve pas en Europe. C’est de la mégalomanie, nous n’avons rien à faire là-bas! [..] Le risque que la situation s’aggrave, comme en août 1914, augmente de jour en jour. [Helmut Schmidt, Bild, 16/05/2014 – à lire ici]
WAS : « Quelle est la principale raison de l’aggravation de la crise que nous constatons actuellement ?
Gerhardt Schröder : L’erreur fondamentale a été la politique d’association de l’UE. L’UE a ignoré que l’Ukraine est un pays profondément divisé culturellement. Depuis toujours les gens du sud et de l’est de l’Ukraine se sont orientés vers la Russie, et l’ouest plutôt vers l’UE. On aurait pu parler d’un accord d’association, mais en même temps en parler avec la Russie ! Le « tout ou rien » – soit l’association avec l’Union européenne soit l’union douanière avec la Russie – a été l’erreur initiale. » [Gerhardt Schröder, WAS, 11/05/2014 – à lire ici]Elkabach : « Quel jeu jouent les Américains, Valéry Giscard d’Estaing ?
VGE : Ce n’est pas clair mais ils ont soutenu le désordre, ils ont poussé au désordre en Ukraine probablement pour affaiblir la Russie mais c’est un jeu très imprudent, parce qu’on ne sait pas ce que ….
Elkabach : Vous voulez dire que les Américains et Obama jouent le désordre en Ukraine, c’est ça que vous dites ?
VGE acquiesce. [Valéry Giscard d’Estaing, Europe 1, 11/05/2014 – à lire ici]
Soulignons aussi que de hautes personnalités ont fait appel à la modération et à l’équilibre dans l’affaire ukrainienne – sans succès… Comme Henry Kissinger, Regis Debray et Gabriel Robin (l’ancien conseiller diplomatique de Pompidou et Giscard) (et ici sur l’Europe), Helmut Schmidt et VGE, Gerhard Schroder, Pierre Maillard (l’ancien conseiller diplomatique du général de Gaulle), Jacques Attali, Hubert Védrine (là), Marie-France Garaud, Hélène Carrère d’Encausse, Pascal Marchand, Jean-François Kahn, Sergei Khrouchtchev, (ou là), l’ambassadeur Pierre Charasse, le journaliste Neil Clark, le Stern, Vladimir Féderovski. Et même les anciens propos de George Kennan sont éclairants.
Ianoukovytch signe finalement le 17 décembre 2013 un accord avec la Russie, celle-ci acceptant d’injecter 20 Md$ par an en Ukraine.
L’histoire aurait pu s’arrêter là, finalement pour le mieux pour l’Ukraine : Crimée conservée, faillite évitée, avantages sociaux des Ukrainiens préservés, risque de dislocation du pays évité… Et pour l’UE : pas de concurrence à 100 € par mois, pas de soutien financier à apporter…
Mais c’était compter sans la réaction des nationalistes ukrainiens europhiles de l’Ouest : des petites manifestations dites EuroMaïdan ont alors eu lieu dès le refus de signer l’accord avec l’UE. Les oligarques ukrainiens, l’UE et les USA ont alors mis de l’huile sur le feu EuroMaidan…
En effet, outre le rapprochement avec l’UE, la foule (venant surtout de l’Ouest et de Kiev) demande rapidement le départ du Président Ianoukovytch – pourtant légitimement élu. Rappelons que si ce Président était probablement corrompu (comme l’ont été tous ses prédécesseurs et la vaste majorité de la classe politique ukrainienne – ce mal ronge le pays), il n’était en rien un dictateur. L’Ukraine était une Démocratie « correcte » à défaut d’être exemplaire, se classant au niveau de la Turquie ou du Mexique. Il n’y avait aucune violence d’État envers les opposants – et des élections présidentielles libres allaient avoir lieu en 2015 – où le Président était d’ailleurs donné largement en tête du premier tour dans les sondages avec 36 % des voix.
Cependant, début décembre, place Maïdan à Kiev, pour soutenir ces manifestants demandant le départ du Président élu, ont défilé : la ministre américaine des Affaires étrangères pour l’Europe Victoria Nuland, les sénateurs américains John McCain et Chris Murphy, le chef de la diplomatie allemande Guido Westerwelle, le ministre des Affaires étrangères canadien John Baird, le ministre des Affaires étrangères de Suède Carl Bildt, la vice-Présidente de la Commission Européenne Catherine Ashton – l’opposition ayant également été reçue par le Commissaire européen à l’Élargissement et à la Politique européenne de voisinage Stefan Fuele, Angela Merkel, le ministre des Affaires étrangères de Pologne Radek Sikorski et Laurent Fabius… Ingérence ?
La ministre américaine des affaires étrangères pour l’Europe distribuant des biscuits place Maïdan en décembre 2013…
C’était un jeu très dangereux, car ce mouvement a ravivé les tensions entre les régions du pays, évidemment très divisées :
Le putsch
Le mouvement a alors gonflé, jusqu’au record de 500 000 manifestants, le 1er décembre, jour où ont éclaté les premières émeutes.
Ce mouvement comprenait 3 branches politiques (alliées depuis 2 ans) : le parti de droite dure « Patrie » de Ioulia Tymochenko (dont le modèle est Margaret Thatcher), le parti libéral « Udar » du boxeur Vitali Klitschko (qualifié par la presse allemande de « Notre homme à Kiev » et soutenu par Angela Merkel) et le parti néo-nazi « Svoboda » d’Oleg Tiagnybok – dont nous reparlerons. Bref, ce n’était pas spécialement un mouvement gauchiste… Regardez cette manifestation d’étudiants « Pro-UE » à Lviv (bastion du fascime nationaliste)
Ensuite le mouvement a duré, avec quelques dizaines de milliers de manifestants réguliers occupant la place.
Redisons-le : probablement 90 % des manifestants étaient pacifiques, démocrates, anti-oligarques, anticorruption et pro-européens. (La suite des évènements montrera à quel point on s’est joué d’eux…)
Soulignons cependant que cela ne leur donne pas raison : en Démocratie (comme l’était l’Ukraine), c’est le vote et non la rue qui décide des choix fondamentaux. Soulignons aussi que l’UE se retrouve à signer un accord d’association avec l’Ukraine (et la Géorgie…) sans que ses citoyens ne soient consultés.
Ainsi, ce beau mouvement a finalement attiré moins de monde que la « Manif pour Tous » ou que les manifestations contre la réforme des retraites de Nicolas Sarkozy…
Et si ces deux derniers mouvements français n’on pas obtenu ce qu’ils voulaient – et encore moins le départ du Président -, c’est qu’ils ne disposaient pas de la « spécialité locale » de Maïdan : les milices « d’auto-défense » apparues assez vite en décembre – qui étaient des milices paramilitaires – dont une bonne partie composée de personnes violentes, quasi-fascistes -, dont les milliers de membres affrontèrent régulièrement les forces de l’ordre.
Avouons qu’il devient dur pour une démocratie de se défendre face à ce genre d’individu (masque à gaz + bouclier + gilet pare-balles…) :
La situation bascule le 18 février, jour où ils ouvrent le feu sur les policiers, qui comptent près de 10 morts par balle ce seul jour, obligeant ainsi le gouvernement à autoriser le tir à balles réelles en situation de « légitime défense contre des miliciens » – il est évidement interdit à la police de tirer contre des civils désarmés !
Les évènements basculent alors dans le sang le 20 février. On compte plus de 100 morts chez les manifestants – la plupart tués par des snipers dont l’origine semble très suspecte (comme l’a souligné en off un ministre estonien à Catherine Ashton :
ou un beau reportage de la télévision allemande ARD) On a appris mi-mai que la plupart des balles mortelles ne venaient pas des forces de police et que la plupart des preuves (armes, balles, douilles, documents) avaient été perdus ou volés. (Source). À ce stade de manipulation, il y a de réels soupçons sur la possibilité que des snipers putschistes aient tiré à la fois sur les forces de l’ordre et sur les manifestants désarmés, et soient responsable d’une bonne partie des décès.
Au niveau des policiers, le bilan officiel est tombé mi-mai : « 1127 policiers et gendarmes ont subi des dommages corporels. De ce total, 196 ont reçu des blessures par arme à feu, 17 gendarmes et policiers ont été tués. Au moment où les gendarmes et les policiers ont reçu ces blessures, ils ne portaient pas leurs armes de service. » (Source)
Au même moment, de nombreuses exactions ont eu lieu dans le pays – comme ici contre Rostislav Vasilko, le secrétaire général du Parti Communiste à Lviv, battu et torturé par la foule (les prêtres extrémistes catholiques et orthodoxes ont aussi joué un rôle non négligeable dans ces évènements) :
Les 21 février un accord est signé entre le Président et l’opposition, prévoyant des élections anticipées et un gouvernement d’union nationale – le tout avec la signature de plusieurs ministres européens le garantissant (Allemagne, France, Pologne).
Mais les milices de Maïdan refusent l’accord (et rappelons qu’elles ne représentaient qu’une infime partie du mouvement Maïdan, mais une minorité violente, armée et déterminée…). Le coup d’État a réussi, le Président Ianoukovytch (dont la vie est menacée) fuit alors le pays le 22 février. Il est destitué de façon inconstitutionnelle par l’Assemblée (pas d’enquête par la Cour constitutionnelle, pas de débats contradictoires, majorité de 75 % des députés non atteinte…) qui nomme le 27 février un nouveau Président par intérim et un nouveau gouvernement, dirigé par Arseni Yatseniouk.
Le Président par Intérim Alexandre Tourtchinov, John Kerry, Le Premier Ministre Arseni Yatseniouk
Il est parfaitement conforme à ce que souhaitait le gouvernement américain, puisqu’on dispose de l’interception d’une communication téléphonique de Victoria Nuland le définissant (ou se trouve son grandiose Fuck the EU):
Les puissances occidentales refusent finalement d’exiger l’application de l’accord du 21 février, et le reconnaissent.
Un gouvernement fascisant sur les bords
Bien loin d’être « d’union nationale », il ne comprend pratiquement que des ministres de l’Ouest de l’Ukraine et de Kiev.
Au niveau politique, en voici la composition au 22/02 :
On comptait le 27 février dans ce gouvernement reconnu par l’Occident 6 ministres (sur 19) appartenant ou ayant appartenu à des organisations néonazies/fascistes, dont 4 au parti Svoboda :
- 1/ Oleksandr Sych. vice-Premier ministre. Membre du Comité exécutif de Svoboda – en charge de l’idéologie…
- Citation : “Les femmes feraient mieux d’apprendre à mener un genre de vie pour éviter le risque de viol, y compris celle de la consommation d’alcool et d’être en mauvaise compagnie.”
- 2/ Ihor Tenyukh, ministre de la Défense, Svoboda. Il a finalement été viré après la perte de la Crimée, car il a été jugé trop mou (sic) et aurait dû répliquer par les armes à la Russie
- 3/ Andreï Mokhnyk,ministre de l’Écologie, député de Svoboda, 41 ans
- Citation : « Il existe aujourd’hui en Ukraine les conditions de brassage pour une «troisième révolution» : elle sera à la fois sociale et nationale. »
- 4/ Ihor Shvaika, ministre de l’Agriculture, député de Svoboda, 38 ans. Il a comparé la communauté vietnamienne de Kharkiv à une “tumeur maligne”
- 5/ Serhiy Kvit. ministre de l’Éducation et de la Science, ancien responsable du groupe néonazi Trident, ami très proche du leader de Pravy Sektor / Secteur Droit Dmitro Iarosh (c’est ce leader qui a été applaudi le soir du 21 à Maïdan. [pcfbassin.fr]. Nous avons présenté ce mouvement dans ce billet et celui-ci).
- 6/ Dmitri Boulatov, ministre de la Jeunesse et des Sports, membre d’Autodéfense ukrainienne (UNA-UNSO, groupe néonazi paramilitaire), connu aussi pour ses liens très étroits avec le groupe « Secteur Droit ».
Voici pour les ministres du cabinet.
Mais il y a aussi des néonazis à d’autres postes clefs :
- Andrei Parubiy, est secrétaire du Conseil national de Sécurité et de Défense (organe qui chapeaute le ministère de la Défense et les Forces armées). Il est membre du parti Patrie du 1er ministre, mais il a cofondé Svoboda en 1991 et en a dirigé la section paramilitaire…
- Oleg Makhnitsky est Procureur général de Kiev, membre de Svoboda (c’est lui qui « enquête » sur les snipers de Kiev – et il a « malencontreusement » perdu les pièces…)
- Tatiana Chornovol est à la tête du Bureau anti-corruption – elle a été membre de l’UNA-UNSO ; elle a même été la responsable de la communication…
- Egor Sobolev dirige désormais le Bureau d’Épuration de l’administration (= »Lustration »).
Bien entendu, ils n’ont pas tous les postes clefs. L’Intérieur revient par exemple à l’oligarque Arsen Avakov (400 millions de $ de fortune) qui avait été mis sur la liste internationale d’Interpol des personnes recherchées – il s’était enfui en Italie en 2012….
Notons enfin que le parti Patrie compte 6 ministres : Premier ministre, vice-Premier Ministre, Ministre des Affaires sociales, ministre des Affaires Internes, ministre des Infrastructures et un ministre sans portefeuille.
Ce gouvernement a rapidement nommé des oligarques comme gouverneurs de grandes régions : Igor Kolomoïski à Dnepropetrovsk (propriétaire du groupe “Privat” qui comprend plus d’une centaine d’entreprises) ; Sergueï Tarouta à Donetsk (principal actionnaire du groupe métallurgique ISD fondé avec Vitali Gaïdouk – vice-gouverneur de la région de Donetsk à l’époque où Ianoukovitch dirigeait la région) ; Vladimir Nemirovski – financeur d’Arseni Yatseniouk – à Odessa.
Suite à différentes défections fin février, le Parlement (élu en 2012) a basculé, et la nouvelle majorité se compose ainsi :
Rappelons que l’Ukraine connait désormais un régime parlementaire, où les pouvoirs du Président sont limités.
Enfin, ce gouvernement « putschiste » intérimaire a tout simplement décidé de signer (partiellement) l’accord d’association avec l’UE le 21 mars 2014 – sans demander leur avis aux Ukrainiens, ni se soucier des conséquences pour l’Est du pays. L’UE a décidé à cette occasion d’ouvrir unilatéralement ses frontières aux produits ukrainiens…
Cet individu nous a associés à l’Ukraine, lui ouvrant nos frontières…
Saint Rompuy tenant la Bible ?
« Heureux les pauvres en esprit car le Royaume des cieux est à eux » (Mt 5, 3)
Le parti néo-nazi Svoboda
Le parti Svoboda (« Liberté ») – un des deux partis composant le gouvernement – ne porte ce nom que depuis sa tentative de respectabilisation de 2004. Jusqu’à cette date (et depuis sa création en 1991) son nom était le Parti National Social d’Ukraine (SNPU) – évidemment copié sur le nom du parti nazi NSDAP.
L’emblème du SNPU était la WolfsAngel (ou « Rune du Loup »), symbole classique chez les néo-nazis. La Rune du Loup était l’emblème de la Panzerdivision SS Das-Reich – qui a rasé le village d’Oradour-sur-Glane et exterminé sa population le 10 juin 1944.
En juillet 2004, le leader de Svoboda Oleh Tyahnybok tint ces propos sur la tombe d’un commandant nationaliste de l’UPA :
« L’ennemi est venu et a pris leur Ukraine [à l’UPA]. Mais ils [les combattants de l’UPA] n’avaient pas peur; De même, nous ne devons pas avoir peur. Ils ont pris leur fusil sur leur cou et sont allés dans les bois. Ils se sont tenus prêts et combattirent contre les sales Russes, les Allemands, les Juifs et les autres ordures qui voulaient reprendre notre État ukrainien! Et il faut rendre l’Ukraine aux Ukrainiens ! Et par conséquent, notre tâche pour chacun d’entre vous – les jeunes, les plus vieux, les cheveux gris – est que nous devons défendre notre Patrie ! Il faut que l’Ukraine soit en fin de compte rendue aux Ukrainiens. Vous, jeunes hommes et vous, cheveux gris, êtes la combinaison parfaite, celle que la mafia judéo-moscovite qui dirige l’Ukraine craint le plus. » (Source : The Jamestown Foundation)
Le 23 novembre 2009, Le Front National français signe un accord de coopération avec Svoboda ; Jean-Marie Le Pen annonce la « collaboration » des partis, car ils ont « évidemment beaucoup de points communs, d’idéaux communs ». Le président de Svoboda indique : « Nous avons un but commun : bâtir l’Europe des Nations Libres ». Svoboda fait partie, à titre d’observateur, de l’Alliance Européenne des Mouvements Nationaux, fondée par Bruno Gollnisch. Il appartient aussi au Front National Européen, qui regroupe Aube Dorée, le NPD, etc.
Mais Svoboda a fini par être rejeté de ces organisations en raison de son extrémisme… (sic.)
En 2012, ce parti passa une alliance électorale avec le parti Patrie de Ioulia Tymochenko, dirigé… par les dirigeants actuels de l’Ukraine :
Aux législatives de 2012, Svoboda obtint plus de 10 % des voix – en fait entre 1 % et près de 40 % des voix selon les régions…
Cela a permis aux nouveaux députés de prendre leurs nouvelles fonctions au Parlement à bras le corps :
Le 13 décembre 2012, le Parlement européen vota une résolution condamnant Svoboda:
Le Parlement Européen :
- s’inquiète de la montée du sentiment nationaliste en Ukraine, qui s’est traduit par le soutien apporté au parti « Svoboda », lequel se trouve ainsi être l’un des deux nouveaux partis à faire son entrée à la Verkhovna Rada; rappelle que les opinions racistes, antisémites et xénophobes sont contraires aux valeurs et principes fondamentaux de l’Union européenne et, par conséquent, invite les partis démocratiques siégeant à la Verkhovna Rada à ne pas s’associer avec ce parti, ni à approuver ou former de coalition avec ce dernier ; […]
- souligne que le fait que deux dirigeants de l’opposition, à savoir Ioulia Timochenko et Iouri Loutsenko, ainsi que d’autres personnes aient été détenus en prison pendant les élections a eu des répercussions négatives sur le processus électoral ; […]
- appelle l’Ukraine à mettre fin à l’exercice sélectif de la justice à tous les niveaux de gouvernement et à permettre aux partis d’opposition de prendre part à la vie politique sur la base de conditions d’égalité; exhorte à cet égard les autorités à libérer et à réhabiliter les opposants politiques poursuivis, comme Ioulia Timochenko, Iouri Loutsenko et d’autres personnes encore. « Source : Parlement européen«
En 2012, Yaakov Bleich, le Grand Rabbin de l’Ukraine, a déclaré: « Svoboda est une énigme à bien des égards, c’est un parti nationaliste avec des éléments antisémites en lui. » Vyacheslav A. Likhachev, expert pour le Congrès Juif Eurasiatique, a déclaré que « ce parti a un noyau très antisémite au cœur de son idéologie », que « ses leaders sont connus pour tenir des discours ouvertement racistes et antisémites » et qu’il conduit à « la légitimation symbolique de néo-nazis et de l’idéologie antisémite aux yeux de la société. » Enfin Shimon Samuels, le Directeur des relations internationales du Centre Simon Wiesenthal a indiqué que « Svoboda est composé des mêmes éléments que les auxiliaires ukrainiens des Nazis qui ont commis des massacres de masse de Juifs, de Russes et de Polonais. » « Source : JERUSALEM POST »
Le Centre Simon Wiesenthal l’a d’ailleurs inclus en 2012 dans son Top Ten mondial des antisémites (avec les frères égyptiens, les mollahs iraniens, etc.) – à propos de ses déclarations visant à « purger l’Ukraine de 400 000 Juifs et autres minorités » :
« Source : Le Centre Simon Wiesenthal »
En mai 2013, le Congrès Juif Mondial a appelé à l’interdiction du « parti néo-nazi Svoboda ».
« Source : UKRINFORM »
En juillet 2013, 25 % des députés de la Knesset (Parlement israélien, 120 députés) ayant même pris la plume pour alerter le Président du Parlement européen sur « le parti néo-nazi Svoboda » :
« Cela fait plus de 6 mois que nous recevons des rapports alarmants sur la nouvelle tendance nationaliste en Ukraine agitée par le parti néo-nazi Svoboda, qui a remporté plus de dix pour cent des voix aux dernières élections législatives. Nous sommes alertés des menaces et des attaques calomnieuses lancées par les membres de ce parti contre les Juifs, les Russes et d’autres minorités. Ce sont des individus qui puisent leur inspiration dans les Nazis et glorifient ouvertement les meurtriers de masse des divisions SS ukrainiennes.
Nous avons également été choqués par le fait que ce parti n’est pas du tout isolé, mais jouit d’une pleine coopération avec les deux principaux partis de l’opposition en Ukraine [Ndt : Patrie et UDAR]. Malheureusement, ces partis n’ont absolument pas protesté contre les actions et les déclarations de leur partenaire extrémiste, mais ils se sont même compromis par leur propre glorification publique de criminels de guerre nazis ukrainiens.
Nous ne pouvons pas rester les bras croisés face au phénomène de néo-nazisme dans n’importe quelle partie du monde. Notre devoir est de parler et de communiquer avec nos collègues du monde entier pour joindre nos efforts pour éliminer les symptômes qui nous ramènent aux périodes les plus sombres de l’Humanité.
Nous apprécions la position ferme que le Parlement européen a exprimée sur cette question en décembre dernier. Nous tenons également à vous remercier pour le refus du Parlement européen d’avoir des relations de travail avec le parti Svoboda et pour la clarification de toutes les forces politiques opérant en Ukraine, afin qu’aucune tentative de glorification du nazisme ne soit tolérée par l’Europe. Nous espérons travailler ensemble pour un avenir meilleur et plus sûr pour l’Europe et le monde entier.»
Son programme prévoit entre autres de re-doter l’Ukraine de l’arme nucléaire et, dans un autre registre, de criminaliser l’homosexualité (désignée sous le vocable de « perversion sexuelle »)
Des fois qu’il reste des doutes, intéressons-nous enfin à quelques députés de Svoboda…
1/ Yuri Mykhalchyshyn. Titulaire d’un doctorat en sciences politiques, il joue le rôle de « l’intellectuel » du parti. Il a soutenu sa thèse en 2009, portant sur « La transformation d’un mouvement politique en un parti politique de masse d’un nouveau type, par exemple NSDAP et PNF (analyse comparative du parti nazi allemand et du parti fasciste italien). » Il a beaucoup analysé la façon dont le parti nazi a utilisé les faiblesses des Démocraties occidentales… Il a fondé un « Centre de Recherche Politique Joseph Goebbels » en 2005, changeant plus tard le « Joseph Goebbels » en « Ernst Jünger ». Ce centre réalise des traductions en ukrainien de livres nazis. Il a qualifié la période de l’Holocauste comme « une période de lumière dans l’histoire ». Sa phrase fétiche est « Nous sommes contre la diversité. L’Ukraine est pour les Ukrainiens ».
Il anime le blog nachtigal88 – « Nachtigal » est le nom du bataillon ukrainien de la Wehrmacht qui a envahi l’Ukraine en juin 1941, « 88 » est un chiffre néonazi : le H est la 8e lettre de l’alphabet, donc 88 = HH = Heil Hilter). Il y a par exemple traduit l’ABC national-socialiste de Goebbels :
Le 14 mai 2014, il propose au Parlement une méthode efficace de lutte contre les terroristes occupant Slaviansk : évacuer la population et « employer l’artillerie lourde et utiliser le soutien aérien. Quelques hélicoptères MI-24 suffiront à transformer Slaviansk en un paysage lunaire. »
2/ Oleg Pankevich. Il participe régulièrement à des cérémonies de ré-inhumation de soldats de la division Waffen-SS Galicie (retrouvés dans des terrains) comme ici le 28 juillet 2013 à Gologory en Galicie, sous l’œil bienveillant de l’Eglise et des autorités locales. (à la fin, en chemise traditionnelle blanche) :
3/ Irina Sehk. Le 21 juillet 2013, elle a honoré à Brody la mémoire des glorieux Waffen-SS ukrainiens tombés lors de la bataille de Brody (en juillet 1944) :
4/Irina Farion. C’est la linguiste du groupe.
En 2010, en visite peu après dans une maternelle, elle explique aux enfants de 5 ans portant des prénoms russes que s’ils ne changent pas leur prénom pour un prénom ukrainien, « il faudra qu’ils fassent leur valise et partent à Moscou ». Elle a indiqué peu après qu’il était nécessaire, au niveau législatif, d’engager des poursuites criminelles contre les citoyens russophones qui ne veulent pas apprendre la langue ukrainienne : « Nous avons 14 % d’Ukrainiens qui ont indiqué que leur langue maternelle était le Russe, qui est la langue de l’occupant. Cela indique une altération terrible de la conscience de ces 5 millions d’Ukrainiens dégénérés ; ils ont besoin d’être secourus. […] Il faudrait poursuivre et emprisonner ceux qui s’obstineraient à ne pas vouloir être secourus en apprenant l’Ukrainien.» – précisant même « c’est comme ça que les Français font – on y emprisonne pour six mois les gens pour l’utilisation d’anglicismes… » [sic.]
En juin 2012, elle déclare avoir obtenu le licenciement d’un conducteur de minibus de Lviv, car celui-ci avait refusé d’éteindre une radio musicale russophone et de changer de poste.
Le 8 mai 2013 Irina Farion déclare lors d’un rassemblement à la mémoire des victimes de la Seconde Guerre mondiale que la « victoire » soviétique ne serait jamais une fête en Ukraine. En réponse, le gouverneur de Kharkiv a déclaré Madame Farion « totalement débile ».
Elle a indiqué en avril 2014, à propos de la loi renforçant les sanctions pour « Séparatisme », visant les Ukrainiens russophones :
« Pour ma part, j’agirais beaucoup plus sévèrement contre les séparatistes : je les fusillerais tout simplement, pardonnez-moi.
Écoutez: l’ennemi se comporte en maître sur notre sol ! On devrait les chasser, comme en 1654 [NdT : Guerre Russo-polonaise]. C’est pourquoi le vote de cette loi est tout à fait justifié, et je pense que l’avenir de l’Occident le vaut. Nos hommes ont peur pour leur vie.
C’est pourquoi les créatures qui s’aventurent dans la voie du séparatisme ne méritent que la mort… » « Source : TV-novosti.ru«
Voici donc sa réaction le 3 mai 2014, le lendemain de l’incendie d’Odessa, sur sa page Facebook :
« Bravo Odessa. Perle de l’esprit ukrainien. Patrie des grands nationalistes Ivan [père du second, homme d’État, médecin, écrivain] et Iouri Lipa [né à Odessa, médecin, poète, publiciste (nationaliste); rejoint l’UPA en 1943, fusillé par le NKVD en 1944]. Que le diable les brûle en enfer. Les meilleurs insurgés sont les fans de football. Bravo. »
5/ Igor Mirochnitchenko. Il a déclaré que l’actrice Mila Kunis n’était « pas une Ukrainienne mais une « sale youpine » (griaznaia jidovka) », et que l’homosexualité était responsable de la transmission de maladies sexuelles et du SIDA.
Mécontent que la télé ukrainienne ait diffusé des images du discours de Poutine accueillant la Crimée, il est allé bastonner le directeur de la télévision publique Alexander Panteleymonov jusqu’à ce qu’il démissionne.
On le voit ici en plein débat parlementaire avec les communistes :
6/ Edouard Leonov et Ruslan Zellik. ils arborent ici fièrement les 2 chiffres néo-nazis 14 et 88 :
7/ les dernières déclarations d’Oleh Tyahnybok
Son discours suite au drame d’Odessa :
« Ce sang est sur les mains de Poutine. Il est l’organisateur de ce massacre, qui a été conçu pour devenir le déclencheur d’une crise dans tout le Sud-Est de l’Ukraine. […]
D’autre part, le grand nombre de victimes a probablement été causé par le fait que la majorité de nos organes de sécurité restent contrôlés par ceux qui ne servent pas le peuple de l’Ukraine mais la Russie. Par conséquent, sans épuration (« lustration ») immédiate et radicale, il n’y aura plus d’espoir de préserver l’intégrité de l’État ukrainien. […]
Hier, les événements tragiques d’hier à Odessa, où les unités terroristes armées de Poutine ont attaqué une marche pacifique ukrainienne [!!!], qui a conduit à la mort de dizaines de personnes, ainsi que les meurtres de masse, [!!!], les enlèvements et la torture de citoyens en Crimée occupée [!!!] et dans le Donbass indiquent que la terreur anti-ukrainienne et la réalisation d’un nettoyage ethnique fait clairement partie des objectifs des saboteurs de Poutine en Ukraine.
Svoboda exige du gouvernement qu’il arme immédiatement les patriotes volontaires qui sont prêts à protéger l’intégrité territoriale de l’Ukraine et de contrer les terroristes, les armes à la main. Seule une action décisive, avec l’usage résolu de la force, pourra arrêter les terroristes de Poutine.
Les criminels doivent être punis. Si le gouvernement refuse de s’en charger, les patriotes ukrainiens s’en chargeront eux-mêmes. Nous ne laisserons pas la terreur anti-ukrainienne s’emparer de notre pays. »
Enfin le 7 mai, les députés communistes ont été virés d’une séance à huis-clos au Parlement. Oeg Tyagnibok a déclaré pour sa part :
« Après l’expulsion de la salle des séances de la faction du Parti communiste, la Verkhovna Rada d’Ukraine a pu commencer à « travailler de façon normale. Avant, nous n’étions plus en mesure d’obtenir le nombre de voix requis, par la faute du sabotage de certains députés, sur presque toutes les lois en discussion. »
Eh oui : il est minoritaire au Parlement, sabotaage ! Donc on expulse les communistes, et du coup il redevient majoritaire !
Le procureur général de Kiev (toujours le même, de Svoboda) a déclaré :
« Je pense que je vais bientôt proposer (de lever l’immunité) de plusieurs députés qui commettent des crimes et portent atteinte à l’intégrité territoriale de l’Ukraine« (Source)
Question : il faut quoi de plus pour qu’on appelle ce parti et ses membres « néonazis » (et plus simplement « d’extrême-droite ») et qu’on chasse ces gens du pouvoir ?
Patrie
Nous avons donc 30 % des membres du gouvernement rattachables au néonazisme – et dans des postes importants. Svoboda a environ 20 % des députés de la majorité.
On entend répondre : mais ils n’ont pas tout le pouvoir, c’est Patrie (de Timochenko) qui dirige.
Mais c’est quoi Patrie ? On répond parfois : c’est comme l’UMP.
Qu’a déclaré Timochenko ces derniers temps ?
Dans une conversation interceptée en mars :
« I.T. Il est temps de prendre nos armes et d’aller tuer ces maudits russes ainsi que leur leader. […] J’aurais trouvé un moyen de tuer ces connards. J’espère que je serai capable d’impliquer toutes mes relations. Et j’utiliserai tous mes moyens pour faire se soulever le monde entier afin qu’il n’y ait même plus un champ brulé en Russie. [..]
(son correspondant) J’ai parlé à Viktor (probablement Tourchinov). Il a demandé : “Que devrions nous faire maintenant avec les 8 millions de russes qui sont restés en Ukraine ? Ce sont des parias !”
I.T : Ils doivent être détruits avec des armes nucléaires ! » (Source)
Lors d’une conférence de presse à Nikolaïev en mai, Timochenko a conclu que, si elle n’était pas élue, un « troisième round révolutionnaire » (après la « révolution orange » de 2004 et le coup du Maïdan de février dernier) était inévitable : « Je ne veux plus être tenue pour responsable de l’échec de la révolution… Si le pays élit un autre président [que moi,] et comme ce ne peut être que le seul rival qui reste à ma hauteur [Porochenko], je crois que nous devrons préparer le troisième round de la révolution. Autrement, je ne vois aucune possibilité de changement, je connais parfaitement tous ces gens [Porochenko et son entourage]… » (Source)
Rappelons aussi qu’elle été condamnée pour s’être enrichie en gagnant des dizaines de millions sur le prix du gaz, et était poursuivie, suspectée d’avoir trempé dans plusieurs meurtres. (Source)
Une autre figure éminente de Patrie est Andrei Parubiy – le Secrétaire de la Sécurité nationale et de la Défense de l’Ukraine, et député de Patrie. C’était le « commandant » des milices de Maïdan…
Sauf que c’est surtout le co-fondateur du Parti national d’Ukraine avec Tyanibok en 1991 ! Et dont il a dirigé les troupes paramilitaires « Les patriotes d’Ukraine ».
Il a d’ailleurs rencontré en 1999 Jean-Marie Le Pen (et Samuel Maréchal, son gendre)…
Et là, il est reçu à l’OTAN qui lui fournit du matériel !! (Source)
Andriy Parubiy et le secrétaire général adjoint de l’OTAN, le General Alexander Vershbow
Il en appelle désormais à l’aide militaire américaine…
Le Premier ministre Yatseniouk : c’est un ami de Tyahnybok…
De plus sa fondation est financée par l’OTAN, le gouvernement américain et l’ambassade de Pologne…
Le Président de l’Ukraine par intérim, Alexandre Tourtchinov ? Il vient de demander l’interdiction du Parti Communiste :
Le député de Patrie Volodymyr Yavorivsky : il a déposé au Parlement la proposition de loi n°4176 visant à dépénaliser l’apologie et la justification publiques des crimes contre l’Humanité, la fabrication et la distribution des documents où les crimes des fascistes et de leurs partisans sont justifiés. (Source)
La député de Patrie Lesya Orobets (élue en 2012 avec l’étiquette Patrie). Elle a déclaré suite au massacre d’Odessa sur sa page Facebook :
« Ce jour est entré dans l’histoire. Les habitants d’Odessa, malgré la trahison de certains policiers, ont défendu la ville et prouvé à tout le monde qu’Odessa c’est l’Ukraine. Au prix de la vie des patriotes, ce fut une victoire spectaculaire. Les colonies de doryphores ont été liquidées. Les agresseurs ont attaqué perfidement les premiers et ont reçu la réponse adéquate.
Comme sur Maïdan, les femmes et les personnes âgées ont cassé les pavés. Odessa a brisé tous les rêves de Poutine. Il ne convoitait pas autant Dombass et ses mines non rentables (et bientôt il ne pourra même plus vendre son gaz) qu’il ne convoitait les ports. Je prie pour qu’à Donbass la volonté politique ne s’évapore pas et que les vies ne soient pas perdues en vain, pour que l’ordre et la paix reviennent. Nous devons encore récupérer la Crimée.
Mémoire éternelle aux Héros. »
Ils doivent apprécier les russophones dans l’Est… Bizarre qu’ils ne veulent plus être gouvernés par ces gens-là…
Et cette dame est née un 3 mai. Coïncidence énorme. Elle a donc posté un message le soir du 2 mai – soir du massacre d’Odessa – pour célébrer ses 32 ans :
« Les temps changent – les principes restent immuables. »
« 4 773 personnes ont aimé ça ». Et ça, c’est une députée du parti présenté comme « modéré » !
Modéré alors qu’il a passé une alliance en 2012 avec un parti néonazi !!! « Non mais allô quoi !!! »
Rappelons enfin que ce parti a voté avec Svoboda – le lendemain de la Révolution ! – le projet de loi supprimant le statut de langue officielle régionale au russe – ce qui a déclenché les tensions et le départ de la Crimée. Dans quel but – si ce n’est de créer de grosses tensions ?
Les mêmes ont déposé et voté une loi d’amnistie de tous les crimes commis à Maïdan, y compris les assassinats ! Plus personne ne peut être poursuivi…
Bref, des gens Biens, au pouvoir en Ukraine actuellement…
En janvier 2013, Tzipi Livni, l’ancienne vice-Premier ministre d’Israël a déclaré :
« Ceux qui essaient de donner une légitimité sont aussi coupables que le Parti Svoboda. C’est encore plus triste lorsque cela vient de politiciens principalement connus pour leur modération et la compréhension du contexte international de tels sujets. La position de l’ancien ministre des Affaires étrangères, Arseniy Iatseniouk, [Ndt : nouveau Premier Ministre] et c’est un euphémisme, laisse perplexe. […] Je pense qu’un phénomène comme le Parti social nationaliste totalitaire Svoboda ne doit pas être négligé et laissé sans réponse de la communauté internationale. Vous noterez que même les partis les plus radicaux en Europe ont refusé de coopérer avec Tiahnybok. Même le parti français d’extrême-droite de Marine Le Pen. Même le parti hongrois Yobik. Dans le monde d’aujourd’hui, il y a des règles de bienséance, des normes de la mémoire historique. Tiahnybok et son parti ont violé ces règles et ces normes. […] Je préconise de prendre toutes les mesures possibles pour supprimer les partis néo-nazis et leurs activités. »
Conclusion
Il y a une question centrale dans cette affaire, indispensable à cerner pour comprendre la suites des évènements : a-t-on affaire ou non à un gouvernement ukrainien (que nous soutenons) composé en partie (certes minoritaire) de néo-nazis et de réels fascistes ultranationalistes (soutenus par l’Ouest du pays) ?
Si on y répond oui, on est obligé de reconnaitre que cette situation ne peut qu’avoir de très graves conséquences pour l’unité du pays et ses relations avec la Russie (27 millions de Soviétiques sont morts à cause de cette idéologie durant la dernière guerre. Pour 1 soldat américain mort en Europe pour notre liberté, ce sont 60 soldats soviétiques qui tombaient. Cela laisse de sérieuses traces…).
À vous de juger !
Pour ma part, mon opinion est qu’on peut tout à fait qualifier ce « gouvernement démocratique » de soi-disant « Union nationale », par analogie avec la France, comme composé de :
- 30 % de néonazis ou de fascistes ; (celui-ci est un fait)
- 30 % de personnes qui seraient au Front National en France (et encore…) ;
- 30 % d’UMP ;
- 10 % de personnes de la société civile (Santé et Culture) – sans savoir à quel groupe elle se raccrochent, mais sûrement pas à des partis de gauche…
Et ceci explique la forte participation au référendum du 11 mai avec ces centaines de milliers d’électeurs – élément éloquent, mais oublié par les médias dès le lendemain…
C’était clairement un “vote de défiance” vis à vis du gouvernement de Kiev qui a déjà perdu une énorme part de sa légitimité dans l’Est. Ceci ne signifie pas que ces personnes ne restent pas attachées à l’Ukraine, la plupart (et contrairement à la population de Crimée qui était russe à 60 %) souhaitent simplement une fédéralisation du pays, pour que leur droits et intérêts légitimes soient préservés.
Un dernier élément. Pour incriminer la Russie dans ce qui est essentiellement un mouvement local (comme si un putsch néonazi au Canada s’attaquait au français – les Québécois régiraient, sans l’aide de la France ni en étant des « pro-Français » ; ce qui ne veut pas dire que les services secrets russes n’agissent pas ponctuellement, tout comme le font les services secrets américains), le gouvernement de Kiev a transmis des « preuves » à l’OSCE, « preuves » validées par le gouvernement américain. Le New York Times les a publiées. Il n’a pas fallu 24 heures pour qu’Internet explose de rire face à la manipulation grossière de photos floutées ou manipulées (lire ici) :
« Des photographies et signalements de l’Est de l’Ukraine, avalisés par l’administration Obama dimanche dernier suggèrent que beaucoup de ces hommes en kaki sont effectivement des membres des forces armées ou du renseignement russe – équipés de la même manière que les forces spéciales russes impliquées dans l’annexion de la Crimée en février. Certains des hommes photographiés en Ukraine ont été identifiés sur des photos de soldats russes clairement prises dans des circonstances différentes. […] « Il y avait un large consensus concernant le lien entre la Russie et certains des miliciens armés dans l’est de l’Ukraine, et les photographies présentées par les Ukrainiens la semaine dernière ne font que confirmer cela, c’est pourquoi les officiels des Etats Unis ont continué à défendre ce point de vue, » déclarait Jen Psaki, le porte-parole du Département d’Etat des États-Unis dimanche 20 avril. […] Des preuves supplémentaires de l’implication de la Russie dans les événements de l’Est de l’Ukraine sont contenues dans un dossier de photographies fournies par l’Ukraine à l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) […] . Des photos d’insurgés armés non identifiés prises dans l’Est de l’Ukraine y figurent, ainsi que des photos plus anciennes de ce qui semble être les mêmes hommes apparaissant dans une photo de groupe d’une unité militaire en Russie. » [New York Times, 20/04/2014]
Les « preuves » (soi-disant les mêmes personnes en Russie par le passé et dans l’Est de l’Ukraine actuellement) :
La « même personne barbue » (sic) en prenant des photos originales en haute résolution et pas en 50 000 pixels… :
(le père Noël avait un alibi…)
La seconde « preuve » du gouvernement :
Les mêmes « en Russie puis en Ukraine » :
Sauf que les 2 photos ont été prises le même jour au même endroit ! (ce qu’on voit en retrouvant les originales, comme ici, puisqu’elles ont été coupées grossièrement pour masquer la manipulation)
Mais rassurez-vous, nous n’avons nullement sanctionné ce gouvernement manipulateur, voulant nous entrainer dans une confrontation avec la Russie !
Il est vrai qu’il n’y a pas plus aveugle que celui qui ne veut pas voir :
« Les accusations d’antisémitisme portées contre Svoboda sont de la propagande russe […] contre la révolution démocratique. [Ndt : 17 policiers morts par balle pour chasser le président démocratiquement élu] […] Le nouveau gouvernement ukrainien est composé de démocrates européens qui travaillent pour les valeurs qui sont les nôtres ; il mérite notre soutien. […] Je ne vois aucun risque que Svoboda se détourne de la voie du développement démocratique. » [Carl Bildt, ministre des Affaires étrangères suédois, 6 mars 2014] (Source)
« Les valeurs qui sont les nôtres »… On comprend mieux, notez…
Bref, tout ça pour :
- qu’un oligarque remplace un autre oligarque dont il avait été le ministre et dont il a cofondé le parti ;
- que soit poursuivie la politique visant à rattacher de force l’Ukraine à l’UE, alors que la « frontière culturelle » passe en plein milieu de l’Ukraine – ce qui va causer encore plus de troubles à l’Est ;
- que l’Ukraine perde la Crimée ;
- que l’Occident risque de perdre la Russie…
Si les choses continuent, le pays va basculer dans la guerre civile. Et on a du mal à le comprendre en Occident, car on présente les combattants de l’Est comme des « terroristes » alors que la population locale les voit clairement comme des « résistants » – ce qui est loin d’être faux puisque le gouvernement fait intervenir l’armée contre eux…
(à 1’55) :
Et plus le gouvernement usera de la violence armée, plus les gens de révolteront, et plus il y aura des désertions dans l’armée (dont les médias parlent peu, alors que beaucoup de soldats sont passés avec armes du côté des opposants), et plus de l’aide viendra spontanément de l’Est, façon « brigades internationales de 1936″…
Car ceci est un milicien de la « garde nationale » créée par le gouvernement (attention, image dure) :
Mais laissons le mot de la fin à Laurent Fabius le 11 mars :
« Il faut être pragmatique, aussi [!]. Il est évident que le gouvernement actuel de Ukraine cherche à opérer le plus large rassemblement. Donc il ne prend pas seulement ses partisans [?], et il essaie de rassembler. Et parmi ces éléments de rassemblement, il fait appel à des gens, je dirais, qui ont pignon sur rue [!]. Je comprends tout à fait ça.
Maintenant quand on accuse ce gouvernement d’être d’extrême-droite, c’est faux ! C’est faux ! Il y a 3 membres [!] du parti Svoboda, qui est un parti plus à droite que les autres, mais l’extrême droite n’est pas au sein du gouvernement. » [Laurent Fabius, 11 mars 2014, France Inter]
Olivier Berruyer – Mai 2014
(billet édité, paru dans une première sous le titre « Le Gouvernement fascisant de Kiev que nous soutenons »))
Source : https://www.les-crises.fr/la-face-cachee-de-la-crise-ukrainienne/
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