Source : Consortium News, Elizabeth Murray, le 2 mai 2017.
Les médias américains mainstream sont très hostiles envers la Russie, alimentant ainsi un nouveau MacCarthysme, mais la presse ne fait aucune place aux gestes de paix des américains de base, écrit Elizabeth Murray, ex-analyste du renseignement des États Unis.
Par un après-midi ensoleillée de juin 2016, un groupe d’hommes et de femmes vêtus de maillots de bain ont couru vers les eaux chaudes de la mer Noire de Crimée et ont nagé avec exubérance vers l’horizon, apparaissant occasionnellement pour échanger des sourires et des rires. Ils ont lutté et battu des pieds au loin dans les vagues avant de faire demi-tour et de revenir vers le littoral de Yalta. Quelques nageurs se sont attardés dans les eaux accueillantes, conversant, hésitants, ou faisant des gestes pour franchir la barrière de la langue qui semblait, en fin de compte, être bel et bien surmontée par la bonne volonté. C’était la première nage russo-américaine annuelle pour la paix.
L’événement a réuni des membres d’une délégation de paix américaine parrainée par le Centre pour les Initiatives Citoyennes (CCI), avec les anciens combattants russes de la Seconde Guerre Mondiale, durant l’ère soviétique. Les deux groupes s’étaient réunis autour d’une table de conférence la veille ; les Américains avaient écouté les vétérans de la Seconde Guerre mondiale parler avec affection de la période où la Russie (alors l’Union soviétique) et les États-Unis s’étaient alliés contre le fascisme ; les deux parties avaient partagé la conviction qu’une relation pacifique et productive entre les deux pays pourrait et devrait exister à nouveau.
Avant la conclusion de la réunion, les Américains ont invité les vétérans russes à les rejoindre dans les eaux de la Mer Noire pour une « Nage pour la Paix ». Mais lorsque les Américains ont lancé l’idée en premier, ils n’étaient pas sûrs que les officiers solennels et dignes de l’ère soviétique – certains d’entre eux semblaient inapprochables dans leurs uniformes militaires raides et couverts de médailles, de rubans et autres tenues de guerre – prendraient l’invitation à cœur.
Néanmoins, l’après-midi suivante, les vétérans se sont retrouvés en costume de bain, se jetant avec enthousiasme dans les vagues avec leurs homologues américains dans une manifestation de véritable « diplomatie en maillot de bain ». Ils ont été bientôt rejoints par d’autres citoyens de Yalta, y compris l’un des fonctionnaires de la ville – qui semblaient tous se réjouir de l’esprit de bonne volonté qui imprégnait l’événement.
Pendant ce temps, les caméras tournaient, et la « Nage pour la Paix » a été diffusée à la télévision russe. Cependant, dans les jours qui ont suivi l’événement, il n’y a eu aucune reprise dans les médias américains ou occidentaux
Des sanctions sévères
Malgré l’existence des sanctions punitives des États-Unis et de l’Union européenne contre la Crimée qui ont paralysé l’industrie touristique locale et nui aux entreprises locales – par exemple, la ville de Yalta en Crimée était envahie chaque été par les navires de croisière européens, mais il n’y avait pas un chat l’année dernière en raison des restrictions aux voyages imposées par les États-Unis – Yalta a montré une hospitalité chaleureuse aux invités américains. Ainsi lorsque les nageurs ont atteint le rivage, ils ont été invités à une réception en plein air avec des plâtrées de fruits frais, tous cultivés localement en Crimée, dont des framboises, des fraises et autres spécialités – Et des verres ont été levés en l’honneur des liens pacifiques américano-russes, avec des vins issus de raisins cultivés localement.
La « Nage pour la Paix » de Yalta – bien qu’elle soit un petit événement local – a construit un pont d’amitié et de paix entre les Américains et les Russes à un moment de tensions accrues qu’a déclenchées le coup d’état parrainé par les États-Unis en 2014 en Ukraine. Ébranlés par l’instabilité engendrée par les événements violents qui avaient eu lieu à Kiev, les Criméens ont voté massivement lors d’un référendum pour le rattachement avec la Russie (la Crimée faisait partie de la Russie jusqu’en 1957, lorsque le Premier ministre soviétique Nikita Khroutchev « a donné » la péninsule à l’Ukraine.)
Malgré le régime de sanctions du gouvernement des États-Unis qui a nui à nombre de programmes d’échange russo-américains productifs, aux niveaux culturel, social, politique et diplomatique, les russes ordinaires ont clairement et fortement exprimé le désir de vivre en coexistence pacifique avec les États-Unis – un sentiment qui a été exprimé à la délégation des États-Unis non seulement en Crimée, mais dans d’autres régions de la Russie, tel que documenté par la députée de l’ICC et ancienne diplomate américaine Ann Wright.
En se joignant vaillamment aux citoyens américains dans la « Nage pour la Paix », les citoyens de Yalta ont démontré un niveau de bonne volonté et d’amitié qui pourrait servir de point de départ pour l’élaboration les bases solides d’un mouvement pour la paix entre citoyens russes et américains.
J’espère sincèrement que la « Nage pour la Paix » deviendra une tradition annuelle entre les Russes et les Américains – non seulement à Yalta, mais dans d’autres villes balnéaires russes et américaines disposées à accueillir des délégations de Russes et d’Américains qui croient en la possibilité de la paix entre nos deux peuples et nations. De petits gestes de bonne volonté peuvent donner des résultats durables.
Le 22 avril 2017, la ville de Yalta a dévoilé un buste de Franklin Delano Roosevelt dans la rue Franklin Roosevelt de la ville, afin de marquer le rôle historique du président américain pour forger la paix de l’après-guerre lors de la conférence de Yalta en 1945. Les responsables locaux ont déclaré qu’ils espéraient que le geste « aiderait à améliorer les relations entre la Russie et les États-Unis ».
Que Yalta – qui souffre de manière disproportionnée de l’impact des sanctions américaines contre la Russie – ait choisi d’honorer un ancien président américain à un moment de stress et de tension entre la Russie et les États-Unis – et ait invité une délégation américaine en visite à une « Nage pour la Paix » – devrait permettre aux citoyens américains de faire une pause dans l’hostilité permanente des médias américains envers la Russie.
Le monument qui a honoré Roosevelt à Yalta et la « Nage pour la Paix » ont-ils été signalés dans les médias mainstream des États-Unis ? Et si ce n’est pas le cas, pourquoi donc ? Une ville américaine aurait-elle un jour l’intention de rendre la pareille aux citoyens russes ou bien à un dirigeant russe ?
Si les Américains pouvaient entendre parler des gestes de bonne volonté des citoyens de Russie qui croient en la possibilité d’une coexistence pacifique, ils seraient moins enclins à laisser leur gouvernement lancer une guerre qui pourrait conduire à l’utilisation d’armes nucléaires.
[Photos : http://www.ourjourneytosmile.com/blog/2016/07/for-russians-with-love/]
Elizabeth Murray a été agent adjoint du Renseignement national pour le Proche-Orient au National Intelligence Council avant de prendre sa retraite après une carrière de 27 ans au gouvernement américain – dont 20 en tant qu’éditeur et analyste des médias au Centre Open Source (OSC). Elle est membre du Veteran Intelligence Professionals for Sanity (VIPS).
Source : Consortium News, Elizabeth Murray, le 2 mai 2017.
Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.
source : https://www.les-crises.fr/souvrir-a-la-paix-avec-la-russie-par-elizabeth-murray/
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