Le management dépasse le cadre de l’entreprise pour s’immiscer partout, y compris en politique. Loin d’être une discipline «neutre», il est porteur d’une vision du monde. Entretien avec Baptiste Rappin, pour décrypter cette révolution silencieuse, vectrice d’un monde américanisé.
La République française est aujourd'hui en Marche et elle entend marcher joyeusement avec efficacité. Et pour cela, rien de plus efficace que le management. Ainsi LRM souhaite-t-elle bouleverser la politique par les méthodes de l'entreprise. Ses candidats, rappelons-le, avaient été sélectionnés sur dossier en bonne et due forme avec CV, lettre de motivation et entretien. Voici donc venu le rêve des managers: finie la politique des apparatchiks, transformons les partis en start-up, plaçons à leur tête un DRH qui ne manquera pas de transformer les mandats des élus en CDD.
Efficacité, disions-nous. Mais cela est-il aussi simple? Le management est une révolution… Or, «l'enfer est pavé de bonnes intentions», nous enseigne le bon sens. Et comme nous le savons, les révolutions ont toujours des conséquences inattendues.
Alors justement, pour comprendre ce qui se trame et risque fort d'advenir, nous accueillons Baptiste Rappin, qui enseigne à l'institut d'administration de Metz, et vient de publier Au régal du management, le banquet des simulacres, aux éditions Ovadia.
La troisième voie managériale
«Quand on est étudiant en école de management, on a l'impression de recevoir des méthodes et des processus qui visent à optimiser le fonctionnement de toutes les organisations: entreprises, mais aussi association, hôpitaux, armée. Même les maternelles s'y mettent. Mais c'est plus complexe que cela quand on lit les fondateurs du management. Taylor offre la synthèse de sa doctrine en 1911: que vise-t-il? Le pacifisme. Ce dont il faut se débarrasser en premier, c'est tout type de conflits. Ce qui est visé ici, c'est la lutte des classes. Taylor n'a jamais collaboré avec les syndicats, car ils sont porteurs d'une vision belliqueuse et belligène des relations. Mais aussi éliminer tous les conflits qui naîtraient de la divergence des intérêts individuels. Ni marxiste ni libéral, Taylor s'inscrit dans la troisième voie que l'on nomme l'industrialisme, qui vise à établir le règne d'une fraternité universelle. Le projet du management, c'est celui du pacifisme.»
La révolution permanente du management
«Il s'agit de mettre aux commandes de l'État des hommes d'affaires. Le management et l'efficacité prennent les commandes. Il y avait des infiltrations du management sous la forme d'audit dans les administrations précédentes, mais là c'est un projet enfin assumé et explicite. Le management est une révolution en lui-même: ce qu'il promeut c'est "l'amélioration continue" comme on dit dans le jargon de la qualité totale. Le changement est l'ordre normal des choses. Le management est un monde sans repos.»
L'intention managériale
«Le management est la science du travail dans une société industrielle. Il est de coutume d'opposer les nouvelles modes managériales, à partir de la Seconde Guerre mondiale, aux anciennes manières de procéder, séparant un taylorisme autoritaire et hiérarchique de nouvelles modes comme le coaching ou le bien-être en entreprise, qui —enfin!- réconcilieraient le bonheur et la performance.
Je m'inscris en faux contre cette perspective, car je considère que nous sommes encore fidèles au projet taylorien tel qu'il a été écrit. Il ne faut pas oublier que Taylor était quaker. Il parle de "friendly cooperation". Il y a un peu de l'homo festivus chez Taylor: on doit travailler, mais dans la bonne humeur et en se considérant comme des frères les uns des autres. C'est de la sécularisation de l'évangélisme américain. La révolution cybernétique a placé l'information au cœur de notre société. Mais la cybernétique reprend ces grands thèmes de la révolution industrielle, du Salut par l'organisation et l'efficacité.»La révolution permanente du management
«Il s'agit de mettre aux commandes de l'État des hommes d'affaires. Le management et l'efficacité prennent les commandes. Il y avait des infiltrations du management sous la forme d'audit dans les administrations précédentes, mais là c'est un projet enfin assumé et explicite. Le management est une révolution en lui-même: ce qu'il promeut c'est "l'amélioration continue" comme on dit dans le jargon de la qualité totale. Le changement est l'ordre normal des choses. Le management est un monde sans repos.»
L'intention managériale
«Le management est la science du travail dans une société industrielle. Il est de coutume d'opposer les nouvelles modes managériales, à partir de la Seconde Guerre mondiale, aux anciennes manières de procéder, séparant un taylorisme autoritaire et hiérarchique de nouvelles modes comme le coaching ou le bien-être en entreprise, qui —enfin!- réconcilieraient le bonheur et la performance.
Face à la docilité, réenraciner
«J'apprends à mes élèves à se distancier, à prendre du recul avec ce management. Le management ne va pas de soi: il est questionnable et porteur en lui d'une vision philosophique et géopolitique très actuelle. On peut certainement diriger les hommes autrement, mais non les manager autrement. Il existe des traditions de direction, de conduite, d'animation d'équipes qui sont civilisationnelles, nationales, parfois régionales, qui n'entrent pas dans le giron du management. La logique contractuelle des États-Unis n'est pas celle de l'honneur et de rang qui caractérise la France du fait de son héritage d'Ancien régime. (…) La docilité provient du corporatisme qui sous-tend le management: en arrangeant l'environnement, on en sortirait le comportement qu'on veut: la docilité s'appuie sur une sorte de superficialité de l'être humain, qui ne serait qu'une surface de stimuli et de réponses. Réenraciner suppose de lui donner une certaine intériorité et une certaine verticalité pour sortir de cet aplanissement.»
Un vecteur du soft-power américain
«Les deux coups d'envoi du management, Taylor et la cybernétique, sont américains. (…) Les États-Unis ont développé des armes culturelles dont font partie le cinéma, l'art contemporain, mais également le management, c'est-à-dire "la façon américaine d'organiser le travail". Que s'est-il passé en France? La discipline des sciences de gestion a été reconnue officiellement dans les années 70. La première génération française a été se former parmi les fondateurs du management contemporain, ils ont obtenu leur Ph.D. aux États-Unis. (…) Le management est là pour, en permanence, remettre en question ce qui est institué au nom de la révolution continuelle pour l'efficacité. C'est une arme cognitive, car elle joue sur nos modèles mentaux.»
Un vecteur du soft-power américain
«Les deux coups d'envoi du management, Taylor et la cybernétique, sont américains. (…) Les États-Unis ont développé des armes culturelles dont font partie le cinéma, l'art contemporain, mais également le management, c'est-à-dire "la façon américaine d'organiser le travail". Que s'est-il passé en France? La discipline des sciences de gestion a été reconnue officiellement dans les années 70. La première génération française a été se former parmi les fondateurs du management contemporain, ils ont obtenu leur Ph.D. aux États-Unis. (…) Le management est là pour, en permanence, remettre en question ce qui est institué au nom de la révolution continuelle pour l'efficacité. C'est une arme cognitive, car elle joue sur nos modèles mentaux.»
Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur.
source : https://fr.sputniknews.com/points_de_vue/201711211033980909-arme-cognitive-management/
Un article plus ancien... mais toujours d'actualité et pertinent
« Tirez parti de
la crise, changez votre vie !»
Mes chères
impertinentes, mes chers impertinents,
C’est la crise,
c’est terrible, il n’y a plus de travail, c’est tellement dur,
que vais-je devenir ? Ces questions là mes chers amis lecteurs,
je les entends désormais presque tous les jours, dans les
transports, chez mes proches, dans ma famille ou encore dans vos
mails nombreux.
Aujourd’hui, parce
que l’économie n’est pas une science dure, mais une « science
sociale » je voulais vous parler de vous. Je voulais remettre
l’individu, défini par sa capacité de choisir, au centre de la
réflexion. De votre réflexion. Vous en ferez bien ce que vous
voudrez ou ce que vous en pourrez. Il n’y a dans les considérations
que vous pourrez lire qu’une infinie bienveillance à l’égard de
toutes et tous, la vie étant pour beaucoup faites de vicissitudes et
de difficultés surmontées avec plus ou moins de succès.
Ne vous demandez
pas ce que l’Etat peut faire pour vous, mais ce que vous pouvez
faire pour vous aider vous-mêmes !!
La phrase que vous
venez de lire est un plagiat d’une citation un peu déformée et
adaptée d’un Président américain. N’imaginez pas que dans ma
bouche ce soit une ode au libéralisme le plus débridé ! Telle
n’est pas ma vision des choses, mais au bout, du bout, tout au bout
du compte, se trouve votre vie résumée par une succession de choix
ou de non-choix plus ou moins heureux ou malheureux.
Notre vie est la
conséquence de ces choix
Pour bien vivre,
l’idée générale doit tourner autour de notre capacité à faire
le moins de mauvais choix possibles, car évidemment nous en faisons
tous des erreurs. Parfois, quand l’accumulation de mauvais choix
est trop importante, la situation devient critique. Trop de nos
concitoyens terminent dramatiquement sur les autoroutes sans radar du
suicide avec plus de 11 000 morts par an et plus de 200 000 blessés.
La société blesse. La société exerce une violence sur les âmes.
La société peut retirer beaucoup de sens… MAIS, nous restons dans
notre esprit fondamentalement libre de penser si nous faisons
l’effort de penser et de poser des actes de choix issus d’un
processus de réflexion.
La souffrance au
travail n’est pas une fatalité
Il y a ceux qui ont
compris parce qu’ils ont pu poser les mots sur leur situation, et
toutes celles et ceux par millions qui souffrent tous les jours en
silence, allant travailler la peur au ventre parce qu’il n’y a
pas le choix, parce qu’il y a 6 millions de chômeurs, parce qu’il
faut bien payer les crédits et accessoirement élever ses enfants.
Vous devez bien
comprendre que c’est normal de raisonner de cette façon-là car
c’est exactement de cette façon-là que l’on veut que vous
raisonniez.
Les techniques de
management sont en réalité des techniques de manipulations
psychologiques
Vous n’avez pas
idée de la puissance des idées et des mots. Ils détruisent, ils
font mal, ou au contraire, ils élèvent, ils grandissent, ils
mobilisent.
Le problème c’est
que depuis une vingtaine d’année les mots sont utilisés à des
fins malsaines dans le but soit de « fabriquer le
consentement » des masses, comme l’a si bien écrit et
expliqué l’activiste américain de gauche et brillantissime
linguiste Noam Chomsky ce qui n’est qu’une forme d’endoctrinement
moderne, soit comme techniques dites de management; ces techniques,
et nous allons y revenir, ayant pour objectif de vous asservir au
totalitarisme marchand.
Les techniques de
management c’est quoi ?
Ce sont des outils
basés sur l’étude de votre fonctionnement psychologique… enfin
pas du vôtre, celui de façon générale de l’être humain.
Tous les managers
vont être formés selon un principe pyramidal à ces techniques. Les
petits encadrants n’auront droit qu’à la formation de base sans
même comprendre la portée réelle de la puissance de ces premiers
outils ni de leur dangerosité et qui seront dans des mains
totalement incompétentes.
Plus vous monterez dans la hiérarchie, plus les outils auxquels vous aurez accès seront puissants et redoutables. L’idée c’est que le N+2 puisse avoir les moyens de pressurer le N+1, qui lui même dispose des outils pour pressurer les masses laborieuses d’en bas.
Plus vous monterez dans la hiérarchie, plus les outils auxquels vous aurez accès seront puissants et redoutables. L’idée c’est que le N+2 puisse avoir les moyens de pressurer le N+1, qui lui même dispose des outils pour pressurer les masses laborieuses d’en bas.
Prenons un exemple.
Le petit commentaire glissé le vendredi soir à 17 heures juste
avant votre week-end. « Pierre-Paul-Jacques, vous passerez me
voir lundi à 10 heures dans mon bureau, il faut que je vous vois ».
Rien d’autre évidemment, pas d’explication.
Vous allez me dire,
celle-là je la connais (je sais c’est fait pour cet exemple, on a
tous les mêmes chefs à la con qui ont suivi les mêmes formations
venues des Etats-Unis et conçues par les mêmes grands cabinets de
conseils), c’est pour me faire passer un sale week-end et me mettre
la pression… erreur !
C’est pour
déclencher en vous un processus de culpabilité qui va conduire à
votre mise en infériorité psychologique. Vous devez vous sentir
inférieurs au chef. Un être qui se sent inférieur est docile.
Comprenez-moi
bien. Vous n’êtes pas inférieurs. MAIS vous devez vous sentir
inférieur.
Nous pourrions
multiplier les exemples à l’infini.
Une autre phrase
type dans cette logique c’est quand un collaborateur répond à une
question en disant à son chef « je crois que… blablabla ».
Le chef martial lève la tête et dit d’un air glacial et sans
appel « vous croyez, ou vous êtes sûr »… le message
implicite est clair, « vous êtes une grosse merde en état
d’infériorité et moi y en a être le grand chef omniscient ».
Vous pouvez tenter
comme moi de jouer le malin en lui expliquant que par définition, si
vous dites « je crois » il faute comprendre « je
crois », ce qui implique une potentialité d’incertitude et
de marge d’erreur dont l’analyse brillante de sa sainteté le
chef devrait lui permettre de prendre quand même une décision basée
sur des éléments partiels ce qui est le boulot d’un chef… Bon
je vous le dis tout net, cette approche permet de vous faire plaisir,
de sauvegarder en totalité votre estime de soi, mais rarement de
favoriser une forme d’ascension dans votre carrière…
Je rappelle au
passage que si vous dites « je crois » c’est que l’on
vous formate depuis l’école à ne pas être sûr de vous !!!
Si vous dites « je » dans une rédaction on vous explique
que ce n’est pas bien, que c’est très prétentieux, et qu’il
faut faire preuve de modestie (quand j’ai répondu que « JE
pense, donc J’écris, donc JE suis » ce qui était
parfaitement juste dans le contexte concernant mon utilisation
abusive du pronom « JE » dans ma dissertation, je suis
parti viré pour insolence)… Pourquoi ? Parce que seul(e) la
maîtresse, le maître (le mot en lui-même n’est pas un hasard) ou
le professeur est un « sachant qui sait »… vous, vous
ne savez rien, vous vous taisez, vous obéissez !!
Là encore
l’Education nationale a un gros travail à fournir avant de réussir
à renforcer l’estime de soi des élèves, ce qui est évidemment
la base pour lutter contre l’échec scolaire. Mais c’est un
raisonnement sans doute trop complexe pour une telle institution, à
moins que l’éducation ne serve pas à éduquer mais à formater de
bons consommateurs bien obéissants.
Néanmoins cette
approche est indispensable car nous n’avons pas encore parlé de
l’essentiel. L’essentiel c’est la conséquence de votre mise
consciente en infériorité.
La conséquence,
la perte d’estime de soi, et c’est dramatique.
Soyons direct. Quand
on vous dit que vous êtes nuls en permanence c’est difficile
d’avoir confiance en soi.
L’obéissance et
la soumission que le totalitarisme marchand veut générer chez vous
a pour conséquence la destruction de votre « estime de soi ».
L’estime de soi,
c’est une idée essentielle de la construction psychique de chaque
individu, de chaque être humain.
Basiquement, cette
estime de soi est construite, si tout se passe bien, par vos parents
pour qui vous êtes le plus beau, le plus grand, le plus merveilleux,
le plus précieux des trésors.
Vous êtes un être
exceptionnel dans le regard rempli d’amour de vos parents. C’est
de cet amour que vous pourrez tirer la force, bien plus tard,
d’affronter le monde des grands (pas toujours
joyeux) !
Ceux qui n’ont pas
cet amour infini et inconditionnel, cette admiration permanente et le
regard attentif de leurs parents, ceux-là seront des blessés à vie
et pour beaucoup hélas nous les retrouverons dans les statistiques
d’une insondable tristesse que je citais plus haut.
Ce que je veux vous
dire, vous faire comprendre, et faire comprendre à ceux autour de
vous dont vous pouvez percevoir la détresse, c’est que l’on
ne peut pas survivre longtemps à la destruction de l’estime de
soi.
Or les techniques
managériales détruisent l’estime de soi , ce qui est justement
leur cible, pour vous rendre dociles et corvéables à merci.
Vous serez de
plus en plus nombreux à devoir choisir entre vous et votre travail !
Lorsque l’on est
lucide, si je pose la question « vous préférez vivre ou vous
suicider en raison d’une dépression causée par la perte d’estime
de vous au travail ? ».
Normalement vous
allez le dire je préfère vivre… sinon c’est que vous en êtes à
un stade trop avancé et dans ce cas là cela doit faire sonner un
signal d’alarme. Dans ce cas vous ne seriez plus lucides.
Le problème c’est
qu’hélas, la question est rarement posée en ces termes. Au
contraire, votre entourage, bien intentionné et bien formaté aussi,
va vous sortir l’ineptie suivante : «
Quooooooaââââ ??? démissionner ? Mais tu n’y penses
pas, toi qui as un très bon travail, un beau salaire ? »…
si vous laissez faire 10 secondes de plus vous aurez droit au
sempiternel « mais qu’est-ce que tu vas faire ? ».
Le postulat de base
erroné est que vous devez tout faire pour garder votre travail. A
tout prix. Que votre travail lui ne vous garde pas à tout prix et
que vous soyez « virables » à n’importe quel moment ne doit
surtout pas rentrer dans la réflexion, pas plus que le fait que si
vous continuez dans ce boulot, vous finirez au cimentière avec
l’épitaphe suivante : »
Ci-gît
Pierre-Paul-Jacques mort parce qu’il avait peur de quitter son
boulot »…
« Sannat
vous vous mettez en danger »…
Pour détendre un
peu l’atmosphère, à l’époque où j’étais banquier il y a
fort longtemps, j’avais eu l’outrecuidance au bout tout de même
du 4ème hold-up à mains armées dans mon agence, d’écrire au
Directeur du Groupe (un truc qui ne se fait pas, vu que cela ne suit
pas la sacro-sainte voie hiérarchique) pour lui expliquer qu’au
bout de 4 braquages en un an, ça serait bien d’installer un sas de
sécurité et pas juste un panneau portes-ouvertes… bon évidemment,
j’ai été convoqué pour une séance de soufflante devant le n+1,
+2 et +3 réunis pour une séance d’exécution publique. Et le N+3
a eu cette admirable remarque en citant mes propos mon courrier sous
les yeux « Sannat, vous ne vous rendez pas compte, avec ce genre de
lettre, vous vous mettez en danger »…
Vous imaginez ma
réaction évidemment… j’ai à mon tour soulevé les sourcils,
utilisé l’arme fatale du silence (le silence est une arme
terrible, un jour je vous expliquerai) et d’un ton glacial je lui
ai répondu que « effectivement Monsieur, vous avez
parfaitement raison. Chaque jour où je viens travailler, chaque
heure passée ici me met dans un très grand danger. Vous avez
parfaitement raison de si bien le dire après 4 braquages et toujours
pas de sas ».
Bon l’agence a un
eu un sas de sécurité et moi une mutation directe à l’agence
ANPE (à cette époque on comptait en francs et on pointait à
l’ANPE)… mais j’étais encore en vie.
Tout n’est pas
possible, tout n’est pas acceptable et votre vie, souvent, vaut
bien plus que votre emploi, même quand il y a 6 millions de
chômeurs…
Tirez partie de
la crise, changez votre vie, et changer votre vie c’est changer
votre façon de voir!
Tirer profit de la
crise n’est pas qu’une question d’argent. C’est bien
l’argent, c’est super, c’est indispensable même, mais le
bonheur ne s’achète pas, même si l’argent nous évite les
malheurs matériels l’argent ne protège pas des maladies, de la
tristesse ou encore et c’était l’objet de mes réflexions de la
destruction massive de l’estime de soi des gens.
Alors, oui, il faut
le dire, tirer partie de la crise c’est aussi savoir dire non,
c’est aussi savoir demander ou négocier une rupture
conventionnelle, c’est aussi savoir se réorganiser pour vivre
autrement, pour gagner moins et vivre mieux ou vivre plus.
La crise fait que
beaucoup parmi vous perdront leur travail, ou auront peur de le
perdre.
Comment vivre sa vie
dans la peur permanente ? Comment vivre quand votre chef lamine
votre âme avec comme enjeu un pauvre tableur excel dont la case
numéro 57892 n’a pas été incrémenté du bon chiffre… Tout
cela est dérisoire, dérisoire et pourtant c’est tout votre
environnement, toute votre vie, impossible de vous projeter sans
votre tableur excel et votre chef caractériel parce que toute la
société vous conditionne à supporter cela.
Certains font le
choix de tout quitter, de changer de vie. Pour certains ça marche.
Pour beaucoup… ça foire !
Je ne veux pas vous
dire de quitter votre job ! Loin de moi cette idée-là et
chacun doit vivre sa vie. Ce que je vous invite juste à faire en
revanche, c’est à réfléchir aux conditions de votre servitude.
Qu’est-ce qui vous
rend dépendant au point de supporter les pires humiliations ?
L’égo ? L’ambition ? L’argent ? Les crédits à
rembourser ? La peur ? Le carriérisme ? Peu importe
vos réponses. Elles ne concernent que vous.
Ce qu’il faut en
revanche c’est que vous pensiez dès maintenant à ce que vous
ferez si votre travail vous quitte ou si le burn out vous brûle les
ailes.
Comment créer les
conditions de votre émancipation ? Il existe quelques réponses
comme le désendettement, la simplicité volontaire et la baisse
consciente de vos besoins, la constitution d’une épargne ou même,
l’investissement dans votre futur outil de travail ou dans des
savoirs-faire, sans oublier le déménagement pour aller dans des
endroits moins chers.
Se préparez à ne
pas subir la crise c’est chercher à ne pas attendre, à ne pas
être passif, à ne pas subir en vain et sans visibilité.
Oui le travail
tue, et il tuera de plus en plus.
Ne soyez pas une
victime et pour ne pas être une victime il faut être indépendant
car la main qui reçoit est toujours placée en dessous de celle qui
donne. N’oubliez pas comme le disait Saint-Exupéry que l’on ne
voit bien qu’avec le cœur, l’essentiel est invisible pour les
yeux. Ne participez pas à la pression sociale qui consiste à
critiquer malgré vous ceux qui n’en « peuvent » plus
et qui veulent tout plaquer… entendez leurs souffrances et n’ayez
pas peur, une autre vie est toujours possible!
En fait ce que je
voulais vous dire c’était de prendre soin de vous.
Préparez-vous, il
est déjà trop tard !
Charles
SANNAT
http://www.insolentiae.com/tirez-partie-de-la-crise-changez-votre-vie-ledito-de-charles-sannat/
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