dimanche 14 décembre 2014

De l'autre côté du miroir... Un article d'actualité sur le temps de travail, la délocalisation, l'absurdité productiviste... / On the other side of the mirror... An article of current events on the working time, the relocation, the productivist nonsense...

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http://www.setca-nrb.be/setca/index.php?option=com_content&task=view&id=106&Itemid=59

DE L'AUTRE CÔTÉ DU MIROIR...
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09-02-2008
On l'oublie souvent, mais nos conditions de travail confortables, nos horaires de travail, nos congés, nos indemnités en cas de maladie, toutes ces choses que nous considérons comme banales, évidentes et définitvement acquises ne sont pas entrées dans les moeurs et dans la loi sur un simple claquement de doigts.
 
Témoins ces courts extraits d'une période de l'histoire qui est encore très, très proche de nous. Une époque qui nous semble à des années-lumière de ce que nous connaissons aujourd'hui, mais qui demeure le quotidien de centaines de millions de gens de par le monde au moment où vous lisez ces lignes :
Nous sommes en 1848, à la suite d’une longue lutte, la journée de travail vient de passer de 16 heures à 14 heures dans des entreprises de la région de Lyon. Pour le patronat de l'époque, c’est la catastrophe, ainsi qu’ils le disent dans une lettre adressée au préfet :
«Nous attirons votre attention sur les graves conséquences qu’auraient à subir nos industries si la loi venait à être appliquée. Vous le savez la main d’oeuvre, ici, est exigeante et hors de prix. Avec seize heures nous tenions à peine. Quatorze heures précipiteraient les faillites. Nous attirons d’autre part, votre attention sur le fait que libérée plus tôt de son labeur la main d’oeuvre n’y gagnerait pas en sommeil et en repos. Elle s’empresserait de rejoindre le café ou le débit de boisson et il y aurait fort à craindre pour les jeunes filles qui libres et désoeuvrées trop tôt le soir, risqueraient de se livrer à des actes que la morale réprouve.»
En 1919 les mêmes réactions se produisent lorsque la loi des huit heures est définitivement adoptée. Voila ce qu’écrit un patron de l’électrochimie lyonnaise à propos de cette loi :
 
« On en veut, décidément à ceux qui font la richesse du pays. Les patrons ne cessent de d’être pénalisés alors qu’ils sont la principale force de notre essor économique. Il est sûr que notre industrie ne supportera pas ce nouveau coup... Et que feront désormais nos ouvriers de tout ce temps vacant ? Débauche désoeuvrement fainéantise fréquentation plus assidue des femmes de mauvaise vie? Décidément la morale n’est plus du coté du gouvernement. Faudra-t-il bientôt que nous transportions nos usines dans les colonies là où la main d’oeuvre est plus travailleuse (*).»
(*) Eh oui, déjà à ce moment, la délocalisation était brandie comme menace pour tenter de maîtriser les avancées en matière sociale... 
En 1938, Edouard Daladier supprime par décret-loi (sans vote au parlement) la semaine des quarante heures, obtenue en 1936. L’argument utilisé pour justifier cette suppression est :
« Cette loi de paresse et de trahison nationale est la cause de tout les maux de notre économie. Elle a précipité la chute de la France. On ne peut avoir à la fois une classe ouvrière avec une semaine de deux dimanches et un patron qui s’étrangle à faire vivre le pays. »
Voici encore ce qu’Henri Schneider (figure historique du grand patronat français) déclare en 1896 au journaliste Jules Huret :
« Et la journée de huit heures? »
« Je veux bien....Seulement les salaires baisseront ou le prix des produits augmentera, c’est tout comme. Au fond la journée de huit heures c’est encore un dada du boulangisme. Dans cinq ou six ans on n’y pensera plus on aura inventé autre chose. Pour moi la vérité, c’est qu’un ouvrier bien portant peut très bien faire ses dix heures par jour, et qu’on doit le laisser libre de travailler d’avantage si ça lui fait plaisir. »
Ces textes ont beau l'air de sortir tout droit d'un roman d'Emile Zola, il s'agit de documents historiques. Quant à la photo des mineurs sur le point de descendre dans la mine, et au dessin des enfants poussant les berlines dans les galeries trop petites et étroites pour que des adultes puissent s'y glisser, ils parlent d'eux-mêmes.
S'il y a quelque chose à retenir de notre passé récent, c'est bien qu'il demeure le quotidien d'énormément de gens, et aussi que rien n'est jamais acquis pour toujours. Les lois peuvent être abrogées. D'autres lois peuvent être votées, comme celle de 1938 qui annulait la loi de 1936 fixant la durée maximale de travail à 40 heures semaines.
Les lois peuvent être faites et défaites au gré des changements de majorité au pouvoir, tout comme les accords entre patronat et syndicat, qui dépendent uniquement du rapport de force que les travailleurs peuvent établir en soutenant leur organisation syndicale.

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